Miettes philosophiques.
 Réponses aux questions.

        De la philosophie (en bleu)
        La vérité et l'illusion(en vert)
        De la vérité: fiction, réalité, réel et illusion(nouveau)
        La question du pourquoi et du comment: de l'illusion métaphysique (nouveau) (nouveau)
        Rôle et limite de la raison (nouveau)
        La liberté(en bleu)
        La démocratie, le capitalisme et le libéralisme (en rouge)
        Droit de vote et démocratie (nouveau)
        Sexualité et religion chétienne (en Mauve)
        Désir de pureté et pulsion de mort (nouveau)
        L'amour(en vert)
        Soi et l'autre (nouveau)
        L'altruisme, le plaisir et le bonheur(en marron)
        Extrémisme et logique de la consommation (en marron)
        L'art, la modernité, l'érotisme et la philosophie (en orange)
        Désir, raison et éthique   (en noir)
        Critique de l'impératif catégorique(en noir)
        Religion et politique (en Mauve)
        Le sujet
        À propos de la notion de lien social(en orange)
        Justice et capitalisme(en vert)
        De l'universalité de la condition humaine (nouveau)
        L'ambiguïté de la valeur du travail(nouveau)


Voir aussi les textes originaires
        Philosophie et croyances
        République, démocratie et droits de l'homme
        République, nation et laïcité
        De la fiction démocratique à la réalité
        Le vocabulaire du libéralisme philosophique et politique
        Capitalisme et désir
        10 propositions philosophiques libérales
        Plaisir et bonheur
        Puissance du désir et réciprocité
        De l'amour humain; simplement humain

De la  philosophie

    L'acte philosophique consiste à soumettre nos croyances à l'épreuve de la contradiction rationnelle pour
    déconstruire ce qu'il peut y avoir d'illusion en elle, c'est à dire de confusion entre nos jugements de valeur et le
    réel, en vue de dégager la voie pour produire des connaissances vraisemblables (ajustées à la réalité dont nous
    pouvons avoir l'expérience universalisable) et des pratiques personnelles et collectives efficaces.

En cela elle se doit, à mon sens, d'être autocritique de ces propres illusions idéalistes, c'est à dire de la coyance que les idées fondent le réel (Aristote est donc , selon moi, plus philosophe que Platon!). La philosophie s'oppose donc en permanence à ses propre productions idéologiques afin d'ouvrir un dialogue fécond pour les sciences, l'éthique et la politique. La philosophie est nécessairement critique de toute révélation (évidence mystique) ou n'est qu'idéologie sermonante et prédicante plus ou moins rationalisée.
la philosophie se préoccupe donc du non-vrai dans ce que nous pensons (croyons) pour déconstruire l'illusion de vérité qui s'y attache: le rôle de la philosophie est donc plus négatif (critique) que positif, dès lors que toute affirmation en philosophie doit être critiquée et a justement cette fonction principale de susciter l'interrogation rationnelle.

    Ceci dit de très nombreux philosophes ont toujours prétendu que la philosophie se devait de dire le vrai, voire le
    vrai du vrai, la vérité fondamentale. C'est même la définition du projet métaphysique comme science des premiers
    principes ontologiques (voir Descartes); ma position est différente: la vérité appartient aux sciences
    expérimentales, pas à la philosophie; ce qui n'interdit pas à cette dernière de s'interroger sur la valeur (dans
    l'ordre de la connaissance comme de la pratique) des présupposés des sciences et des pratiques humaines, voire
    de contribuer à les mettre à jour d'une manière rigoureuse, pour en tirer des principes normatifs régulateurs
    toujours discutables. En cela la philosophie n'est ni la religion qui prétend déliver "la" vérité transcendante et
    révélée "du" sens de la vie, ni une science expérimentale. Elle est l'exercice même de la raison critique, c'est à
    dire sceptique (au sens du scepticisme relatif et non absolu de Hume) sur les questions de principes et "la valeur
    des valeurs" (Nietzsche) qui sont à l'oeuvre dans le connaissance et dans l'action..

    Or la croyance ou l'opinion prennent les valeurs ou des idéaux régulateurs (devoir-être), toujours
    discutables sur le plan pragmatique, pour des faits (ce qui est réalité et/ou peut l'être, donc sera) et prétend faire de
    cette confusion une vérité objective; en cela réside l'illusion idéologique à laquelle la philosophie n'échappe pas
    (idéalisme); mais celle-ci a, en elle même, les moyens critiques rationnels de la combattre (ce qui n'est pas le cas
    d'autres formes de pensée acritiques et non-dialectiques). Ce jugement de valeur échappe au sujet dès lors qu'il est
    toujours le produit de l'opinion collective normalisatrice et qu'il s'affirme comme une vérité d'évidence
    quasi-(sur)naturelle; donc indiscutable: les valeurs dans leur présentation première ont toujours pour rôle de lier
    les individus et de les rendre prévisibles aux autres dans un contexte socio-culturel déterminé en se présentant
    comme des faits de nature (ou divins), comme donc des vérités objectives (ou sacrées).

Je considère donc que la philosophie ouvre un débat fécond "POUR" les sciences, LORSQUE LES SCIENTIFIQUES, PLUS ENCORE QUE LES PHILOSOPHES, REFLECHISSENT SUR LES FONDEMENTS REGULATEURS ET NORMATIFS DE LEURS PRATIQUES et font de la philosophie critique de leur savoir; mais évidemment, lorsque les philosophes refusent l'examen rigoureux de cette pratique, au nom de leur préjugés moraux ou religieux, transcendantalistes, il font obstacle au progrès des connaissances; sauf qu'aujourd'hui leur pouvoir de nuisance est faible, au contraire de celui des églises, à la renaissance; et ce, grace, en partie, à la philosophie des lumières (et à Kant), ce dont je la félicite. Dans le domaine de la connaissance, il n'y a pas de vérité philosophique; il n'y a que des pro-positions rationnelles critiques (le doute) et régulatrices (les énoncés épistémologiques) "en vue" de produire des vérités scientifiques (hors philosophie).

    Quant aux propositions normatives éthiques et/ou politiques elle ne sont ni vraies ni fausses: elle sont plus ou
    moins "justes", au sens "d'ajustée" au bien-vivre ensemble, autorisant des stratégies désirantes et rationnelles plus
    ou moins autonomes et efficaces dans tel ou tel jeu social, dans des conditions (contraintes) socio-culturelles
    déterminées. Je ne pense pas qu'il soit rationnel et raisonnable de prétendre qu'il y aurait une conception univoque
    du bien et du mal valant dans toutes les situations diverses et qui mettent en jeu des contraintes et des règles du jeu
    très hétérogènes (Gagnant/gagnant; Donnant/donnant; Gagnant/ perdant est..) commandées par des valeurs
    dominantes qui seraient contradictoires si on voulait les appliquer toutes à un seul type de jeu. La philosophie,
    dans son travail dialectique et critique permanent ne peut que permettre de libérer la pensée du fantasme de
    l'unique valeur/vérité et sens de la vie; qui sont la suprême illusion d'essence religieuse. C'est du reste ce qu'elle a
    produit historiquement: la fin de l'emprise du religieux sur la connaissance, l'éthique (et l'art) et surtout la
    politique. Souvent à son corps défendant, la pensée philosophique critique et rationnelle de toute métaphysique
    vraie possible, a mis en déroute les éthiques de conviction dogmatiques, et laissé place nette au pragmatisme
    libéral moderne.

Ainsi, La philosophie quand elle se  regarde le nombril se noie dans un mirage comme Narcisse qui ne comprend pas que l'amour de soi passe par l'amour de l'autre (aux deux sens: l'amour pour l'autre et l'amour de l'autre)! Canguilhem: "la philosophie ne peut bien se nourrir que de ce qui lui est étranger (traduisons: étranger au pur concept)" Sciences, arts, pratiques conventionnelles, expériences et passions communes etc...Sinon gare au délire! "La colombe pourrait croire qu'elle volerait plus vite sans la résistance de l'air extérieur" (traduisons: du réel qui la soutient) Kant.


S'il est une constante de la condition humaine (et non de sa "nature"), c'est le langage et la possibilité qu'il ouvre de permettre à chacun de juger et de se juger (que Hegel appelle la conscience de soi) par la médiation des autres. Mais cette universel, probablement inscrit dans notre code génétique au même titre que l'aptitude au langage, ne dit rien de ce que la culture dans sa diversité fait de lui en chacun de nous et surtout de ce que chacun fait des ressources qu'il reçoit de la culture. C'est dire que cet universel, que d'aucun apellerait "nature" est indissociable de la culture qui l'affecte et donc qu'il n'y a pas de première ni de seconde nature. Si la philosophie s'inscrit dans une culture, celle-ci ne peut être qu'individualiste c'est à dire critique par rapport à l'opinion commune ("penser par soi-même"); ce qui ne veut pas dire nécessairement contre la pensée et les valeurs communes qu'elle produit; cette culture est la nôtre et vouloir en changer, selon une attitude post-moderne à la mode, au profit d'une attitude pré-moderne est proprement contradictoire au sens performatif du terme. Modernes nous sommes, modernes nous restons, y compris et surtout lorsque nous prétendons critiquer la modernité, laquelle rend possible, dans notre culture, cette distance critique dont nous nous servons ici même.

La théologie est une branche de la philosophie et, en cela, produit un effet contradictoire: elle prétend conforter le sacré par des arguments rationnels et l'abolit du même coup en faisant de la révélation objet d'un débat humain, trop humain. C'est ce qu'a bien vu le sunisme (au contraire du chisme) qui a clos tout débat et à voulu transformer la théologie en simple répétition de la parole divine en interdisant toute interprétation...L'athéisme ou l'agnoticisme, comme la laïcité modernes, sont aussi les fruits de la théologie chrétienne et des débats qui l'ont traversée que nulle autorité suffisante n'a pu clore, entre autre du fait de la séparation du spirituel et du temporel, des rois et des empereurs et des papes (Saint-Thomas contre Saint-Augustin, Abélard contre l'église, les jésuites contre les jansénistes et les protestants contre les catholiques etc..). Cela confirme plutôt ma thèse: la religion est objet de débat quand on sort du religieux (du sacré) pour faire de la philosophie (théologie) qui, à son corps défendant au début, a aboli le sacré. La théologie chrétienne a fait ainsi de la religion chréteienne une religion paradoxale: la religion de la sortie du religieux.. (voir Marcel Gauchet: "Le désenchantement du monde")



 D'accord, mais le mot illusion signifie que l'on prend pour vrai ou juste ce qui démenti par les faits dont on se réclame pourtant et qu'on refuse de l'admettre; mais aussi ce qui n'a aucune chance d'être validé en cette vie: ex la croyance dans la résurrection ou dans la création divine; mais encore prendre une simple croyance comme une vérité objective alors qu'elle n'a aucun fondement rationnel possible. etc; etc; Ainsi la croyance à la vérité du libre-arbitre ou de la philosophie sont des illusions: car le libre-arbitre ne peut être prouvé et une philosophie peut être juste dans son pouvoir critique au regard de fins déterminées et du point de vue des effets libérateurs de la pensée qu'elle produit mais elle est tributaire de toutes les autres sciences positives en ce qui concerne la connaissance: la valeur de la philosophie est éthique (normative) et non pas de vérité, croire le contraire c'est là son illusion spécifique. J'ai donc toujours fait un usage "pragmatique" de la philosophie, car je pense que tout autre usage est illusoire.
La théologie est une branche de la philosophie et, en cela, produit un effet contradictoire: elle prétend conforter le sacré par des arguments rationnels et l'abolit du même coup en faisant de la révélation objet d'un débat humain, trop humain. C'est ce qu'a bien vu le sunisme (au contraire du chisme) qui a clos tout débat et à voulu transformer la théologie en simple répétition de la parole divine en interdisant toute interprétation...L'athéisme ou l'agnoticisme, comme la laïcité modernes, sont aussi les fruits de la théologie chrétienne et des débats qui l'ont traversée que nulle autorité suffisante n'a pu clore, entre autre du fait de la séparation du spirituel et du temporel, des rois et des empereurs et des papes (Saint-Thomas contre Saint-Augustin, Abélard contre l'église, les jésuites contre les jansénistes et les protestants contre les catholiques etc..). Cela confirme plutôt ma thèse: la religion est objet de débat quand on sort du religieux (du sacré) pour faire de la philosophie (théologie) qui, à son corps défendant au début, a aboli le sacré. La théologie chrétienne a fait ainsi de la religion chréteienne une religion paradoxale: la religion de la sortie du religieux.. (voir Marcel Gauchet: "Le désenchantement du monde")

 D'accord, mais le mot illusion signifie que l'on prend pour vrai ou juste ce qui démenti par les faits dont on se réclame pourtant et qu'on refuse de l'admettre; mais aussi ce qui n'a aucune chance d'être validé en cette vie: ex la croyance dans la résurrection ou dans la création divine; mais encore prendre une simple croyance comme une vérité objective alors qu'elle n'a aucun fondement rationnel possible. etc; etc; Ainsi la croyance à la vérité du libre-arbitre ou de la philosophie sont des illusions: car le libre-arbitre ne peut être prouvé et une philosophie peut être juste dans son pouvoir critique au regard de fins déterminées et du point de vue des effets libérateurs de la pensée qu'elle produit mais elle est tributaire de toutes les autres sciences positives en ce qui concerne la connaissance: la valeur de la philosophie est éthique (normative) et non pas de vérité, croire le contraire c'est là son illusion spécifique. J'ai donc toujours fait un usage "pragmatique" de la philosophie, car je pense que tout autre usage est illusoire.




  La  vérité et l'illusion

    Une expérience de foi vaut comme témoignage subjectif; elle m'interesse, comme expérience psychologique, même si je ne
     la partage pas; car rien de ce qui est humain ne peut m'être étranger, ni étranger à la philosophie.

    Mais j'ai le droit de parler d'illusion, lorsque certains prétendent  en faire une Vérité
    fondatrice valant nécessairement pour tous (y compris donc pour ceux qui n'ont pas la foi et ne désirent pas
    particulièrement l'avoir); et c'est cela que je critique; ce qui est mon droit le plus strict, au nom de la liberté
    philosophique de penser, sans dieu ni maitre à penser (voir Kant: "Qu'est-ce que les lumières?").

    La mariage entre la philosophie et la religion, ou mieux, entre la raison et la foi a toujours était difficile : elles ne
    peuvent partager la même conception de la vérité (révélation indiscutable ou proposition à soumettre au doute
    rationnel). Lors même que ce mariage s'est fait (théologie), il a toujours été un contrat de dupes: le dieu des philosophes
    est forcément désacralisé (rationalisé) et en prétendant faire de Dieu un objet philosophique, la philosophie l'a descendu
    de son piédestal religieux pour en faire un objet de débat (ex: peut-on démontrer son existence?). Donc la philosophie
    même "religieuse" a contribuée à l'essort de la pensée critique, athéisme compris.

    Ainsi, la question métaphysique par excellence: "Pourquoi y a-t-il de l'Etre plutôt que rien" n'a pas de réponse
    philosophique vraie possible; la meilleure preuve est que Leibnitz et Heidegger ne sont pas du tout d'accord sur la
    réponse et que personne ne peut les mettre d'accord: cette question n'engage, du reste, en rien, à croire à l'existence
    d'un dieu créateur transcendant! Croire que la Vérité est philosophiquement possible dans ce domaine, c'est tomber
    dans l'illusion transcendantale dont parle Kant. La  foi  permet de croire qu'elle a une réponse qui satisfait
    le  désir de croire. Mais sa valeur ne va pas au-delà.



    Libre à certains d'appeller Vérité un choix subjectif d'axiome; mais quand il s'agit d'existence réelle objective (ex:
    existence de Dieu) il convient de faire valider ce choix par des expériences: Le raison ne peut, par elle-même,
    affirmer objectivement vraies ces propres suppositions; car on peut aussi bien établir rationnellement les
    hypothèses contraires; ce sont les apories de la raison; La physique et les sciences objectives ne reposent pas sur
    des choix d'hypothèses arbitraires; relisez Kant (la dialectique de la raison in: "Critique de la raison pure") et tous
    les épistémologues de Bachelard à Popper. Seule l'expérience universelle des hommes (soumise aux contraintes
    scientifiques de la reproductivité; ce qui n'est pas le cas de l'expérience religieuse) peuvent valoir d'épreuves de
    Vérité objective.

    Si l'on  appelle vraies de simples croyances subjectives arbitraires (les nôtres et non celles des autres), alors il n'y a
    aucune raison de faire de ces "vérités" des fondements valant pour les autres, ni de la morale , ni du droit, ni de la
    politique. Ce choix est le vôtre mais ne peut être le mien, car je n'ai pas la chance (la grâce) d'avoir reçu la
    révélation d'en haut et je refuse tout dogme moral ou autre: ce choix n'a aucune valeur philosophique; je le respecte
    en tant que choix privé mais le refuse en tant que fondateur d'un (éventuel) quelconque accord rationnel entre nous.
    De plus je trouverais dangereux que vous puissiez vous référer à votre Vérité pour m'imposer quoi que ce soit:
    l'interdiction de l'avortement ou des manipulations génétiques sur l'embryon humain par exemple. Si vous voulez
    me convaincre, essayez de me montrer, par l'expérience raisonnée, que ces actes sont dangereux en acte et/ou en
    puissance, y compris pour ceux (moi par exemple) qui n'ont pas la foi.

    En cela, la croyance dans la liberté n'est pas une vérité mais une fiction tout autant que celle en Dieu; mais elle plus
    utile dans la société pluraliste qui est la nôtre, car elle n'exige pas que l'on soit d'accord sur la Vérité pour vivre
    ensemble raisonnablement. Les règles de vie ensemble ne doivent pas postuler une religion commune que j'ai (et
    d'autres aussi) de bonne raison de refuser; mais le simple usage de la raison et de l'expérience pour réduire le
    risque de violence (inscrite dans la spontanéité de nos désir) physique, politique et morale; c'est ce que l'on
    appelle dans notre constitution, la laïcité. C'est ce que j'ai voulu dire à propos de Vichy qui voulait refonder la
    politique sur des valeurs religieuses traditionnelles indiscutables et du même coup abolir la démocratie pluraliste.


    Il y a deux versants de la pensée: celui de la poésie (métaphore) et celui de la raison (ou du concept); chacun a sa
    légitimité; mais cette distinction est elle même insuffisante, si l'on ajoute pas qu'ils échangent sur fond de conflits
    nécessaires leurs ressources respectives.
    De même, il y a deux versants de la philosophie: le versant herméneutique qui prend la croyance
    poético-symolique de la religion au sérieux pour en tirer des enseignements plus ou moins arbitraires mais parfois
    féconds et le versant critique qui tente en permanence à évaluer selon des critères rationnels la pertinence de ses
    enseignements et des effets logiques et/ou contradictoires qu'ils produisent.

    Ceci dit je prends pour, au pire, une mystification et, au mieux, une naïveté, la croyance qu'une interprétation,
    fut-elle phénoménologique, soit dépourvue de présupposés idéologiques: le langage est toujours chargé de
    préjugés, ce qui rend nécessaire la vigilence critique permanente à son égard. La meilleure preuve en est notre
    débat sur la question du la croyance religieuse dans son rapport à la philosophie.

    J'occupe, ici, simplement le rôle critique qui a toujours été au coeur de l'histoire de la philosophie
    dans son rapport aux croyances et, en refusant la croyance métaphysique, je refuse le dogmatisme inhérent à toute
    prétendue vision de l'absolu, pour préserver l'autonomie de la pensée qui ne va pas sans scepticisme pragmatique.

    Enfin je ne vois pas comment, ni pourquoi, faire intervenir l' absolu pour traiter des contradictions, toutes relatives,
    qui tissent notre existence (et je n'en exclus ni la souffrance, ni la mort; voir sur mon site). L'absolu, même si on en
    a une définition purement négative (ainsi que la théologie du même nom), ne me paraît pas de bon conseil pour
    définir de nécessaires compromis entre des exigences, valeurs, intérêts et contraintes toujours contradictoires.



    Si l'on admet une proposition générale comme postulat (par définition indémontrable) portant sur la réalité
    objective, elle ne peut valoir que comme d'une hypothèse qui reste à valider dans ses conséquences expérimentales
    (preuves indirectes) encore faut-il qu'elle soit testable (donc expérimentalement réfutable, cf: K.Popper); si elle
    l'est, alors son degrès de (l'in)certitude objective (la certitude subjective portant sur un objet hors de toute sans
    expérience scientifique et/ou pratique), est pure illusion). La certitude objective est donc toujours relative à un type
    d'interprétation théorique et à un champs de l'expérience (classe de phénomènes) déterminés et si elle se croit
    absolue, elle doit être considérée comme une illusion.

    Le problème c'est qu'une proposition métaphysique est par nature intestable expérimentalement, sauf si elle a un
    sens mathématico-physique, ou biologique ou économique, c'est à dire si elle met en jeu des paramètres qui
    renvoient à des observations quantifiables et à des mesures reproductibles; mais je ne l'appellerais pas, alors,
    métaphysique pour la distinguer des propositions dont l'objet et le référent objectif est situé hors du champs de
    l'expérience possible et donc de la connaissance. Il y a illusion lorsque l'on déclare vraie une proposition
    invérifiable; donc lorsque l'on méconnait les limites de validité et les différences de statut entre nos différentes nos
    propositions: proposition réalistes (décrire et expliquer la réalité) , normatives (définir des valeurs et des règles),
    métaphysiques (poser comme réalité ontologique, au delà de toute réalité ontique, un valeur et/ou un être réel, bien
    souvent confondus, sans preuve possible). Toute illusion est confusion des genres de propositions et des champs du
    savoir et de la pratique, refus de considérer les limites de nos savoirs et de reconnaître la relativité de nos
    certitudes; et derriere ces confusions, il y a toujours l'expression d'un désir dont les projections sont considérées
    comme vraies, c'est à dire conformes à la réalité ou, pire encore, au réel.



 Vérité et justice
 

    1) Personne ne voudrait être condamné sur de simples présomptions, sans preuves, ni indices convergents de preuves
    matérielles et témoignages indépendants? Pas moi, en tout cas, je vous rappelle que cette exigence requise de
    vérité, aussi difficile soit-elle à réaliser, est indispensable pour condamner quelqu'un, car tout accusé dont il n'est
    pas fait la preuve de la culpabilité doit être tenu pour innocent; Sinon autant faire appel au jugement de Dieu
    (épreuve de l'huile bouillante) ou au préjugé (délit de faciès) cela couterait moins de temps et d'argent!

    2) Une illusion est une opinion ou croyance dont on affirme le caractère de vérité objective sans preuve suffisante.
    Une simple croyance n'est pas une illusion tant que vous n'en faites qu'une opinion subjective (une conviction
    personnelle). Vous pouvez dire: "je crois que Dieu existe", vous n'êtes pas dans l'illusion; mais si vous dites: "je
    sais que Dieu existe", vous y êtes en plein. La vérité est un prédicat du jugement qui ne concerne pas l'objet mais
    l'idée: ne confondez pas vérité et existence de l'objet: est vrai(semblable) un jugement qui affirme l'existence d'un
    objet, une propriété de l'objet, ou loi déterminant une classe d'objet semblables, qui correspondent à des
    expériences reproductible (sciences dures) ou confirmées par des indices ou preuves convergents: ce n'est pas
    parce que vous avez vu des OVNI dans le ciel qu'il ne s'agit pas d'une illusion d'optique; ce n'est pas parce que
    tous les hommes voient le soleil tourner autour de la terre que cette croyance est vraie. En sciences, dans les
    conditions du laboratoire, une expérience peut et doit être reproductible pour servir d'épreuve de validation
    (informez-vous auprès de vos amis chercheurs)

    3) L'idée de vérité absolument certaine (inconditionnellement) est la suprême illsion; les sciences ne peuvent
    produire des énoncés valides qu'en en faisant des hypothèses toujours relatives à un champs théorique et
    expériemental déterminé, sauf certaines constantes (inertie, énergie, vitesse de la lumière..); encore faut-il que ces
    constantes soient opératoires: qu'elles permettent de faire des prévisions validables et validés par l'expérience.

    4) Il n'y a donc pas de condition suffisante ni de critères d'une vérité "réaliste" absolument certaine et en chercher
    ce serait traire un bouc dans une passoire (Kant)

    5) La recherche de la seule vérité possible, la vérité relative, est au prix de cette modestie et de cette lucidité . La
    vérité se prouve dans la pratique rationnelle: une vérité n'est jamais logiquement suffisante et ne peut l'être; désolé
    de vous décevoir; mais si vous préférer une bonne Vérité certaine et rassurante, qui mèle et confond l'éthique et la
    connaissance, le vrai et le bien, adressez-vous, non à la philosophie critique mais à la religion et à la foi, mais
    cette démarche ne me concerne plus car elle ne peut valoir que pour vous.



    Une remarque sur l'expérience pour commencer: pourquoi confondre l'expérience personnelle, en effet non
    reproductible, (voir Bergson et mon texte sur cet auteur sur mon site) et l'expérience scientifique dans laquelle la
    reproductibilité est une condition requise. Le doute a ce sujet est un doute nécessaire, non pour abandonner la
    démarche scientifique et son exigence de reproductibilité et d'universalisation, mais pour mettre l'expérience et les
    modèles théoriques d'interprétation de la réalité qui la soutendent à l'épreuve de ces critères de scientificité.

    Cette certitude, vis-à-vis de ma position, que vous me prétez n'est donc pas la mienne, car mes propositions
    philosophiques ne sont pas, contrairement à ce que vous semblez "croire", des "vérités" mais des "règles
    normatives pour la connaissance", qui ne valent qu'à la condition qu'elles soient efficaces (pensez-vous que la
    science n'est pas efficace pour produire des connaissances opératoires et utiles?); en cela elle sont "justes" ou non
    et non pas "vraies" ou fausses; elles n'ont rien d'absolu car elles sont purement pragmatiques.

    La position de Wittgenstein ne me semble pas en contradiction avec la mienne, lorsqu'il parle de "jeux" de langage: il y a
    un jeu de langage de la connaissance vraisemblable, il y a une autre jeu de langage: celui de la métaphysique, qui dans le
    domaine de la production des connaissance universalisable, me paraît (Ainsi qu'à Kant et qu'à ..Wittgenstsein) très
    peu fécond. Mais il est probable que ce jeu a d'autres fonctions: éthiques et/ou eschatologiques, voire esthétiques
    dont on pourrait discuter. Mais il ne me semble pas rigoureux de tout confondre: la connaissance, l'éthique et
    l'esthétique; la religion, la science et la philosophie.

    Comprendre de quoi l'on parle, comment, et en vue de quoi, me semble une règle critique nécessaire de la
    philosophie: opposer la métaphysique à la science, sur le terrain de la connaissance, me semble voué à l'échec.
    L'échec de la métaphysique s'entend. Quant au succès de celle-ci sur le plan éthique, c'est une autre affaire.



    Tous philosophe devrait s' intéresser à la question de chaos (David Ruelle). Nous savons aujourd'hui que le chaos peut
    produire de l'ordre. Sans violer le principe de non contradiction, car l'ordre n'est qu'un chaos temporairement
    régulé et autorégulé et que le principe de non-contradiction vaut pour le même objet, dans les mêmes conditions,
    sous le même rapport et dans le même temps, ce que Platon n'avait pas compris au contraire d'Aristote. De toute
    manière, nous savons que l'univers et nous-mêmes retournons au chaos; que cela ne nous plaise pas, est une autre
    affaire et ne concerne pas le vérité. La raison n'a rien d'absolu: elle a une histoire. 

    L'ordinateur et le réseau Internet qui nous permettent de communiquer n'est pas le simple résultat de notre accord
    inter-subjectif et encore moins un simple effet placebo, mais le résultat de recherches scientifiques transformées en
    objets techniques qui existent et fonctionnent réellement dans le réel (hors de nous); c'est dire que les
    applications/actions objectives que les sciences rendent possibles ne sont pas de même type que les actions
    magiques; elles vérifient la pertinence opératoire de nos théorie, c'est à dire leur prise sur le réel, leur capacité à
    produire des vérités, des interprétations objectivement efficaces; et non pas seulement subjectivement symboliques;
    c'est à dire à produire de la réalité, comme interprétation vraisemblable du réel (relativement à des classes de
    phénomènes reproductibles ou universellement observables déterminés). En tout cas, l'introduction de la mesure et
    d'instruments réels universellement étalonnés et invariants pour appréhender les phénomènes observés en
    laboratoire (dans des conditions rigoureusement contrôlées) a changé radicalement notre manière d'expérimenter.
    C'est parce qu'une théorie réaliste peut être appliquée à et surtout produire des phénomènes réels universellement
    déterminables et objectivement observables, donc non purement psychologiques qu'elle est vraie(semblable).
    Reste le problème de l'effet placébo, bien réel, bien qu'il soit l'effet de croyances subjectives; mais, vous savez
    probablement que cette effet peut être mesuré et réduit par des expériences en double aveugle, obligatoires lorsque
    l'on veut mettre un médicament en vente. En cela la psychanalyse ne peut pas être une science mais un art du
    symbolique (magique), ce qui n'enlève rien à sa possible (?) efficacité psychologique, encore faudrait-il pouvoir la
    mesurer objectivement en comparant ses résultats par des mesures précises et fiables à d'autres pratiques
    thérapeutiques magico-symboliques ou scientifiques, ce que la pratique de la cure nous interdit pratiquement de
    faire actuellement.



    1) Je ne sépare pas l'imagination et le rève du désir, que je ne confond pas avec le besoin, comme vous le savez.
    Quant aux archétypes, ils sont pour moi des figurations, dont l'universalité est problématique, des diverses
    modalités d'expression du désir d'être. Il n'est pas de sens hors du désir de faire sens.

    2) Je suis en effet kantien en cela que j'admet sa critique de l'illusion métaphysique et que je suis réaliste, en ce qui
    concerne le statut du réel; mais je ne le suis plus en cela que, pour moi, le réel se manifeste dans la réalité connue
    dès lors que nos théories doivent se soumettre à l'épreuve de la pratique objective de l'expérimentation
    scientifique instrumentalisée et non pas seulement de l'observation sensible, pour être validées. Disons que toute
    connaissance éprouvée de la réalité est une modalité d'expression du réel qui ne s'y réduit pas.


De la vérité: fiction, réalité, réel et illusion

Question: "Le réel ne serait-il pas cet entre-deux, cet espace de "croyance réaliste", d'illusion sans illusion et où la question de ce qui est imaginaire où non ne se pose pas, ce qui se pose c'est la possibilité de se maintenir "vraiment" vivant".

En cela vous maintenez la confusion entre le réel et l'imaginaire en quoi réside l'illusion même (ou confusion entre « vérité » subjective et vérité objective). Ce que permet d'éviter, selon moi, cette confusion entre illusion et vérité, ce qui est le fonction principale de la philosophie critique et rationnelle est une triple distinction :
1) entre fiction et illusion : le fiction est une invention imaginaire qui se reconnaît comme telle et qui est exprime les émotions et les désirs du sujet dans son expérience subjective du monde et de la vie propre plus ou moins partageables par les autres sur fond de métaphores et de signifiants polysémiques (poésie). l’illusion est le refus de reconnaître cette distinction ce qui s’appelle proprement prendre ses désirs pour la réalité, voire pire : pour le réel. Ex : Dieu est une fiction partagée mais devient une illusion si on croit en son existence réelle.

2) entre fiction et réalité : le réalité est ce que l’on peut universellement connaître par des interprétations rationnelles et expérimentalement validées (les connaissances objectives scientifiques) des phénomènes dont nous pouvons faire l’expérience universelle.

3) entre réalité et réel : est réel l’ensemble des phénomènes qui font échec, qui résistent à nos connaissances actuelles et qui nous obligent à inventer de nouvelles hypothèses imaginaires et rationnelles pour en rendre compte qu’il convient à les soumettre à l’épreuve de nouvelles expériences universalisables qu’elles permettent de construire.

Ce pourquoi la position Bouveresse me semble la plus juste et non la plus vraie, ce qui n’a pas de sens pour une thèse philosophique, la plus juste au sens : la plus ajustée à cet objectif qu’est la déconstruction de l’illusion pour rendre possible la connaissance et l’action efficace.

Rendre vraiment vivant ? si c’est accroître sa puissance de connaître et d’agir pour désirer mieux, je vous suis tout à fait, mais cela exige (voir Spinoza) le lucidité rationnelle maximale.

La vérité est le fait pour une proposition (ou une théorie) d’être plus ou moins validée par des expériences objectives reproductibles comme réalité produite (ou manifestée) par le processus même de la connaissance rationnelle hypothético-expérimentale. Le réel est au-delà le vérité acquise ; ce qui lui résiste et pose l’exigence d’un progrès infini de la connaissance qui ne peut s’effectuer qu’en transformant ce réel en réalité(s) connue(s). Ainsi la réalité de tel ou tel ensemble de phénomènes ne concerne qu’un domaine limité du réel qui continue nécessairement à se dérober comme totalité.
Lorsque la fiction n’est plus distinguée de la réalité est confondue avec la totalité ou le fondement du tout réel ou de l’Etre (dans le cas de Dieu), ou lorsque la question de cette distinction entre vérité comme vraisemblance et l’illusion ne peut plus psychologiquement se poser alors on peut parler d’illusion délirante, voire hallucinatoire : ex : la paranoïa et/ou la schizophrénie. Lire Freud à ce sujet qui n’hésite pas à parler de psychose à propos de la religion (« L’avenir d’une illusion ») ; que celle-ci soit collective renforce plutôt sa dangerosité aveuglante, liberticide, voire violente ; car elle ne peut plus être mise en question, sinon à prendre les risques que vous dites.

Il conviendrait de distinguer "justesse" et "vérité". Est juste, selon moi, ce qui est efficace et donc bien ajusté à tel ou tel désir et le désir de savoir ne peut justement être satisfait que par la démarche patiente, critique et auto-critique des sciences; sur ce plan les sciences ont fait la preuve indiscutable de leur fécondité: elles produisent, au contraire des pseudo-savoirs, des connaissance vérifiables que nul ne peut contester sinon par la voie scientifique; quant à d'autres désirs, désir de sens, de bonheur, d'amour, de pouvoir etc, d'autres démarches et pratiques sont légitimes, à la condition de faire usage de savoirs scientifiques dans la mise en oeuvre de leur arguments et moyens et non pas de faux-savoirs (ex: le racisme) et d'être capables de tester les conséquences de ces pratiques sur le bien-vivre avec les autres et avec soi dans la perspactive de l'universalité des droits fondamentaux, comme le sul critère pratique dont nous disposions pour réduire la violence et accroître la coopération dans le monde intersubjectif.

C'est dire enfin qu'opposer les sciences et l'éthique est absurde, car elles ne s'intéressent pas au même objet (objectif): ce qui est ne peut se confondre avec ce qui "doit être"; or cette confusion entre être et devoir être est au coeur de toutes les dérives métaphysiques et religieuses et c'est parce que religion et métaphysique prétendent sans aucun fondement rationnel ou critère testable universalisables possibles être vraies (dire et/ou penser ce qui est) qu'elles contestent aux sciences le droit de revendiquer le monopole de la vérité, que seules, pourtant, elles peuvent établir sur des bases factuelles fiables, dans leur domaine qui est celui de la connaissance objective; quant à la "vérité philosophique" elle n'est qu'un avatar de cette confusion et de cette illusion d'essence religieuse: "la vérité du sens du monde et de la vie dans leur totalité comme vérité supérieure du tout de l'être et du devoir être magiquement réconciliés par la toute puissance du concept"; si une telle vérité, dans le domaine de l'éthique et de la politique, pouvait existait cela se saurait et, comme le disait déjà Kant, les philosophes se seraient déjà mis d'accord sur un certain nombre de propositions fondamentales; or un tel accord n'est ni possible, ni même souhaitable: l'éthique relève du débat intersubjectif sur les fins raisonnables de la vie des individus qui doivent pouvoir en décider d'une manière autonome et ce débat ne peut être soumis à une vérité objective scientifique unique car elle ne concerne que ce qui est et non ce qui doit être, quelque soit l'usage que l'on fait de ce que est, pour transformer la réalité connue en vue de ce que l'on désire; sinon nous serions dans dans le cadre illégitime de la confusion scientiste qui prétend, en sens inverse réduire, l'éthique aux sciences, position totalitaire, en effet. La philosophie doit être non pas vraie mais juste du seul point de vue de l'autonomie subjective (qui ne veut pas dire indépendance mais capacité de manoeuvre)

Conclusion: Du "tout" unifié de nos désirs il faut en faire son deuil; il convient de distinguer ceux-ci pour les lier correctement (avec justesse et mesure) en vue de la plus grande autonomie possible (ou puissance d'agir)

 Le débat sur les procédures de preuves, entre scientifiques, est généralement moins contraignant que ce qu'en dit Popper: si une théorie expérimentale marche et permet, même si elle est partiellement démentie par certaines expériences, de prévoir une classe importante de phénomènes mieux qu'une autre, les scientifiques s'accordent sur sa validité en introduisant des biais dans les équations et/ou des hypothéses auxiliaires ad'hoc (ex de Lorenz) pour réduire les divergences entre résultats prévus et résultats mesurés. Jusqu'au jour où les divergences s'accumulent au point de rendre la théorie de moins en moins manipulable; alors de plus en plus de jeunes et de moins jeunes chercheurs aux dents longues sont à l'affut de théories nouvelles plus fécondes et plus élégantes (et donc plus excitantes) afin les soumettre aux épreuves expérimentales les plus sévères (on est plus sévère avec les nouvelles théories qu'avec les anciennes dont l'usage et l'efficacité est entré dans la routine jusque là suffisament et pratiquement valide par les exploitations techniques acquises) et si elle résiste pour l'essentiel, elle est après bien des débats, adoptée et ainsi de suite; au fond la vérité scientifique est plus pragmatique (elle marche plus ou moins) que philosophique (elle est la seule conforme à la réalité) et c'est ce pragmatisme qui "justement" permet l'accord malgrès les divergences initiales. Ce sont les philisophes qui exagère les oppositions en les absolutisant au nom d'un idéal de la vérité plus métaphysique et spéculatif (et idéaliste) que fécond. Chacun gère son désir de savoir à sa manière mais toute ces stratégies ne se valent pas. Mais le débat philosophique sur l'induction ou le rationalisme constructiviste est un faux débat: toute démarche qui permet de faire progresser les connaissances objectives est bonne à prendre, cela dépend des sciences et des circonstances et que les meilleurs quant aux résultats gagnent. Seules les théories inexpérimantables doivent être écartées, ce qui est le cas de toutes les théories métaphysiques et plus encore religieuses et/ou mystiques


Remarque: "  les croyants ne se situent eux-mêmes plus dans un domaine illusion/ fiction. Ils ont une certitude, c’est leur vérité. "

 C’est bien là où se profile l’illusion dans la confusion entre la vérité, toujours relative à un champs déterminé de l’expérience objective et la certitude d’un fondement que vous appelez point fixe et qui n’était pour Archimède qu’une fiction mathématique commode (hypothèse) pour le calcul et révisable si on pouvait trouver mieux. Mais la prétendue vérité divine ne permet aucun calcul pouvant être soumis à l’épreuve de l’expérience ; comme toute proposition métaphysique, elle est irréfutable au sens de Popper. Ainsi la vérité toujours en train de se faire est incertitude, car elle est ouverte à la critique de la logique et de l’expérience ou alors elle n’est qu’illusion dogmatique ;: le moins qu’on puisse dire c’est que l’ensemble des propositions religieuses ne sont ni très cohérentes entre elles (d’où les multiples interprétations déclarées hérétiques par l’église ex : la double nature du Christ en une personne, la relation entre liberté humaine et toute puissance divine, .la perfection du créateur et l’imperfection du monde via la question de l’origine du mal etc..), ni expérimentalement validables/réfutables ; En cela la position de Descartes reste philosophiquement dogmatique (et donc référencée à une foi religieuse), dès lors que la démonstration de l’existence réelle de Dieu est chez lui, comme Kant l’a montré, après Pascal, sophistique et circulaire ; elle consiste à démonter la vérité de l’existence réelle (hors de l’esprit) de Dieu par la raison et la vérité de la raison par Dieu). Dieu pour Descartes garantit, en dernier ressort la vérité réaliste absolue des principes et des opérations de la raison et partant de la science de Descartes: l’expérience ne peut, chez lui, contredire la raison mathématique conçue par lui comme univoque et non pas axiomatique ; les postulats mathématiques de la géométrie euclidiennes, et de l’algèbre classiques restent pour lui des vérités ontologiques et non pas seulement des matrices formelles plurielles, possibilités qui sont à essayer pour voir si et les quelles marchent (ou pas ; voir géométrie euclidienne ou non-euclidienne) dans telle ou telle classe de phénomènes.

Si vous faites de Dieu (lequel ? de quelle religion ?) une vérité ; elle ne peut être que de l’ordre subjectif, c’est à dire psychologique et éthique : je crois en Dieu parce que je désire y croire :elle est vérité du cœur (espérance ; voir ailleurs ma contribution sur ce point) et non de la raison disait Pascal, du désir et non du (de ce) monde ici-bas réel et encore largement inconnu) J’y crois parce que cela me fait du bien peut seulement dire le croyant; or que cela fasse du bien reste philosophiquement discutable : la drogue ne fait pas plus du bien au drogué que l’illusion en fait en général aux humains et nous savons qu’elles font aussi beaucoup de mal et c’est pourquoi la philosophie rationnelle et critique a été inventée.
Je vous suis très : votre réflexion (pro)longe la mienne et l’enrichit
 

Le sentiment religieux est, entre autre et dans le meilleur des cas, comme le disait Kant, l’expression sensible du besoin de la raison, que je ne sépare pas du désir d’être et de puissance de l’homme comme vivant conscient de lui-même et de sa finitude, de rechercher l’inconditionné ou la condition des conditions, à savoir l’absolu, il est aussi à et par cela même, car l’absolu est par nature inconnaissable, voire ineffable, l’origine de l’illusion majeure de la connaissance, celle de vérité comme certitude absolue.

Or Les sciences ont déconstruit par leurs pratiques et leurs succès technologiques cette certitude pour faire de la vérité un processus de mise en correspondance relative de nos idées en tant qu’hypothèses conjecturelles avec les faits d’expérience en vue de les prévoir pour mieux les maîtriser. L’effet de cette contradiction entre ce désir de puissance illimitée et l’impuissance radicale à le satisfaire, sinon par le délire symbolique religieux plus ou moins ritualisé en magie collectivement orchestrée (et donc par ce fait rassurante) sous l’autorité imaginaire d’un Dieu tout puissant et de ses prêtres, est de faire de l’espoir et du désespoir dépressif un couple aussi indissociable que l’illusion et la désillusion : en cela le désespoir est l’illusion négative retournée en sentiment d’impuissance absolue face au malheur, à l’échec et la mort. Mais les sciences et les techniques, me semble-il, font de l’échec tout autre chose : celle d’un enseignement sur les limites de notre pouvoir actuel sur le monde et nous-même ; elles peuvent, si on les reconnaît dans leur esprit et leur démarche avoir l’effet éthique de nous aider à nous méfier de l’absolu et à relativiser au profit d’une attitude de prudence, face au déception qu’ imposent nécessairement le réel à notre désir de toute puissance. C’est pourquoi il convient, selon moi, de philosopher, à partir d’une attitude rationnelle et critique relativiste analogue à celle des sciences, de telle sorte que la déception ne se transforme pas en désespoir pour mettre en lisière de la vie éthique le désir d’absolu et/ou/en le déplacer(çant) sur un plan esthétique et fictionnel.



 

       Universalité et historicité du savoir
       Kant et la production des connaissances scientifiques
       Mécanisme, finalité et classification des sciences expérimentales
       Vérité, sciences et philosophie
       Vérité, certitude et illusion
       Vérité et vraisemblance
       Vérité, sciences et philosophie



La  liberté
 
 

    La croyance dans la liberté est une fiction tout autant que celle en Dieu; mais elle plus utile dans la société pluraliste qui
    est la nôtre, car elle n'exige pas que l'on soit d'accord sur la Vérité pour vivre ensemble raisonnablement. Les règles de
    vie ensemble ne doivent pas postuler une religion commune que j'ai (et d'autres aussi) de bonne raison de refuser; mais le
    simple usage de la raison et de l'expérience pour réduire le risque de violence (inscrite dans la spontanéité de nos désir)
    physique, politique et morale; c'est ce que l'on appelle dans notre constitution, la laïcité. C'est ce que j'ai voulu dire à
    propos de Vichy qui voulait refonder la politique sur des valeurs religieuses traditionnelles indiscutables et du même coup
    abolir la démocratie pluraliste.



    Je ne dis pas que la liberté comme libre-arbitre est une illusion, mais une valeur-fiction qui a été socialement
    utile (postulat nécessaire à la régulation du désir, à une certaine période de l'évolution de notre société); elle
    devient une illusion lorsqu'on prétend en faire une vérité réaliste. Je pense que plus on connait ce qui nous
    détermine contradictoirement, plus on peut choisir avec une marge de manoeuvre pratique plus grande. La liberté
    est une pratique (pragmatique) de libération du désir d'être et d'agir, toujours déterminé, en vue du bonheur comme
    reconnaisance de soi (voir Spinoza).

    La liberté comme pouvoir indéterminé et donc absolu de choix (libre-arbitre ou causa-sui) n'a pas de réalité
    expérimentale ou métaphysique (pour moi il n'y a pas de réalité métaphysique autre que fantasmatique): ce concept
    définit un devoir-être (une valeur) revendiquée par les individus modernes et le droit comme régulatrice des
    comportements humains. C'est ce que voulait dire Kant, quand il en faisait un simple postulat de la moralité et du
    droit; mais là où je me différencie de lui, c'est que ce postulat ne m'autorise pas à croire à l'existence réelle d'un tel
    pouvoir; ce qui reviendrait à faire de cette fiction une illusion dont les effets peuvent être pernicieux par le refus de
    voir que des comportements violents peuvent être déterminés par des conditions déterminés; aveuglement qui
    entraine à son tour l'impossibilité de reconnaitre que pour réduire cette violence il faut, aussi, changer ces
    conditions.
    Quant à la liberté pratique, elle est pour moi comme pour Spinoza, libre nécessité; c'est à dire pouvoir relatif de
    l'individu d'affirmer son désir d'être propre dans le monde; ce qui a pour conditions de savoir, d'une manière
    rationnelle, ce qui détermine nos "affections" et les conditions pour les transformer en actions; bref connaitre son
    (ses) désir(s) pour transformer nos passions (désirs passifs) en désirs actifs et joyeux. En cela la liberté pratique
    est la capacité d'agir d'une manière autonome en vue de la réalisation de notre désir de puissance (qui n'implique
    aucune domination sur les autres au contraire: le désir de dominer est une passion)
    voir textes sur la liberté sur mon site

    Si l'on  dit que la liberté n'est pas un idée abstraite "absolutisée" mais qu'elle réside dans la singularité humaine,
    toujours déterminée par des déterminations contradictoires, entre lesquelles la réflexion aide à faire des choix vis
    à vis des possibles et au regard de nos expériences antérieures personnelles, nous sommes d'accord; c'est ce que
    j'appelle une pratique de libération. Elle n'est pas une fiction, dès lors qu'elle s'incarne dans des projets d'action;
    elle est de l'ordre de la puissance d'agir créatrice.

    Mais, là où il y a divergence, c'est sur la source de cette puissance: beaucoup la situent dans une transcendance
    "spiritualiste", dont je n'ai aucune idée, ni même aucune expérience sensible et moi dans le désir; j'ai un avantage
    objectif sur eux: le désir d'être heureux - "l'amour de soi" -, chacun peut le vivre (vous y compris) dans l'amour
    des autres,le désir du pouvoir, le paraître, la consommation, voire la morale la plus altruiste (estime de soi et
    dignité), et la fiction de sa transcendance spirituelle en vue du salut post-mortem etc.. Je ne dis pas que ces formes
    sont équivalentes du point du vue du bonheur; mais je dis que ce désir d'être heureux est plus universel que
    n'importe quelle morale; et d'ailleurs aucune morale ne résiste longtemps contre l'amour de soi, indissociable de la
    conscience de soi que d'autres appellent l'âme; si ce n'est en l'incluant, sous une forme ou une autre, à son
    programme.

    Les individus qui n'éprouvent plus de désir et de plaisir et non plus une conscience valorisante d'eux-mêmes, suite
    à un accident neurologique, ne sont plus capables de se décider (choisir) et d'agir (aboulie). Leur liberté d'être
    s'est envolée avec la fiction de leur transcendance, laquelle est éthiquement utile pour faire que les droits de la
    personne dans son (ses) désir(s) propre(s) soient respectés dans nos sociétés dites libérales et individualistes (et
    dans les faits capitalistes et exploiteuse des désirs humains en vue du profit, voir le débat antérieur sur ce thème).
    Mais soyons lucides: ne confondons pas une fiction utile avec une vérité, sinon nous faisons plus de l'idéologie
    édifiante que de la philosophie (critique).



    La liberté en tant qu'autonomie est une valeur; pas l'indépendance. Différence?

    L'indépendance est antisociale car elle ne reconnait aucune règle ni aucune limite à
    l'a réalisation du désir; l'autonomie est la capacité de faire valoir ses fins propres dans des relations de
    réciprocités positives (interdépendance contractuelle) dans un cadre légal universel qui limite et donc garantit
    l'autonomie de chacun. Tous les malenlentendus viennent de cette confusion courante.

    Le liberté n'est réelle (ne peut s'inscrire en des projets d'action efficaces et non-violents) que si le désir est
    raisonné; c'est à dire régulé par le droit libéral et la capacité de chacun de se poser la question suivante: que se
    passerait-il si tous faisaient comme moi, y compris vis-à-vis de moi?;


 La question de la liberté n'est pas une question théorique; mais une question pratique; démonstration:

1) On ne peut démontrer que nous sommes libres au sens du libre-arbitre; c'est à dire que nos décisions seraient telles que nous pourrions les prendre sans être sous l'influence de monde extérieur et surtout de nos désirs et inclinations (deux conditionnement enchevétrés)
2) La liberté n'est donc pas un état ni une essence; mais une croyance pratique et juridique; un postulat régulateur des relations humaines dont la finalité est de réduire le risque de violence générée par la domination et l'humiliation de l'homme par l'homme, d'une part et l'angoisse que suscite notre impuissance pratique d'autre part.
3) La liberté pratique comme action de libération (puissance) met toujours en jeu notre désir d'être heureux est de nous reconnaître positivement dans nos actions vis-à-vis des autres.
4) Elle suppose que nous sachions ce qui détermine et justifie notre désir dans la perspective du succès d'un projet réaliste. (conditions favorables; conditions subjectives et objectives des échecs, définition d'une stratégie d'action cohérente et donc rationnelle, dans ses fins et ses moyens).
5) La mort nous rappelle au réel; c'est à dire à la nécessité de rechercher le bonheur (reconnaissance active de soi qui passe l'estime voire l'amour des autres comme condition de l'amour de soi) ici et maintenant, car "à long terme nous sommes tous morts" (Keynes)
6) C'est la mort de ceux qu'on aiment et non la nôtre qui affecte le plus notre projet de bonheur et donc notre puissance; mais par un revers dialectique cette mort toujours possible des autres engage notre liberté et notre responsabilité consciente d'être et de désirer leur vie heureuse comme condition de notre propre puissance d'être et d'agir


       Spinoza et la liberté
       Nietzsche et le libre-arbitre: Etude d'un texte tiré du "Crépuscule des idoles".
       Liberté et désir
       Autonomie et Liberté
       Liberté et éthique


La  démocratie, le capitalisme et le libéralisme

1) Du point de vue de la démocratie idéale: pouvoir du peuple, par le peuple, pour le peuple, nous ne sommes pas en démocratie; car cela supposerait que le peuple soit uni dans le seul souci de l'intérêt général et que celui-ci soit définissable sans conflit possible; bref que le peuple comme entité solidaire (un pour tous et tous pour un, voir le contrat social de Rousseau) existe préalablement à son instauration formelle et/ou que les individus acceptent de renoncer à leurs intérêts particuliers pour la fonder et se définir préalablement à son fonctionnement même comme peuple uni, dans l'abolition initiales de toutes les différences sociales héritées. Ainsi, paradoxalement, ces conditions ne peuvent être remplies que par le dépassement volontaire unanime des conflits politiques opposant les intérêts collectifs de ceux d'en hauts et de ceux d'en bas (dirigeants/dirigés; riches/pauvres, possédants/prolétaires; employeurs/employés, producteurs/ consommateurs etc..); ce qui de même coup ferait aussi disparaitre la nécessité des luttes politiques pour l'extension de la  démocratie, c'est à dire l'accès du plus grand nombre aux décisions qui les concernent et la mise en oeuvre des conditions favorables à l'égalité des chances pour tous! La démocratie idéale ne pourrait valoir que dans l'égalité sociale intégrale et pour des hommes vertueux conduit par l'amour exclusif du bien commun (s'il peut exister); donc non pour des hommes, dit Rousseau, mais pour des Dieux; autant dire, qu'elle n'est qu'un idéal utopique, dont il faut bien se garder de croire qu'il soit réalisable, sauf à conduire à des échecs sanglants (terreur, totalitarisme);  car tous devraient d'abord être convaincus de sacrifier leur intérêts propres à un supposé intérêt général dont la définition serait totalement indépendante des premiers; or, c'est bien connu, chacun ne peut voir l'intérêt général qu'à travers son expérience personnelle et collective particulière. Ou alors cet intérêt général est tellement abstrait qu'il devient vide de tout contenu légal et politique à propos de tout les sujets qui divisent nécessairement les hommes car ils mettent toujours en eouvre des valeurs personnelles et collectives objectivement opposées (liberté/sécurité; liberté/solidarité; individualisme/holisme; permanence/changement;..respect de la vie/liberté des femmes;  etc..)

2) La démocratie réelle ne peut être qu'un compromis boiteux mettant en jeu des majorités instables aux intérêts différents dont l'alliance se fait et se défait au fil des luttes politiques du moment et des talents pour mobiliser des intérêts et valeurs toujours plus ou moins divergeants: on se rassemble contre, mais non pas pour; et ces rassemblemnts évoluent en fonction de l'évolution des contradictions entre les couches, les intérêts et les valeurs des acteurs/citoyens qui les (sup)portent.

3) Le grand avantage de la démocratie réelle c'est qu'elle maintient le jeu politique ouvert entre ces intérêts et valeurs divergeants  et qu'elle permet aux citoyens de chasser les dirigeants qui ne leur convient plus à tel ou tel moment. Elle assure donc aux individus/citoyens un pouvoir de contrôle et de sanction, indispensable à l'adaptation souple de la politique concrète aux désirs évolutifs du plus grand nombre. Ells permet aussi de corriger les excès de pouvoir ou les tentatives trop extrémistes qui prétendraient résoudre définitivement les contradictions inhérentes à la vie sociale. Sa faiblesse réside dans son incohérence à long terme; car toute majorité peut défaire ce que la majorité antérieure a fait; mais, cette incohérence est elle-même tempérée par le souci des dirigeants élus à ne pas se couper de leurs électeurs, majoritaires ou (momentanément) minoritaires pour être réelus et par le fait que les luttes politiques ne cessent pas après les élections et que les citoyens et les organisations politico-syndicales qui prétendent les représenter peuvent se mobiliser, y compris dans la rue, contre telle ou telle décision qu'ils estiment injuste. Ainsi la démocratie réelle se définit d'abord par les droits de l'homme et du citoyen qui autorisent et garantissent l'expression plurielle des opinions et les droits de les faire valoir, contre les dirigeants du moment, par des actions de sensibilisation efficaces.

3) En celà il est le régime le mieux adapté aux sociétés individualistes et complexes à évolution rapide dont le fondement politique n'est plus transcendant (religieux et/ou traditionnel) aux donc sociétés qui ont fait du contrat libéral une condition de la  légitimité des relations humaines du du changement la condition même de leur existence.

4) Dans un monde pluriel ouvert et interdépendant (informationnel, culturel, technique, économique, militaire, écologique); les sociétés communautaristes traditionnelles plus ou moins théocratique sont sources de violences et d'échecs sanglants. La démocratie est, non pas exportable,  mais importable dans toutes les sociétés qui refusent la solution suicidaire du nationalisme ethnique et de l'épuration  culturelle. Cette adaptation sera longue et sinueuse mais elle est inéluctable pour préserver les chances de la survie de l'espèce humaine dans les conditions de la guerre moderne, potentiellemnt autodestructrice de l'humanité et de l'internationalisation irréversible des conflits engendré par le fait irresistible de la mondialisation.

5) Ainsi le démocratie idéale est une fiction régulatrice utile qu'il ne faut pas transformer en illusion catastrophique en prétendant en faire une réalité ici et maintenant.



On à a raison de situer le problème des communautés sur le terrain de la question du fait et du droit: Les communautés culturelles existent de fait et cette existence doit être reconnue comme un fait de société; mais faut-il pour autant que ce fait
fasse droit?

    Si l'on pense que ce fait est, en tant que tel, porteur de valeurs transcendantes sacrées (intouchables), la réponse est
    oui; mais cela implique comme conditions et conséquences:

    1) Qu'il y a un sacré indiscutable et donc que la philosophie est un danger public, qu'il convient d'interdire et de
    réprimer, dès lors qu'elle revendique le droit de penser par soi-même, lequel implique le droit au libre examen
    critique des idées, y compris communautaires et par conséquent:

    2) Que les individus doivent être interdits de liberté de penser, de choisir d'appartenir ou non à telle ou telle
    communauté et qu'il ne sont pas libres de construire leur identité personnelle comme ils l'entendent ou de participer
    à la construction mouvante de leur prétendue identité collective.

    3) Que la société doit reproduire sa culture sans changement et donc se refermer sur elle-même sur tous les plans, y
    compris scientifique et technologique, car ce domaine est particulièrement ouvert aux idées nouvelles et surtout fait
    de l'esprit critique le fondement même de la recherche du vrai(semblable)et de l'efficacité pragmatique.

    4) Que l'état doit être sinon théocratique, du moins téléologique, c'est à dire conforme dans ses décisions et ses
    structures à la préservation d'un sens sacré; donc il doit être fondé, non sur l'expression vivante et mouvante des
    opinions et le débat argumenté concernant les finalités (valorisées) et les moyens à mettre en oeuvre pour les
    atteindre, mais sur l'autorité transcendante d'individus disposant du monopole du vrai, du juste et du Bien.

    Idéologie communautaire (religion) d'état ou état démocratique, c'est à dire société diversifiée et pluraliste; tel est
    donc le choix. Le mien est libéral et plus conforme à la réalité, non seulement de notre société moderne mais de la
    situation du monde d'aujour'hui, en voie d'ouverture et de globalisation généralisée.

    Faut-il pour autant refuser le fait communautaire? Non mais il convient de le situer dans l'infrapolitique, comme un
    fait qui relève de la vie privée et non de la vie publique, de même que le fait religieux. Ses lois internes ne peuvent
    valoir que si elles sont conformes au droit libéral et démocratique commun qui privilégient les droits des individus
    (droits de l'homme) par rapport au droit collectif (voir le droit des associations et la question des sectes) qui reste
    soumis en dernier ressort au vote individuel, avec la reserve consitutionnelle que les votes aggrégés ne doivent pas
    entrer en contradiction avec ses mêmes droits individuels. C'est aux individus de s'associer dans un cadre
    communautaire particulier qui doit respecter leurs droits individuels fondamentaux;. À cette condition, ces
    communautés seront alors non-plus holistes (communautaristes) mais individualistes et contractuelles; elles auront
    changé de nature; ce que refuse, en général toute les formes de communautarismes politiques. La vie politique ne
    sera plus subordonnée à un idéal communautaire identitaire, mais deviendra autonome, car les compromis ne sont
    possibles qu'au prix du désenchantement pragmatique de l'éthique de responsabilité.


    Je pense en effet que toute prétention à détenir et à administer une quelconque vérité absolue comme fondement de
    la vie sociale est nécessairement intolérante et exclusive: la vérité absolue ne se discute pas et refuse de se
    soumettre pas à la critique rationnelle. Dans ces conditions, l'autre a nécessairement tort; et si cette prétendue
    vérité porte sur le sens de la vie et le bien soi-disant universel, l'autre est le mal absolu dont il faut éradiquer toute
    forme d'expression car elle compromettrait la légitimité identitaire de la communauté "spirituelle" (sauf à la tolérer
    comme exemple du mal pour "actualiser" la nécessaire lutte contre lui au nom du Bien, celui-ci ne se soutenant que
    par cette lutte). Vous semblez avoir la nostalgie des société communautariste (voir par ailleurs le débat sur ce
    thème) fondée sur le sacré (théocraties); c'est là une illusion en un double sens :
    1) elle oublie les guerres de religions interminables qui ont fait la preuve de l'incapacité pour les hommes de
    s'accorder sans sortir de l'absolu et de la logique dogmatique du sacré (ex: esplanade des mosquées contre mont du
    temple)
    2) elle oublie que le monde moderne en voie de globalisation ne peut se permettre sans catastrophe sanglante et
    culturelle de refuser la laïcité pluraliste non pas comme idéologie mais comme règle politique de raison ,
    indispensable pour passer des compromis de pacification.

    La société mondiale moderne et pluraliste et les sociétés particulières ouvertes qui la composent, ne peuvent être
    prendre la forme de la communauté universelle; à moins de soumettre et/ou de convertir, de gré ou de force, tous
    les individus à une même idéologie de la transcendance; conversion dont le succès tiendrait du miracle. Soyez
    communautaire avec vos proches, s'ils l'acceptent; mais ne cherchez pas à constituer une fraternité universelle sur
    le modèle familial ou religieux, vous éviterez alors la déception. Vivre en société, c'est bien vivre avec ceux que
    l'on n'aime pas, selon des règles de justice (réciprocité donnant/donnant); le désir d'amour universel n'est pas une
    condition pour vivre ensemble dans la justice et la paix. Si vous pensez le contraire, alors, bonjour la violence!
    laquelle, dans ses pires formes, procéde toujours de l'amour déçu et de la peur de la différence de l'autre en tant
    qu'elle met en cause l'amour (fierté) de soi.

    Pour être tolérant et respecter, voire apprécier, la puissance créatrice du désir humain dans l'expression de ses
    contradictions, il faut dépasser l'interprétation exclusivement religieuse à laquelle elle se réfère parfois c'est
    logiquement, la seule manière de la saisir en ce qu'elle a d'universel.


    1) Qu'on le veuille ou non, nous vivons dans un monde où chacun doit se déterminer (autonomie) dans ses projets
    personnels: plus de morale traditionnelle rigide, plus de religion hégémonique, plus de grands discours en forme
    de projet politique collectifs, plus de sens de l'histoire; plus de rôles masculin et féminin prédéfinis dans
    l'évidence de la différence invariante naturalisée ; plus de professions et de fonctions sociales se reproduisant sans
    changements notables de générations en générations; plus de hiérarchie inconstestées et incontestables.

    2) Le pluralisme hétérogène, voire contradictoire des valeurs et des références normatives sur fond de liberté
    individuelle revendiquée, oblige chacun, soit à errer entre les croyances à la mode qui, aussitôt, se démodent, soit
    à se laisser aller aux désirs du moment sans autre perpective que le plaisir instantané qu'offre la consommation (ce
    qui est déjà mieux que le sacrifice moral de soi qu'exigeait les morales traditionnelles et religieuses; du point de
    vue de l'autonomie, je préfère les gens au super-marché qu'à la messe). Le risque est de ne plus être capable de
    "se" et de "s'y" reconnaître.

    3) Donc pour qui cherche à penser sa vie par soi-même, pour être plus autonome (moins dépendant des autres et
    des pouvoirs économiques, socio-symboliques et politiques), la nécessité et le plaisir de se poser des questions
    qui portent sur les principes fondamentaux de la pensée et de l'action devient désirable; non d'un désir passif mais
    actif: celui accroitre sa puissance d'être et d'agir (Spinoza) avec les autres et avec soi. Ce plaisir est proprement
    celui de la philosophie et il vaut bien quelques efforts de lectures, non pour exercer un pouvoir sur les autres, mais
    sur soi: la sagesse réside dans le mieux vivre la relation à soi-même; laquelle implique les échanges positifs,
    libéraux et créatifs avec les autres, ce qui est proprement le bonheur, en des voies différentes, que nous
    recherchons tous, avec raison. Quant au rôle des professeurs de philosphie, il dépend de leur capacité à provoquer
    la réflexion en liant les grands courants de la pensée élaborés par les philosophes du passé avec l'expérience des
    problèmes contemporains; encore faut-il que les étudiants soient convaincus que philosopher est la condition de
    leur autonomie personnelle.


    Je n'ai jamais dit que la capitalisme soit sans déséquilibres et contradictions internes (luttes sociales) et sans
    susciter diverses résistances politico-culturelles, voire éthiques; je pense précisément le contraire: le capitalisme
    est, par nature conflictuel et en déséquilibre permanent; mais je dis que, de par les institutions démocratiques dont
    dépend sa légitimité et sa capacité à tenir compte des limites et des effets qu'il produit, il est plus robuste que
    certains, sur ce forum semblent le croire, d'autant qu'il joue sur l'expension de l'idée d'autonomie individuelle qu'il
    entretient et détourne à son profit. Le problème est non d'abattre le capitalisme dont je ne vois pas qui pourrait
    aujourd'hui être porteur d'un tel projet révolutionnaire avec quelques chance de succès et comment faire que ce
    projet révolutionnaire ne soit pas porteur, à son tour, d'un risque de guerre civile dont l'issue serait, à mon sens,
    désastreuse pour la démocratie elle-même. Le problème est de renforcer, à l'échelon mondial, les conditions d'un
    contrôle démocratique et de se battre pour obtenir des modes de régulations plus égalitaires et la mise en place et
    en oeuvre de services "vraiment" publics et gratuits (santé, école, formation permanente etc..); de la réduction du
    temps de travail indispensables au développement des droits de l'homme, de l'autonomie individuelle et de la
    solidarité. Il convient, pour cela, de retourner contre le faux libéralisme capitaliste sauvage, la valeur centrale qu'il
    renvendique à tort à son profit exclusif, un libéralisme politico-culturel démocratique. Le combat pour la justice et
    l'encadrement du capitalisme sera libéral et démocratique ou ne sera pas (c'est pour cela que je suis contre la
    démagogie anti-impots qui sévit aujoiurd'hui dans tous les milieux politiques).
    La position de Costoriadis, aussi théoriquement intéressante sur le plan éthique soit-elle, souffre d'une bonne part
    d'idéalisme politique utopique, car elle croit à tort à la possibilté d'une révolution politico-culturelle radicale
    démocratique anti-capitaliste; qui me semble un monstre logique et contraire à l'expérience historique du XXème
    siècle.
    En politique, disait Lénine, il faut réver, mais sérieusement!


    Les questions démographiques, sauf à adopter le point de vue dogmatique (a-historique) de Malthus, ne doivent pas
    être dissociées de considérations épistémologiques et éthiques simples:

    1) Nous ne savons pas et ne pouvons pas savoir où se trouvent et où se trouverons dans l'avenir, les limites de la
    satisfaction des besoins de notre espèce, quelque soit le nombre des humains sur terre: L'augmentation de la
    productivité, agricole et autre, est imprévisible à moyen terme.

    2) Il est faux de se borner à constater une baisse du taux de fécondité, dans les pays développés, sans prendre en
    considération l'élévation de l'espérance de vie.

    3) il est faux de considérer l'explosion de la démographie dans les pays pauvres, sans mettre cette explosion au
    compte de la misère, assortie aux progrès de la médecine (réduction du taux de le mortalité): cet écart, qu'il faut
    souhaiter temporaire, suffit à expliquer et à indiquer des pistes de recherches de solution: la réduction des inégalité
    économiques et sociales dans le monde et la régulation des échanges permettant un développement durable. À
    moins d'admettre que le SIDA où les guerres internes d'extermination soit une solution plus efficace à défaut d'être
    plus morale.

    4) D'autre part, cette explosion ne pourra pas ne pas produire un mouvement général d'émigration vers les pays
    plus développés en vue d'un rééquilibrage que l'espèce à connu de nombreuse fois au cours de son histoire: ce qui
    veut dire que la solution de notre ami Succube, la coexistence des peuples et des cultures séparés, aussi éthique
    qu'elle paraisse, est contraire au "devoir de l'hospitalité" et à "l'intérêt bien compris" aussi bien des personnes
    vivant dans des pays pauvres que dans les pays riches: que les pauvres viennent chez nous est une nécessité vitale
    pour tous. Le refus des étrangers est une imbécilité non seulement "moralement "inhumaine" mais réellement
    violente, car elle ne peut qu'exacerber les frustations dans un monde où tout circule: l'argent, les armes, les
    marchandises, les informations. Voudrait-on que la grande majorité des individus, les plus pauvres, soient, dans un
    tel contexte, assignés à résidence à vie, alors même que les plus riches font du tourisme et s'installe où cela leur
    chante et leur rapporte? L'immigration zéro et le déni des droits des étrangers en tant qu'hommes, dont la misère
    nous concerne tous ,sont contraires à quelque solidarité désintéressée et/ou non que ce soit (si l'on prétend vouloir
    réduire le risque de la terreur).

    5) Enfin et surtout, il convient ma semble-t-il de bien comprendre que la maîtrise du taux de fécondité est
    entièrement lié à la question du droit des femmes à la contraception, à celle de la maitrise de leur corps et de leur
    sexualité, donc à celle du statut des femmes dans leur rapport aux hommes et à leur place plus ou moins reconnue
    comme égale à  la leur dans la société;  combattre le machisme traditionnel qui reproduit, y compris dans la
    conscience, voire l'inconscient des femmes, leur soumission, voire leur esclavage de fait, est une exigence morale et
    démographique fondamentale qui doit l'emporter sur le prétendu respect de cultures qui la nient radicalement.


    Les fondateurs de libéralisme (Ricardo, Smith) étaient pour la libre circulation des personnes, condition d'un
    marché mondial du travail équilibré profitant à tous; mon point de vue est plus nuancé: les inégalités doivent être
    corrigées par le droit international, car le capitalisme produit des déséquilibres et profite des déséquilibres qu'il
    produit en un monde où les inégalités (de fait, sinon de droit) produites et reproduites (voire aggravées) rendent
    radicalement impossible la fiction "purement théorique" de la concurrence "pure et parfaite". C'est pourquoi il n'y a
    pas de libéralisme économique sans justice sociale, donc sans libéralisme politique. Le libéralisme inégalitaire est
    un monstre logique qui se mord la queue, il est nécessairement générateur de violences latentes et/ou ouvertes
    anti-libérales.

    Ceci dit je n'oppose pas l'hospitalité et l'aide au développement, comme voudraient le faire certains: les hommes
    doivent être libres d'aller là où ils estiment pouvoir survivre, en attendant mieux (droit de l'homme); je suis en ce
    domaine un individualite anti-communautariste; mais j'ajoute immédiatement qu'il faut leur accorder le droit de
    vote là où ils vivent; ce qui aurait l'avantage de leur faire "comprendre" la démocratie pluraliste, où qu'ils aillent
    par la suite. D'autre part, cette pression de l'immigration obligera les pays riches à prendre des mesures en faveur
    du développement auto-centré des pays pauvres; je ne crois efficace , en politique, que la générosité intéressée.

    Vous ne répondez pas sur la question, pour moi essentielle, de l'égalité, en fait et en droit des femmes, y compris
    dans les pays pauvres, comme la condition de la démocratie et de la sortie du sous-développement économique; à
    moins que , comme Succube, vous préfériez poser comme un "impératif éthique sacré" le respect des cultures, y
    compris celles qui "légitiment" l'esclavage des femmes.


    On confond souvent le droit et le fait (les moeurs) quand on critique la société démocratique libérale; mais justement c'est
    cette distinction, voire ce conflit, qui fait que notre société est libérale, au contraire des sociétés traditionnelles qui
    affirment sans exceptions que ce qui est et a été (dans les moeurs et les rapports sociaux ou entre sexes) doit être au nom
    de dieu, de la nature ou de la tradition et souvent des trois!

    Que les problèmes d'oppression et de conditionnement ne soient pas résolus dans nos sociétés et que d'autres
    apparaissent c'est évident (le risque de l'oppression est permanent, car le désir humain présente toujours le désir
    narcissique de possession, dont il faut apprendre à faire bon usage dans la relation au désir d'autrui; ce qui est très
    difficile), mais nous avons les moyens juridiques et politiques de les poser publiquement et de réduire leur
    nuisance dans un sens plus libéral; c'est pourquoi la liberté est toujours un combat, une pratique de libération et non pas un
    état dans lequel il n'y aurait plus rien à revendiquer; mais encore faut-il que ce combat politique et ce débat public soit
    admis comme politiquement, juridiquement et éthiquement légitime! Ce qui n'est jamais le cas dans une société qui
    reconnait l'autorité exclusive de la tradition pour résoudre les conflits. C'est cette différence qui fait la différence.



    Ce débat central est le suivant: faut-il dans une société pluraliste et idéologiquement divisée une éthique positive
    commune dominante (définition positive du bien qui transcende les intérêts et valeurs individuels et collectifs
    particuliers) ou une régulation libérale négociée des relations de désirs et d'intérêts?

    il me semble qu'il serait irrationnel, voire dangereux pour la paix civile, de prétendre étendre à tous les valeurs,
    même les plus généreuses (altruistes-sacrificielles), alors que celles-ci sont pas nature liées à des engagements
    personnels qui ne peuvent être vécus par tous dans toutes les situations et jeux sociaux. Il convient à mon sens de
    ne pas confondre la sphère de la vie privée, même si elle y interfère, avec celle de la vie publique; l'éthique qui
    met en jeu des relations inter-personnelles privilégiées fortes "chaleureuses"(amitié, amour etc..) et celle du droit
    qui concerne la vie publique "froide" (vie économique et sociale) et politique (vie civique). La question du
    politique et de la vie publique concerne la régulation des relations avec des gens que nous n'aimons pas mais avec
    qui nous sommes tenus de nouer des rapports d'intérêts mutuels, voire de solidarité minimale pour que ces rapports
    d'échange et de coopération intéressés soient possibles. Une société amicale, fondée sur le don et non le
    commerce, n'est possible, Aristote le disait déjà, que restreinte à un nombre d'individus qui vivent ensemble, se
    connaissent et échangent quotidiennement. Bref, la société moderne n'est ni une famille, ni une tribu, ni une
    communauté de foi, bref pas une société relativement fermée et holiste. On ne peut généraliser les valeurs de
    celles-ci, plus ou moins fusionnelles, à l'autre (individualiste) sans prendre le risque du totalitarisme
    communautariste.

    J'ajoute qu'une société d'amis est une société qui fonctionne sur le régime de la cooptation exclusive! Et tous les
    exemples d'altruisme donnés par Patrick sont des exemples de solidarité exclusive et
    sélective(mère/enfants,soldats du même camps unis contre l'adversaire etc...) qui impliquent une contrainte
    d'identitification forte des individus entre eux comme condition de la conscience positive de soi; c'est pourquoi du
    reste, cet altruisme est toujours "aussi" un égoisme collectif. Pensez-vous qu'il s'agisse là d'un idéal rationnel,
    souhaitable et possible, dans les sociétés modernes? Voulez-vous revenir aux sociétés monolythiques et
    non-libérales closes (ethno-religieuses) d'autrefois? Ou croyez-vous au miracle d'une société fraternelle sans
    frontières, c'est à dire à l'amour universel triomphant de l'homme pour l'homme et cela sans la croyance commune
    dans la grace d'un Dieu unique et d'une religion universelle? Il n'y a de miracle possible que de Dieu et dans un
    autre monde, et, franchement, cela n'est pas mon affaire!

    Mon propos dans "gouvernance et démocratie libérale" était de philosophie politique et non de philosophie
    éthique de l'amour, de la sexualité ou de l'amitié qui relèvent d'autres régulations, d'autres démarches stratégiques,
    et n'ont pas les mêmes enjeux: ne mélangeons pas tous les jeux relationnels dans un même chaudron et nous serons
    plus lucides, moins "réveurs" et plus efficaces! Pour agir avec quelque chance de succès, il faut comprendre que la
    compassion charitable sur le plan personnel est nécessaire mais pas suffisante pour rendre fort celui qui est faible,
    mais que la justice, sur la plan socio-politique, c'est mieux, car suffisant pour que chacun puisse revendiquer son
    autonomie dans la mise en oeuvre de son droit au bonheur!


Le capitalisme n'est pas plus naturel et pas moins idéologique que n'importe quel autre jeu social; sauf à dire qu'il "naturalise" l'exploitation du travail humain en la présentant comme l'effet des intérêts rationnels (donc mutuels) des différents acteurs de la relation capital/travail. Cette présentation idéologique "naturaliste" permet au nom de la liberté individuelle, en droit égalitaire, d'occulter les inégalités réelles et les effets de domination que produit la capitalisme et dont il se nourrit pour accroître le profit capitaliste.

Ceci dit il se distingue de tout autre système économique et social dans la mesure où son fonctionnement ne suppose aucune morale transcendante a priori, sinon la reconnaissance du primat de l'intérêt individuel et des droits égaux qui fonde la relation de contrat et par conséquent n'impose rien aux individus dans leur relations mutuelles que le respect des termes des contrats. Cette imposition produit comme conséquence l'idée de responsabilité personnelle aux dépens de celle de responsabilité collective et de culpabilité à l'égard de l'égoïsme spontané; l'idée de péché originel n'est pas nécessaire; elle est même nuisible à la seule valeur d'honnêteté que reconnaît que le capitalisme comme fonctionnelle dans un cadre soumis à la concurrence favorable aux consommateurs, toute position sociale confondue. De plus il autorise le négociation entre les acteurs dont les intérêts s'affrontent ainsi que l'expression de valeurs différentes voire opposées, y compris dans le domaine esthétique: toute forme d'expression artistique peut devenir, en droit, un objet de commerce rentable, dès lors qu'elle rencontre une demande sur la libre marché. Cette "flexibilité" fonctionnelle ne supprime pas les inégalités réelles mais donne aux acteurs plus ou moins organisés la possibilité de lutter contre elles au nom de la liberté de tous dans un cadre démocratique qui rend possible (et non pas nécessaire) l'autorégulation politique du conflit entre l'égalité formelle et les inégalités réelles qui soutend l'évolution du capitalisme, depuis son origine. De mystification, les principes de la liberté individuelle peuvent devenir et deviennent en permanence des revendications contre les effets de domination et d'exploitation de capitalisme. C'est cette contradiction assumée dans un cadre qui autorise son expression régulatrice sous le contrôle des acteurs sociaux qui fait du capitalisme et de la démocratie politique les pires des systèmes, à l'exception de tous les autres. Sa souplesse adaptative est au coeur de sa rationalité pragmatique, à l'encontre de toutes les idéologies qui prétendraient supprimer les conflits pour mieux en exclure les acteurs en leur imposant une rationalité supérieure prédéfinie à la mode platonicienne ou religieuse (philosophe ou prètre roi).

Cette conflictualité explicite du capitalisme et son individualisme théorique a pour conséquence politique que la lutte des classes n'est pas supprimée et/ou dépassée mais qu'elle reste ouverte au jeu politique et qu'elle ne peut jamais s'enfermer, à long terme, dans des affrontements inter-communautaires qui remettraient en cause le caractère libéral des relations contractuelles. Le capitalisme n'est viable qu'à la condition d'être travaillé par les luttes sociales et ce travail ne peut porter des fruits que si ceux qui y participent, ne prétendent pas vouloir autre chose que leur part du gateau. Toute option révolutionnaire est donc stérile, voire purement catastrophique pour les droits et les libertés et par sa violence impuissante à inventer un système plus efficace, auto-destructrice. La lutte des classes (qu'il ne faut pas confondre avec des castes) entre le capital et le travail est inhérente au capitalisme et une des conditions de sa vitalité sociale.

L'histoire du post-capitalisme n'est pas à faire, mais le capitalisme n'est pas le fin de l'histoire, car il est historique par définition: il ne survit qu'en se tranformant, qu'en se réformant dans le sens de l'accroissement des droits et des libertés et de la réduction des inégalités et le recul apparent actuel exige seulement un surcroit de luttes sociales dans un cadre mondial pour rendre possible et nécessaire de nouvelles régulations


La question des règles d'un jeu social (ou jeu de société) est celle:

1) de leur "justesse" qui rend possible la poursuite du jeu par tout partenaire dans l'espoir de gagner sans faire usage de violence ou d'exclusion. Une menace et des sanctions légales de la part d'une autorité d'arbitrage pour faire respecter les règles du jeu et faire qu'il puisse se poursuivre le plus longtemps possible sont indispensables.
2) de leur "justice" qui vise à ce qu'aucun partenaire ne domine a priori les autres de telle sorte qu'il serait nécessairement gagnant et ceux-ci indéfiniment perdants

Autant dire qu'une entreprise capitaliste est incapable par elle-même d'être juste ni au premier sens, ni au second, car elle vise son profit et que celui-ci n'est jamais aussi bien garanti que une situation de monomole et la domination sur son marché; y compris du travail; sauf à être soumis à des règles du jeu social de nature politique qui le contraigne à se soumettre à des droits sociaux visant à rétablir une plus grande égalité des chances et des positions dans les négociations et les échanges.

Le capitalisme n'est dynamique, légitime et viable qu'encastré dans le politique par la démocratie.


Droit de vote et démocratie

Le refus du vote, comme procédure de décision démocratique,  comme nécessairement biaisé dès lors que les citoyens ne sont pas compétents pour trancher des questions politiques et éthiques complexes et qu'ils met toujours en jeu des positions idéologiques contradictoires sans consensus possible au profit d'un tribunal des sages me semble discutable car

1) Il suppose la constitution d’un tribunal des sages dont l’autorité serait admise indiscutablement pour décider des termes du débat ; ce qui est impossible dès lors que l'idée de  « Bien » commun » ne se situe pas au dessus des luttes d’intérêts politiques sociaux et économiques or ces conflits sont générés non par le vote partisan lui-même; mais par les luttes sociales dans lesquelles s’affrontent plusieurs conceptions et/ou interprétation de la justice et des oppositions de valeurs et/ou de leurs articulations (ex : liberté, solidarité, égalité etc.) que par ailleurs vous admettez au nom de la liberté individuelle de juger par soi-même.

2) Il suppose que les droits de l’homme suffisent, après débat, à faire une politique cohérente, comme si leur usage et application dans des conditions complexes ou le choix du moindre mal est toujours problématique n’était qu’un problème technique, alors que, l'expérience le montre tous les jours, leur application dans des conditions concrètes de régulation des conflits met toujours en jeu des interprétations, des valeurs et des intérêts personnels et collectifs contradictoires.

4) Ce faisant cette vision technocratique de la décision politique cherche à vider la politique de son caractère précisément politique qui consiste à  prendre des décisions qui engagent tous les citoyens  alors qu’elle ne peuvent nécessairement pas faire l’unanimité entre tous.

Reste, dans la prise de décision à savoir comment trancher entre des positions contradictoires justifiables en droit:  si c’est le tirage au sort alors personne ne peut s’y reconnaître et la légitimité de la prise de décision entre projets et individus concurrents est sans fondement politique lequel suppose en l’absence de fondement transcendant  une adhésion, même critique, non seulement individuelle mais aussi collective suffisante, de telle sorte que la minorité puisse se soumettre, tout en la critiquant, à la loi majoritaire, dans l’espoir de devenir à son tour majoritaire la prochaine fois. Seul le vote, dans les conditions ou l’unanimité est impossible, peut faire croire à cette adhésion collective ; les citoyens par leur droit de vote (qui fait aussi, à mon sens, partie des droits fondamentaux de l’homme politique) en effet, peuvent sanctionner les mauvaise politique et les mauvais responsables ; c’est là à mon sens la définition non-idéale mais bien réelle de la démocratie ; donner aux dirigés le pouvoir de chasser les dirigeants quand la majorité es dirigés ne les reconnaît plus comme représentatif de la conception ponctuellement dominante de la régulation des conflits d’intérêts en vue de réduire le risque de violence et d’accroître les conditions de la coopération nécessaire entre tous pour produire et échanger des biens et des services.
 

Ainsi il ne faut pas confondre la société avec une communauté d’individus d’accord sur l’instant entre eux sur les finalités et les valeurs fondatrices du bien-vivre ensemble (communauté ponctuelle d’amis) ; c’est sur la base de cette confusion que certains  refusent la société réelle, pluraliste, divisée ; mais relativement pérenne, existante, au nom d’une société idéale qui se déferait instantanément dès lors que chacun pourrait décider qu’il n’est plus d’accord avec les autres sur l’idée du bien commun et donc de n’en faire plus parti. Souvent la recherche d'une démocratie idéale oscille entre un individualisme asocial, sinon insociable, et un holisme idéal qui s’épuiserait à chaque instant. C’est pourquoicette vision à tendance à refuser la loi démocratique qui veut que la minorité se soumette à la loi de la majorité à la condition que celle-là puisse manifester son désaccord en vue de s’organiser dans le but subjectif de devenir majoritaire la prochaine fois, qui me semble définir la seule attitude raisonnable pour qui ne reconnaît aucune autorité transcendante (surhumaine) et qui cherche un moyen efficace pour garantir un ordre public stable et moins violent ; il ne suffit pas, en effet, de se vouloir non-violent par calcul de raison si les autres ne font pas le même calcul; contre la violence des hommes déraisonnables aveuglés par leur passions haineuse et dominatrice, il n’est bien souvent pas d’autre moyen pour défendre sa vie et sa liberté que la violence. Comme disait Spinoza, à moins de supposer tous les hommes également raisonnables, donc philosophes, pour réduire la violence des passions négatives et destructrices (voire auto-destructrices) il faut se donner des institutions d’autorité et entre toutes les formes possibles de régulation politique (donc collective) pacifiantes la démocratie semble la moins illégitime, car la plus conforme au désir d’autonomie des individus normée par la loi commune révisable afin de réduire le risque de violence réciproque et d’accroître les chances d’une coopération durable entre des individus qui n’ont aucun motif à être spontanément et durablement d’accord entre eux sur leurs objectifs personnels et le définition de leurs intérêts mutuels. La politique consiste à gérer les conflits générés par la nécessaire coopération sociale pour les rendre moins violents non à les refuser par principe, car un tel refus reviendrait à rendre toute sociabilité sur terre, sinon au ciel, impossible. La communauté d’individus perpétuellement heureux de vivre les uns par les autres est proprement inhumaine car réellement liberticide et un tel rêve ne peut basculer que dans la déception et l’extrême violence qu’elle génère nécessairement. Votre position me semble au fond religieuse en cela qu’elle ressuscite l’idée chrétienne utopique d’un amour universel et salvateur dans la liberté comme condition du bien-vivre ensemble.

S’entendre sur les droits de l’homme dans l’abstraction d’une définition purement théorique ne suffit pas à garantir un accord sur les fins politiques dès lors que leur application pratique met en jeu des intérêts et des interprétations contradictoires de la justice et des équilibres problématiques dont vous parlez entre des exigences (liberté/égalité) qui se présentent, que vous le vouliez ou, comme contradictoires, car chacun voit midi sa porte dès lors qu’une société reste toujours structurée par des rapports de pouvoir réellement inégaux par delà les droits théoriquement égaux et que ces rapports inégaux génèrent nécessairement des perceptions pour le moins conflictuelles des valeurs formelles et de leur articulation qui concernent les mesures à prendre pour les mettre pratiquement en oeuvre et pour les faire appliquer et respecter (ex : le droit de licenciement, la fiscalité; les 35h, le SMIG etc.). La politique reste tributaire de ce que on peut appeler, après Marx, « la lutte des classes ».

Si l'on  propose un société idéale sans lutte de classe dans laquelle aucune inégalité ni de droit, ni de fait, ne soit possible, alors oui, la position qui rechercherait l'unanimité pour prendre les décisions a sa cohérence ; mais je doute qu’une telle société mette la liberté individuelle au fondement des droits de l’homme, car elle devra tout contrôler et tout administrer , si tant est que cela soit possible, au nom de l’égalité, à commencer par l’économie mais aussi nécessairement l’idéologie car sans valeurs communes et d’objectifs consensuels, comme vous le dites, il n’y aurait pas, en retour, de société égalitaire possible. La démocratie ne signifie rien d’autre que ceci : au nom même des droits formels de l’homme on prend acte de la division des sociétés entre intérêts contradictoires et interprétations divergentes de la justice pour confier à l’élection le soin de trancher provisoirement et de placer le curseur entre liberté et égalité selon un équilibre toujours précaire y compris sur le plan des valeurs., lequel dépend toujours des luttes sociales en cours. La liberté est indissociable du conflit entre groupes et individus et le vote, comme la négociation, sont nécessaires à leur régulation moins violentes : c’est ce qu’on appelle le choix démocratique contre toute les formes de totalitarisme holiste ou d’individualisme anarchisant qui se nourrissent, comme l’histoire nous le montre, l’un l’autre.

Je serais personnellement d’accord avec un certain nombre de mesures à prendre en faveur de la réduction des inégalités et en matière justice sociale (voire sur mon site), à condition de préciser que je m’interdirais de penser qu’elles devraient être nécessairement partagées par tous et que ceux qui en jugeraient contrairement à « ma » logique politique et les présupposés axiomatiques éthiques (axiome de choix) qu’elle met en oeuvre, auraient nécessairement tort et devraient donc être exclus ou s’exclure d’eux-mêmes de la société. Je ne pense pas que tous les hommes puissent collaborer sans s’affronter peu ou prou sur le sens et le effets de cette collaboration pour les uns et les autres dans le cadre de rapports de forces qu’il est vain, illusoire et donc politiquement dangereux de nier. C’est l’insociable sociabilité (Kant) des hommes qu’il convient de prendre en compte pour penser un régime de pouvoir qui autorise la compétition nécessaire à toute dynamique sociale (sinon nous aurions affaire à une communauté immobile de bergers d’Arcadie disait Kant dans laquelle les individus seraient condamnés reproduire les comportements ancestraux et à ne rien inventer ni pouvoir penser ni agir d’une manière autonome, c’est à dire en humains) et la justice libérale (sécurité collective, droit individuels et égalité des chances) pour tous. Quand un désaccord entre des intérêts et des positions apparaît et que ce désaccord renvoie à des interprétations différentes de l’idée de justice (ex : à chacun selon son mérite et/ou à chacun selon son travail et cela suppose déjà une appréciation et des critères indéfiniment discutables et/ou chacun selon ses besoins (Marx), je ne vois pas comment trancher le débat auquel vous êtes si attaché sans passer au vote ; sauf à laisser l’arbitraire prendre la décision en lieu et place des personnes (citoyens) concernées. Je persiste : refuser le risque d’une prise de décision entre des positions contradictoires et croire qu’un simple raisonnement théorique mettra fin au conflit des interprétations en situation réelle, c’est plus ou moins escamoter la politique au profit d’une démarche technocratique qui prétendrait qu’il n’y a qu’une solution raisonnable possible à un problème social et qui du même coup exclurait au final la possibilité d’un désaccord persistant et ne trouverait comme mesure de pacification que l’exclusion des les empêcheurs de penser en rond, jugés définitivement irrationnels...Conséquence qui me paraît pour le moins peu cohérente avec votre position individualiste radicale : chacun aurait le droit de penser autrement à condition que ce soit comme tout le monde !

Les contradictions sont partout, dans l’évolution des espèces vivantes, dans la société comme en chacun de nous : vouloir les supprimer c’est vouloir la mort et non la vie. car celle-ci est un conflit permanent entre pulsion de vie (association) et pulsion de mort (dissociation) disait Freud. En ce qui concerne
l’existence humaine vouloir une philosophie qui résoudrait les contradictions qui l’affecte nécessairement serait mortifère pour l’individu comme pour la cité : la sagesse consiste à faire le meilleurs usage possible (régulé, moins auto-destructeur, et plus créateur) de ces contradictions. Les philosophies et surtout les religions qui ont proposé le fin des contradictions vitales ont toujours promis que la vraie vie sans divisions, ni déchirements, en un mot fusionnelle, ne pouvait être que post-mortem ; en cela elles étaient plus lucides, sinon plus réalistes que votre utopie « terrestre » d’une société définitivement réconciliée sous l’autorité indiscutable d’une raison commune qui se déclinerait en droits de l’homme unanimement interprétés dans la mise au silence et au pas, l’auto-répression ultime et consentie, des intérêts et des passions en conflit.

Le paradis fusionnel n’est pas de ce monde et si tant est qu’il existe ailleurs, il serait mortellement vide et ennuyeux, sans désir propre, ni autonomie possible. Sans rien à y faire. En tout cas très peu pour moi...


Il n'y a pas de bien ou du justice en soi et encore moins de vérité en politique car tout est affaire de choix, de compromis et de dosage entre visions différentes de la justice plus ou moins déterminées par des valeurs politiques et des intérêts sociaux divergents. Les gouvernants, en démocratie et ceux qui prétendent gouverner à leur place doivent orienter, canaliser, amagalmer par des procédés rhétoriques efficaces expoitant des peurs ou des espérances confuses, les opinions plurielles pour faire des majorités d'opinion toujours instables et gagner sur leurs concurrents.

Toute tentative d'imposer une vérité en politique est dominatrice et ne peut fonctionner que par la terreur et/ou la démagogie; la démocratie ne fait pas la volonté générale qui ne peut être que fictive et, si on la croit vraie, illusoire, mais elle tempère par les libertés publiques, par la possibilité de l'alternance et ainsi que par l'autonomie relative des pouvoirs, le risque de la tyrannie, y compris majoritaire. Aristote a raison contre Platon: la politique ne peut viser que la convenable et non le vrai: elle est de l'ordre de la prudence et de l'ajustement de visées en conflit disparates et hétérogènes. Toute politique libérale est pluraliste dans ses sources et ses buts.

Sexualité et religion chrétienne

    Le péché (originel) est une invention des théologiens (voir Nietzsche) pour assurer le pouvoir de l'église sur la conscience des croyants, tout en leur promettant, en récompense (visée très égoiste) de leur obéissance , le paradis; le bonne question est de savoir quel bon usage faut-il faire de l'amour de soi et du désir d'être heureux dans la relation au désir d'autrui, sans prétendre à une, sainteté indifférente au désir de soi et au désir des autres: qui veut faire l'ange fait la bête! Le puritanisme (l'amour sans le sexe), engendre la pornographie (le sexe sans amour); le refus de son propre désir d'être heureux engendre le mépris de ce même désir chez les autres et, puisque ce désir demeure, envers et contre tout, le mépris des hommes en général et de la cité terrestre; la seule qui devrait nous préoccuper, si l'on aime les hommes, non tels que l'on voudrait qu'ils soient, mais tels qu'ils sont.

Or, depuis que l'art et la poésie (même les les plus "archaïques") existent, les représentations de la sexualité et des organes sexuels s'affirment, directement ou symboliquement, comme des éléments privilégiés du désir humain; et plus prêt de nous, dans la République de Platon, celui-ci fait du désir érotique l'aiguillon de tous les désirs (mauvais infini qui peut être converti en bon infini), d'autre part nous savons que la sexualité humaine s'est très tôt, sinon toujours, affranchie du besoin de se reproduire (comme chez les singes Bonobos) pour prendre d'autres significations relationnelles et sociales; ce que savaient d'ailleurs pertinament les anciens grecs et les anciens chinois. Kant, qui ne parle pas de l'Art, si ce n'est incidemment de l'art classique, mais du sentiment désintéressé devant la Beauté de la nature, (et encore il ne parle pas des desseins bucolo-érotiques de Rembrandt) comme propédeutique de la moralité, et Diderot et Freud qui affirment l'un et l'autre que la sublimation (que Kant distingue du Beau), loin de dépasser l'érotisme et le désir sensuel (sexuel) élargit l'érotisme à la représentation esthétique bouleversante de l'homme par l'homme et à l'expérience humaine en général, je choisis celle de Diderot (et de Fragonnard) elle est plus excitante et, de plus, confirmée par la condamnation universelle de l'art par les bien-pensants pour pornographie et immoralité (Diderot, Sade, Beaudelaire, Flaubert Courbet, Picasso, Bataille etc..). L'art et la morale n'ont jamais fait bon ménage, sauf dans les images pieuses et les oeuvres nazis et staliniennes, mais il ne s'agissait pas d'oeuvres d'art, justement. Prenons l'exemple du Saint-Jean Batiste de Leonardo da Vinci exposé au Louvre? Il découvre sa spendide épaule ronde, douce et caressante en indiquant la voie du ciel de son index: une invite sans ambiguïté à le suivre au 7ème ciel!
    Autre preuve : toutes les religions les plus anciennes ont toujours eu le souci primordial d'établir des interdits sexuels
    précis et rigoureux (ne serait-ce que l'interdit de l'inceste qui, s'il n'était pas désirable, n'aurait pas besoin d'être interdit!).
    Quant à la misère qui déshumanise, elle ne peut valoir comme significative du désir humain face à la peur de la mort, qui
    du reste est un formidable excitant sexuel (le sexe et la mort ont toujours fait symboliquement très bon bon ménage). L'art
    religieux, l'expérience mystique sont très profondément sexuels (de Sainte thérèse d'Avila, à Sainte-thérèse de Lisieux) et
    c'est trop facile à démontrer et c'est bien ce qui a toujours effrayé les églises qui n'ont eu qu'une hâte, c'est d'édulcorer
    cette expérience (ex: Saint François d'Assise) pour en retourner le sens en un sens édifiant à des fins de pouvoir.

Cependant, la sexualité (surtout de la femme) est, dans l'interprétation dominante du christianisme historique comme religion instituée, depuis Adam et Eve de l'ordre du péché (originel). Et cela a été affirmé, depuis Saint-Paul, qui n'était pas spécialement féministe et en faveur du droit au plaisir sexuel (voir ses diatribes phobiques contre la chair, assimilée à la puissance de la mort) et pendant des siècles a été interprété comme cela très officiellement par les églises dites chrétiennes; que l'on puisse proposer d'autres interprétations des mythes chrétiens; c'est excact, mais le problème c'est qu'elles n'ont eu, pour l'instant, aucun effet historique en faveur du droit au plaisir, de la contraception, voire de l'avortement, essentiels pour qui milite pour la libération des femmes.
Ainsi le droit à l'avortement libre et gratuit est ( a été) un moindre mal en vue d'un plus grand bien: la libération des femmes (et donc des hommes); voyez comment j'interprète Leibnitz à ma façon: je passe de Dieu à l'homme! Mais, comme je pense que dieu est une projection de l'homme, je n'ai aucun scrupule à procéder ainsi. Le moyen du bien, en matière d'autonomie sexuelle, c'est la contraception (toujours condamnée par l'église catholique au profit de la méthode dite naturelle, la méthode Ogino et de l'abstinence); mais vous le savez aussi bien que moi: on n'a pas souvent le choix ici-bas entre le bien et le mal mais quasi-toujours entre deux maux et s'il est une obligation (ardente et raisonnable), c'est celle de choisir le moindre. Refuser de faire ce choix c'est être irresponsable, comme l'est le pape en Afrique, lorsqu'il rentre en croisade contre le préservatif au profit de l'abstinence, alors que près de 20% de la population, dans certaines régions, est déjà séro-positive, cela au nom d'une morale sexuelle posée comme sacro-sainte. Examinons ce cas et nous
comprendons (je l'espère) que l'éthique sexuelle de la responsabilité doit impérativement chasser la morale sexuelle fondée sur des croyances a priori qui sont dangereuses, précisément, par leur caractère a priorique et sacré, c'est à dire, intouchable et indiscutable. Si la foi peut être, pour ceux qui l'ont, une ouverture et une interrogation personnelle sur le sens de leur responsabilité éthique dans le monde,  la foi transformée en idéologie par une religion fondée sur le l'autorité de croyances communes sacralisées et stéréotypées et d'un appareil hiérarchique de pouvoir absolu, est toujours nuisible à l'exercice du sens des responsabilité. L'attitude officielle de l'église catholique, sur cette question du SIDA, est éthiquement criminelle et doit être dénoncée comme telle, ainsi que le principe fondateur qui rend ce type crime possible, le sacré institutionalisé: si l'on  m'accorde ce point, alors je suis prêt à admettre que la foi personnelle que je n'ai jamais, en tant que telle, critiquée, peut être respectable; à condition qu'on ne la confonde pas et qu'elle ne se confonde pas elle-même avec la religion, comme machine de pouvoir sur les consciences. Est-ce trop demander?


    Tous les mythes peuvent être retournés: c'est même leur caractère ambivalent qui fait leur force et leur prégnance
    sur l'imaginaire; mais ce qui compte au bout du compte, c'est l'usage qui en a été fait par les machines de pouvoirs
    qui se sont arrogé le monopole de leur interprétation orthodoxe: les églises et les prètres. Il convient surtout de ne
    pas confondre le message du Christ, qui n'a été le fondateur d'aucune église, avec le christianisme. Le christ,
    contrairement à ce qu'affirme Monseigneur Lustiger, est un mythe infiniment disponible. Quand on a compris cela,
    on devient philosophe, c'est à dire "libre penseur", libre de toute orthodoxie et de toute obédience, comme Spinoza.



    Le sens du chef-d'oeuvre de Courbet est très clair: entre l'origine du monde attribuée à un Dieu asexué et celle du
    sexe voluptueux de la femme, légèrement entrouvert sous la végétation du pubis au centre du corps en attente et/ou
    déjà comblé, le ventre, les cuisses et les seins, délicatement capitonnés, à la peau lisse et veloutée, l'art choisi
    toujours la seconde; et les moralistes religieux de tous poils l'ont toujours compris ainsi. Croyez-vous vraiment
    que l'érotisme soit absent dans l'art sacré? S'il l'était, il n'exercerait aucune fascination et je le répète ne serait que
    des images pieuses, des idoles sans vie. Ce que les "iconoclates" de toutes obédiences ont toujours dénoncé.

     Freud, il  dit lui-même: il doit tout aux artistes! La psychanalyse comme théorie est une chose et comme
    pratique une autre; que certains, grace à elle s'attribuent des pouvoirs quasi-religieux, (ex: Lacan) et instruisent un
    culte tout aussi absurde et liberticide (du point de vue de Freud lui-même) que les cultes religieux, j'en suis
    entièrement d'accord; mais, s'il vous plait, ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain...


    L'ouverture à l'autre est bien la condition de la (re)construction toujours ouverte de soi; mais cela implique que l'on
    ne veuille pas se fondre, s'oublier dans l'autre mais se mesurer par le dialogue peu ou prou conflictuel; car le
    dépassement du conflit est l'expression d'un désir pervers à ne plus désirer et à s'enfoncer dans la mort (le
    non-désir), dans l'autre: mais, par un retournement bien connu, la fusion est toujours l'expression d'un désir mortel
    de possession: si l'autre est moi, je le domine enfin totalement! Le sympathie dont vous parler n'est pas
    dépassement de l'altérité mais intériorisation de l'altérité: chacun peut se vivre "comme" un autre et comprendre
    tous les autres, ce qui ne veut pas dire se confondre en eux, à moins de refuser de se comprendre soi-même comme
    "toujours en train de se faire et de se refaire": d'où l'exigence cartésienne du doute volontaire comme condition de
    l'autonomie..Que deviendait celle-ci dans le recherche du dépassement de soi dans l'autre? Le liberté se pose dans
    le conflit; et son dépassement n'est pas dans son abolition mais dans la prise de conscience auto(dé)centrée de soi :
    la reconnaissance(voir Hegel). J'appelle religieuse toute tentative de recentrement fusionnel de soi dans les autres
    sous l'autorité sacrée d'un signe/symbole transcendant divin; j'appelle philosophique toute ouverture dialectique et
    lucide du sujet hors et en lui-même. C'est pour quoi la sexualité est pour moi si riche d'enseignement: elle ne peut
    être fusionelle, elle ne peut être que dialogue sur du un fond pré-conceptuel pulsionnel et affectif acquis, sauf à se
    faire impuissant. Mais ce fond, pour être "exploité" en vue de l'heureuse rencontre de l'autre comme autre en soi (et
    non autre soi-même) peut et doit être représenté, dans l'art (qui est la meilleure éducation sexuelle qui soit) et la
    philosophie, comme effort de conceptualisation nécessaire à toute communication dialoguée (du reste l'art vaut
    d'abord comme provocation de la pensée philosophique, sino nous avons affaire à des idoles ou images pieuses).



 Ce à quoi je ne peux pas croire, car cela ne me paraît ni réellement possible ni idéalement souhaitable, c'est au don sans réciprocité c'est à dire sans échange de don possible car un tel don nous renverrai à la solitude absolu d'un sujet qui donnerait sans désirer rencontrer le regard de l'autre; sinon son propre regard sans autre objet que lui-même. Comme quoi le moralisme religieux et/ou métaphysique du don absolu me renvoie nécessairement au narcissisme absolu d'une vie qui se désire elle-même sans la médiation du désir de l'autre, sinon d'un Dieu à notre image: l'amour absolu est alors absolument solitaire, comme le plaisir du même nom. Cette réciprocité, en effet, est qualitative et non quantifiable ce en quoi elle est un calcul incalculable...elle spécule sur le long terme, c'est à dire sur un terme indéfini ce en quoi l'amour réciproque n'est pas un commerce et ne peut, en effet, être confondu avec la prostitution; non parce qu'il ne serait pas réciproque mais parce que sa réciprocité toujours désirée ne peut s'inscrire dans le logique explicite de paiement à l'acte. Mais, comme disait Keynes, à long terme nous sommes tous morts, c'est pourquoi, en amour, la dette d'amour est toujours barrée et ressuscitée par la possible mort de l'autre...La seule qui puisse affecter notre désir d'être.



L'art et modernité.
 

Platon, qui s'y connaissait, savait pertinemment que, en l'absence d'une idée transcendante du Bien et du Beau en soi, ce qui est le cas de notre culture aujourd'hui, « l'hubris » humain est infini et que ce désir insatiable est de nature érotique et guerrière. Deux motivations dominent en effet le psychisme humain en tous les temps et sous toutes les latitudes, celle, autoérotique, du pouvoir, et celle homo ou hétéro érotique du désir sexuel qui génère les banquets orgiaques, et lorsque les deux s'en mêlent nous avons la guerre de Troie. De très nombreux mythes d'origine les plus diverses, attestent, sous une forme symbolique et légendaire, de l'importance fondamentale des désirs érotiques et guerriers dans les grands bouleversements des sociétés et des cultures. Il n'est donc pas étonnant que notre culture mette partout en avant le désir sexuel et celui du pouvoir jusqu'à l'affirmation de la violence plus ou moins esthétisée: elle ne croit plus au salut post-mortem et à la transcendance ou elle n'en fait qu'une vague consolation très accommodante pour l'ici et maintenant. Une manière d'assurance tout risque (« Sait-on jamais ? »), sans obligation, ni dogme, ni commandement. C'est ainsi, et personne ne peut changer le cours de l'athéisme plus ou moins explicite des sociétés contemporaines (ce que certain appellent, à tort, le matérialisme); et, sauf à croire au miracle auquel plus grand monde ne croit, il faudrait qu'on nous dise comment pourrait s’opérer un tel changement culturel.

L'art occidental, (comme la mythologie gréco-romaine dont se sont emparée les artistes , y compris chrétiens), a toujours mis en scène en les magnifiant « l'hubris » humain , la force des passions qu'il est quasi impossible d'éradiquer par des considérations morales sauf à prétendre éteindre la puissance créatrice des hommes; Platon qui voulait chasser les poètes et les peintres de la cité ainsi que les iconoclastes et les musulmans, qui interdisaient le représentation de dieu, de l'homme (de la femme surtout), voire de la nature le savaient bien: L'art sacré n'a jamais été sacré, il a toujours détourné le sens religieux officiel pour produire des effets érotiques plus ou moins avoués; et quand les représentations deviennent de pures illustrations d'un sens désérotisé, convenu et répétitif, il se vide de tout contenu et émotions esthétiques.

Dire que l'artiste indique le surnaturel derrière le naturel et que l'on doit chercher le sens religieux derrière l'apparence est une erreur: Quel sens surnaturel? Celui que l'artiste prétend y avoir mis ou qu'on lui a commandé de mettre? Mais l'artiste honnête sait très bien que l’œuvre ne dit rien d'autre qu'elle-même et que sa fonction n'est pas d'indiquer mais de produire des affects qui ont le pouvoir de bouleverser l'imagination de chacun  en suscitant des interprétations multiples et ambivalentes. Dire que devant une oeuvre d'art l'imbécile regarde le doigt (le tableau dans sa sensualité toujours très érotique) comme l'imbécile du proverbe chinois, au lieu de ce qu'il indique, c'est ne rien comprendre à l'art, car justement c'est l'imbécile qui pense que l’œuvre indique autre chose qu'elle-même et croit bêtement (et/ou à qui on fait croire) qu'il faut voir ailleurs! Du reste c'est être vraiment un contre-sens de penser que l'art illustre un sens moral et/ou religieux et politique préétabli . Si l'on m'indique le ciel et que je n'y vois rien d'autre que des nuages en formes se seins et de ventres, la puissance bienfaisante du soleil et malfaisante des tempêtes , dois-je chercher en vain ou regarder celui qui me dit de regarder en me demandant s'il n'a pas des visions ou s'il ne se fiche pas de moi comme dans ce jeu bien connu du farceur qui montre du doigt le ciel avec frayeur ou ravissement pour détourner les passants de leur désirs terrestres?



    1) La question est de savoir si l'art doit être religieux pour être de l'art et en ce cas si la beauté (qui est proprement
    indéfinissable et toujours contestable) doit dépasser les multiples figures formidablement inventives de l'érotisme
    ( ou amour) humain (ce en quoi l'érotisme est le contraire de la pornographie) en vue d'une vision du divin (ou du
    surhumain); c'est à dire de la divination de l'homme et de son expérience existencielle.

    2) Que la tragédie ait eu une fonction de catharsis, cela ne signifie pas qu'elle ait visé à nous délivrer des désirs
    érotiques mais de l'aveuglement incontrôlable des passions,en vue de leur transformation en désirs actifs et
    inventifs, régulés; ce qu'implique l'art érotique. (voir "le verrou" de Fragonnard). C'est là la thèse d'Aristote et de
    Freud, qui, ni l'un ni l'autre, n'étaient des croyants moralistes au sens chrétien ou l'érotisme a affaire au péché (ce
    qui, du reste, est une interprétration discutable et paradoxale, car spiritualiste, de l'incarnation; mais le christ
    était-il chétien?). C'est, à mon avis le passage de la violence passionnelle pornographique à l'érotisme dont il est
    question en art; et en cela je ne le réduis pas, au contraire; sauf à considérer que refuser de voir le divin c'est
    réduire le sens de l'art pour prétendre faire de l'art une liturgie, un culte stéréotypé. Une lecture athée, libérée des
    préjugés et des croyances surnaturelles et donc non réductrice de l'art est toujours possible; sauf à réduire l'art à
    illuster des significations morales et religieuses; mais lesquelles? Toutes les grandes oeuvres occidentales, même
    sacrées, sont d'abord des oeuvres où les hommes se projètent inventivement dans leur émotions et leur imaginaire,
    pour mieux vivre avec eux-mêmes. Dieu, comme "fiction moralisante" (Nietzsche), n'a pas grand chose à voir avec
    la provocation esthétique.

    3) L'art contemporain me semble, sur ce point, lever tous les tabous et les faux semblants de l'exploitation
    bien-pensante de la création esthétique: nous avons le droit de lire l'art en général et de tous les temps, au travers
    de la démystification erotico-esthétique que provoque l'art moderne! On ne doit pas vivre hors de son temps; ou
    alors cela signifie que l'on désire mourir..Désir érotique (création) ou désir de mort (destruction); nul n'a d'autre
    choix, sachant que l'un ne va pas sans l'autre, mais qu'il me semble préférable que le second soit mis au service du
    premier (voir Egon Schiele).


1) Une certaine religiosité, sans rivages conceptuels clairs, peut rendre possible, par le refus de soumettre le désir d'évasion hors des désirs terrestres (érotique et/ou violent) et le désir du salut dans le non-désir, comme désir de mourir selon Nietzsche, à des contrôles rationnels; nous le voyons dans l'instrumentalisation qu'en font certaines sectes: l'attitude irrationaliste et irréaliste, par l'exaltation moralisante et salvatrice qu'elles provoquent, s'oppose à l'attitude critique et libérale qu'exige la réflexion philosophique. C'est pourquoi je suis pour un travail théologico-critique sur les significations et non "le" sens existenciel, lequel implique confusion, des différentes religions dans leurs oppositions.

2) La définition de l'érotisme que j'emprunte à Freud et à sa théorie du déplacement du désir et de la sublimation ne veut pas dire dépassement de désir mais promotion; preuve en est que certains contradicteurs  me renvoyez à "la baise" (l'acte génital), mot que je n'emploie jamais par sa connotation pornographique et "donc" anti-érotique, comme forme unique d'expression des désirs érotiques. Libre à vous de refuser la psychanalyse, mais j'aimerais que ce refus ne soit pas fondé sur une interprétatiion réductrice des thèses centrales de Freud.

3) Enfin, la  position qui affirme qu'une certaine philosophie rationaliste occidentale  serait virile, voire machiste (anti féminisme) par rapport à la philosophie orientale plus équilibrée, me paraît globalement juste et mériterait, en effet, un débat approfondi; mais je doute que cela puisse justifier la confusion, que vous semblez faire, entre la pensée religieuse et mythique et les formes de sagesses qu'elles génèrent et la pensée philosophique qui opère par dissolution dialectique de tout attachement préétabli au sens.

4) Enfin, il m'apparaît significatif que vous refusiez, me semble-t-il, de vous confronter aux pensées les plus critiques de toute forme de religion et/ou de religiosité au profit d'une vision herméneutique de la prétendue vérité du sens (ne serait-ce que dans le non-sens boudhique) de l'existence humaine: les pensées sceptique, matérialiste et scientifique, s'opposent, à mon sens, à la pensée méditative . Pour ma part, je distingue méditation au sens oriental et philosophie; l'une problématise, conceptualise et argumente dans la confrontation, l'autre laisse advenir un état de satisfaction totale, de détente voire  de non-désir qu'il appelle vérité. Pour une pensée débarassée de toute "vision" transcendante du sens de la vie, il n'y a d'autres significations dans le vie et le monde que par le désirs et ses figures; tout sens transcendant naturel ou divin est alors illusion du désir qui se projette hors de lui-même, croyant trouver dans ses projections une vérité supérieure autorisant son dépassement et le salut :l'ataraxie, la béatitude ou la fin de toute contradiction, ce que j'appelle, en effet, le départ pour Sirius (ou si vous préférez le paradis post-mortem ou la grande dissolution dans le macrocosme de la nature).

    Conclusion: L'essence de la philosophie est de provoquer l'ébranlement des croyances pré ou irrationnelles et de
    critiquer, sans fausse pudeur, leurs effets possibles; et Socrate, Kant et Nietzsche, chacun à sa manière, n'ont
    jamais fait autre chose.


    Tout art est polymorphe dans ses significations idéelles; tout à fait d'accord, mais tout art est sensuel et à ce titre
    mat en jeu le principe de plaisir, y compris comme pro-vocation non pas religieuse (rituel) mais de l'expérience de
    foi qu'elle récèle, or celle-ci est toujours érotique dans son vécu comme nous l'indiquent tous les grands mystiques
    (ne serait-ce qu'auto-érotique, ce que l'art comme provocation ne peut jamais être entièrement, justement). Quant à
    Kafka, l'expérience de l'impuissance érotique qu'il vivait à s'affirmer, sous la pression de l'hypocrisie sociale et
    moralisante généralisée, dans son désir, me parait au centre de son oeuvre, pour en faire... un objet érotique
    paradoxal, en partie du reste destructeur). Il n'est pas indifférent de savoir que Musil, Kafka et Freud participaient
    d'un contexte culturel proche.

    Il n'y a là rien de réducteur, sauf à confondre l'érotisme avec la pornographie sexuelle et religieuse (l' imagerie
    pieuse) figée, psycho pathologique, commerciale ou et/ou édifiante (les trois indissociables); ce que je ne fais
    jamais. Y a-t-il un au delà du principe de plaisir? Freud répond à cette question par la pulsion de mort; ce que
    faisait aussi Nietzsche à propos des religions et philosophies orientales (critique de Schopenauer) et du
    christianisme, voire du socratisme. Le joie du corps et de l'esprit, indissociables, était pour Spinoza le fin de la
    philosophie dont il disait qu'elle était et devait être une méditation de la vie de l'homme dont le désir est l'essence,
    non de la mort. C'est la raison de mon insistance. Perverse? Sans doute pour tous ceux qui se parfument à la
    moraline (Nietzsche).
    N'oublions pas le force critique du cynisme en philosophie!



L' altruisme, le plaisir et le bonheur

    La conscience spontanée est méconnaissance des causes réelles de nos désirs et de nos motivations profondes; ne
    faisons pas totalement l'impasse sur la Rochefoucault, Spinoza, Nietzsche et Freud, etc..La conscience réfléchie et lucide
    se méfie par principe de la pureté apparente de nos intentions, non pour les purifier, mais pour en faire le meilleur usage,
    quelque soit leur prétendu égoisme.

    Même Kant savait qu'on l'on ne pouvait savoir si notre acte était moral ou non; donc contentons nous, au lieu de nous
    torturer l'esprit avec la pureté incertaine de nos intentions, de juger l'arbre à ses fruits: qu'importe que le chat soit blanc ou
    noir, pourvu qu'il attrape bien les souris.
    De plus une intention tournée vers le plaisir qui fait plaisir celui que l'on désire et dont on désire le désir et le plaisir me
    semble préférable, du point de vue d'une éthique de la responsabilité, qu'une intention soumise au devoir qui interdit de
    chercher son plaisir dans la plaisir de l'autre et, par conséquent, le plaisir de l'autre. Peut-on croire que l'on peut avoir du
    plaisir avec qui sacrifie son plaisir par devoir? Et que l'on peut aimer qui (se) sacrifie son aspiration au bonheur pour
    nous? L'amour authentique se moque de la morale moralisante. C'est à cette condition que l'on peut "faire l'amour" et que
    cela marche! Il n'y a pas besoin d'être sexologue pour le savoir; il suffit d'un peu de pratique et de réflexion sur les
    conditions de cette pratique.
    Quant aux rapports avec ceux que l'on n'aime pas, il ne s'agit pas de morale ou d'éthique, mais de droit; c'est à dire de
    justice et de combat pour la justice.



    Le plaisir est joie lorsqu'il est accompagné du sentiment de sa valeur (de sa propre perfection, disait Spinoza), lequel
    implique une vision et/ou conception plus réfléchie acquises et/ou produite des valeurs (le bien, le mal, le juste, l'injuste
    etc..) en société; le jugement des autres sur soi et, en retour de soi sur soi (réflexivité de la consciente de soi médiée par la
    conscience des autres). Cette joie est durable lorsqu'elle est réactualisée par le souvenir (mémoire et conscience de soi,
    voir Bergson) et lorsque cette réactualisation donne jour à de nouveaux projets valorisants. Le bonheur dans l'extinction
    du désir d'être soi, dans le refus de s'aimer soi-même, dans la plénitude du vide (Nirvana)? D'accord, c'est ce que Freud
    et après Nietzsche considérent comme une des figures de la pulsion de mort. Excusez moi, mais je préfère l'insatisfaction
    du vivant au dépassement de toute insatisfaction dans le non-désir de la mort. Croyez-vous que la personne que j'aime
    puisse m'aimer si je me réfugie dans le non-désir? Puis-je commercer et prendre plaisir à m'entretenir avec d'autres sans le
    désir de la rencontre heureuse et cette rencontre fait-elle disparaitre la conscience positive de soi? La posture boudhique
    me semble plutôt une forme de dénégation, sinon pourquoi ne pas en finir aussitot avec la vie? Certains sages de
    l'antiquité n'hésitaient pas à préconiser le suicide; sauf que l'histoire ne nous dit pas s'ils étaient passés à l'acte; ce que
    Lucrèce ne manquait pas de remarquer avec la grossière finesse qu'on lui connaît: "pourquoi ne le font-ils pas, s'ils sont
    tellement insatisfait de désirer le plaisir et la joie!"

    Conclusion: Sur le plan de l'éthique amoureuse et des jeux sociaux, mieux vaut être un homme vivant insatisfait mais
    heureux, qu'un mort satisfait!



La notion d'égoisme me parait ambiguë:

Elle désigne:

- soit l'attitude qui consiste à penser son désir (de reconnaissance) dans l'exclusion du désir des autres et en cela l'égoisme est un leurre.
- soit la revendication du droit au bonheur par chacun dans la mise en oeuvre de son désir d'être et d'agir par et pour soi-même (être à soi-même sa propre fin); ce qui n'exclut en rien la reconnaissance du désir des autres mais l'inclut au contraire. Elle se manifeste sous la forme de la revendication à l'autonomie de l'individu et non sous celle de la toute puissance sur les autres.

L'idée de communauté (comme l'idée de conscience de classe, comme sujet de l'histoire, à laquelle vous faites allusion pour, aujourd'hui, l'écarter) me semble vouloir évacuer la deuxième au nom de la critique justifiiée de la première et risque par là de remettre au goût du jour une vision sacrificielle de l'altruisme et une subordination obligatoire et contraignante (anti-libérale et anti-contractuelle) des individus au groupe sacralisé. En un mot totalitaire. Un certain "communisme réel", heureusement en déroute, en etait un bon exemple. (Ex: "servir le peupl"e ou "extirper le moi prétendument "bourgeois" etc..)



 Extrémisme et consommation
Phrase commentée:
"L?insécurité est le thème « bouc émissaire », le prétexte, le fantôme qui cache les PEURS MATERIALISTES. Car si les deux ne sont pas fondamentalement liées, leur point commun est évidemment l?économie."

Peur matérialiste? pas exactement ou, du moins, seulement en apparence; mais plutôt peur du manque à être que provoque l'incapacité économique à consommer les idoles partageables que sont les objets-marchandises. Cette peur est en effet peur du vide: celui de ne pas être reconnu et donc de ne pas se reconnaître, par défaut de médiation symbolique crédible: ces symboles à haute valeur ajoutée que sont tous les objets-fétiches de la consommation; il s'agit donc d'une angoisse sans objet car le seul objet qui manque est soi-même comme sujet/objet d'une relation auto-productrice et autonome de soi au désir toujours insaisissable de l'autre.

Cette frustation angoissante est en effet structurelle et le besoin sécuritaire ne peut la combler, sinon par cette dérive catastrophique vers la pulsion de mort qui définit l'extrème-droite laquelle ne peut être une soupape de sureté ou servir de piqure de rappel en faveur du désir du vivre qu'à la condition d'être tenue éloignée du pouvoir. La vie suppose que l'on substitue le dialogue (et la satisfaction insatisfaite et donc toujours ouverte) à la haine et l'érotisme (jeu dialogué du désir) à la pornographie (rituel féticiste et dominateur); seulement voilà, pour dialoguer il faut être deux et par nature l'extrème-droite refuse le dialogue.


Désir,  raison et éthique

    Spinoza refuse ces oppositions nature/morale, désir/raison, déterminisme/autonomie...

    1) La raison ne peut se déterminer en rien si ce n'est par l'effet d'un désir plus ou moins raisonné et conscient de ce
    qui le détermine, d'une manière éventurellement conflicturelle, en vue de "ce qui nous est vraiment utile"; qui
    s'affirme dans l'expérience de la joie.(c'est confirmé par les neuro-sciences: qui est indifférent ne peut rien
    décider, et encore moins agir)
    2) Le désir est en effet l'essence de l'homme en tant qu'appétit devenu conscient de ce qui peut le satisfaire
    réellement: la joie que nous éprouvons quand nous ressentons l'accroissement notre propre perfection et de notre
    puissance d'être et d'agir.
    3) l'autonomie ne réside pas dans l'indépendance (contre-nature) de notre raison par rapport à notre désir
    (conatus), mais dans la connaissance vraie de ce qui détermine notre désir d'être et l'accroissement de notre
    puissance d'action, en vue d'en faire un usage efficace. L'autonomie désirante s'oppose à la passion déraisonnable
    et méconnaissante de ce qui le détermine dans l'impuissance; les passions sont donc à la fois l'effet de
    l'impuissance originelle due à la méconnaissance (c'est pourquoi Spinoza dit avec insistance qu'elle est naturelle)
    et la cause de cette impuissance; pour sortir de cercle vicieux de la passion il convient donc de connaître ce qui la
    voue à l'échec: on n'est "libre" que par la connaissance de la nécessité de notre désir afin d'en faire un usage
    objectivement utile; le succès en est le seul critère possible.

    La morale "idéaliste" rend l'éthique indésirable et le désir immoral et donc coupable; il en résulte l'impossibilité
    de transformer nos passions en désir actifs (efficaces) et la culpabilité permanente vis-à-vis de notre désir qui ne
    peut que réduire notre capacité à agir, donc nous condamner à l'impuissance. Pour nous soumettre à un pouvoir
    surnaturel qui nous domine par la menace permanente (jugement dernier) et la promesse du paradis. C'est pourquoi
    Kant est contraint pas cette oppostion entre le raison et le désir de faire de l'immortalité de l'âme et de l'existence
    de Dieu des postulats nécessaires de "sa" conception de la morale!

    Mais, je ne nie pas l'altruisme, que je considére inhérent au désir du désir, mais je ne fais pas
    de son appel un dépassement du désir, mais son accomplissement dans un jeu déterminé qui est celui de l'amour.
    C'est en cela que, d'ailleurs, vous me considérez commez chrétien;

    2) Or ce que je refuse dans le christianisme c'est le croyance en l'amour universel qui se confond avec celle de
    l'unicité ethique de tout les jeux relationnels; je pense qu'Adam Smith a raison: on n'attend pas de son boucher qu'il
    nous aime, ni qu'il soit altruiste, pour être bien servi, mais qu'il aît intérêt à bien nous servir pour conserver notre
    fidèlité, dans un jeu concurrentiel ouvert.

    3) Par conséquent, je pense que l'éthique de l'amour est insuffisante et même contre-performante pour fonder
    l'ensemble des rapports humains car des rapports de compétition sont inévitables dès lors que tous les hommes
    n'ont pas les mêmes intérêts sociaux, voire les mêmes valeurs et qu'ils ne s'aiment par forcément: par contre une
    éthiqe de la compétition me paraît indispensable, dans une société individualiste et pluraliste symboliquement sans
    rituels uniformes des comportements.

    il faut apprendre à vivre sans violence avec des gens que l'on aime pas, voire que l'on considére comme des
    adversaires, voire des ennemis; c'est, à mon avis, une des leçon de la modernité libérale. Aimer même ses
    ennemis, ne se comprend que si l'on renonce au monde ici-bas et si , en effet, on renonce à soi. Ce qui, du reste, ne
    peut pas trop inquiéter les violents et les dominants.

    Le problème est bien celui du statut, des limites et du rôle de la rationalité dans son rapport à l'éthique:

    1) Il n'y pas de rationalisation possible de l'absolu: car la raison est par nature relative; elle ne permet d'établir
    que des relations logico-expérimentales; mais pas la validité d'un fondement inconditionné de ce qui est et
    doit-être; en cela Pascal et Bergson ont raison: l'absolu dépasse les pouvoirs de la raison; et qui veut "penser"
    l'absolu doit abandonner la démarche rationnelle au profit de la foi. Kant, à mon sens, a logiquement tort de
    prétentre que l'absolu peut être pensé par la raison sans être connaissable; c'est pourquoi il pose, à tort, la
    croyance en Dieu comme une exigence de la raison, alors qu'elle présuppose l'expérience de la révélation et de la
    grâce divine; laquelle est nécessairement subjective (vérité du coeur et non de la raison insiste Pascal) et donc
    non-universalisable et non-philosophique.

    2) L'éthique raisonnable est la seule qui puisse permettre de définir des règles relatives en vue de relations
    pacifiées, entre des hommes dont les intérèts, les désirs et les valeurs et les croyances sont hétérogènes, voire en
    conflit. Se situer du point de vue de l'absolu pour fonder l'éthique, et qui plus est, le droit, c'est faire semblant de
    croire que tous les hommes dans le monde pourraient être animés de la même foi! Ce que l'expérience dément tous
    les jours.

    3) Etre raisonnable c'est être réaliste: chercher le dialogue et le compromis sur fond des expériences de désir, de
    souffrance et de joie des uns et des autres.

    4) Mais en effet, il me semble que toute position ontologique et/ou éthique transcendante nos désirs terrestres, met
    a priori en péril les conditions d'un tel dialogue. La guerre des dieux est la conséquence logique d'une vision
    dogmatique (absolue) de la vie.



    "Mais le véritable problème est cette emphase de l'individu, ce libéralisme qui verse dans le narcissisme, et
    pourtant nous sommes tous l'esclave de quelque chose. En fait, le narcissisme pourrait-il avoir quelque chose à
    voir avec la servitude?"

    Le narcissisme est de tout les temps mais il prend les formes éthiques dominantes du moment: Autrefois
    l'aliénation narcissique "religieuse" était liée à la valeur que les individus s'accordaient sous le regard de Dieu,
    des prètres et de la communauté des croyants.

    Aujourd'hui le narcissisme est "affranchi" de normes impératives prétendument universelles dérivant de la
    croyance en un dieu unique juge suprème et en ses commandements, : toutes les religions promettent le salut et la
    religion chrétienne le salut "personnel", mais aujourd'hui le sentiment religieux est devenu sans affiliation
    socialement et symboliquement contraignante; l'hédonisme (le bonheur ici et maintenant, le court terme plus que le
    long terme et le post-mortem) prédomine, donc les individus sont conduits à bricoler leur narcissisme (amour de
    soi) en dehors d'une communauté unifiée et unifiante traditionnelle stable; le contexte de la mode, de
    l'impermanence des techniques (des rapports à la "nature", à son corps et aux autres), des rôles, de la pluralité des
    valeurs de références, des styles de vie et des normes conventionnelles obligent chacun à bricoler l'image
    valorisante de soi dans la pluralité des jeux sociaux, de la hiérarchie des valeurs et des normes qu'ils mettent en
    jeu, dans lequel il est "pris", selon des éléments hétérogènes qu'il combine dans le cadre de stratégies variables.

    Dans ces conditions, la "solidarité" n'est plus prescrite comme un devoir transcendant le sujet personnel et dépend
    du contexte de jeu et des situations et surtout est laissée au sentiment vécu d'identification à la souffrance des
    autres comme pouvant être la sienne, sinon aujourd'hui du moins demain; ce sur quoi d'ailleurs les médias (qui ont
    remplacé idéologiquement les églises) insistent toujours: "vous même ou un proche pourriez être victime et donc
    avoir besoin de l'aide des autres"; donc l'aide est un devoir pour les autres et soi-même. Ce sentiment vécu ne peut
    avoir cours jusqu'au bout dans le jeu de la compétition, par ailleurs utile et, lorsque l'indifférence prend le pas sur
    l'identification dans des contextes où les individus se sentent impuissants à valoriser leur image dans un jeu qui
    leur échappe et/ou ils sont perdants à tous les coups, l'égoïsme exclusif prend le pas: "ce n'ai pas mon problème,
    j'en ai rien à foutre et/ou j'ai déjà donné". Ce pourquoi "le devoir d'assistance à personne en danger" sous la
    menace d'une sanction pénale et non plus de la sanction divine, qui n'est plus universellement crédible, est institué
    comme un devoir du citoyen (c'est donc qu'il ne va pas de soi).

    Pour être généreux, il faut soit aimer Dieu (et l'espérance de salut personnel qu'il apporte, donc s'aimer aussi
    soi-même en tant que créature divine), soit s'aimer soi-même et aimer les autres à travers soi, comme le savait
    Rousseau qui faisait de l'amour de soi et de la pitié naturelle vis-à-vis de ses semblables deux sentiments naturels
    indissociablement noués.



    La souffrance n'est pas d'abord physique, mais doit être aussi et surtout
    psychologique (on peut par contre désirer souffrir physiquement pour l'honneur et l'amour de soi; ex: le sport, le
    "tu accoucheras dans la douleur!" etc..) en cela qu'elle met en jeu l'image de soi du sujet; ex: l'humiliation subie
    dans l'oppression.
    Donc C'est donc parce que je refuse l'humiliation pour moi que je peux ressentir le désir de justice en la refusant pour
    les autres ("solidarité", voir mon autre réponse à Steph aujour'hui); encore faut-il que ceux-ci ne soient pas en
    position de m'humilier!


Critique de l'impératif catégorique

Le terme catégorique signifie inconditionnel; Or selon moi ce terme est ambigu:
1) Soit il signifie que cet impératif s'impose à mon action sans avoir à en mesurer les conséquences réelles qui peuvent être catastrophiques (éthique de conviction) et là je le rejette car je reste pragmatique (éthique de responsabilité).
2) Soit, il signifie qu'il doit nécessairement être pris comme référence dans un contexte démocratique pour que ce contexte et ses règles du jeu soient institués et fonctionnent; sans pour autant que je puisse toujours appliquer aveuglément tel ou tel impératif, dés lors que ce contexte particulier le rendrait contre-performant, au regard des conditions de la survie de la démocratie elle-même et de ses valeurs fondamentales: ainsi je suis d'accord pour que l'on interdise l'expression du racisme au nom de la défense de la liberté d'expression elle-même.

Pour ce qui concerne la question de savoir si la démocratie mérite d'être défendue; il s'agit d'un choix pragmatique qui concerne la question de la violence en politique et dans les relations humaines en général et de sa réduction. Là liberté (par exemple d'action et d'expression) n'est pas un absolu car elle suppose des conditions régulatrice limitatives qui la rende raisonnable, c'est à dire universalisable en la garantissant à tous; ce que le racisme justement refuse.
Une éthique de la responsabilté est obligée d'introduire de la pondération dans l'usage qu'elle fait de ses impératifs; qui, du reste, peuvent être parfois difficilement compatibles; ex liberté et égalité et/ou liberté et assistance etc... et dans un tel conflit il s'agit toujours d'évaluer le moindre mal; plutôt que d'appliquer mécaniquement (catégoriquement) un principe élévé à l'absolu d'un bien en soi, auquel je ne crois guère...



 

L'amour. Voir De l'amour humain; simplement humain?
 
 

Nos désirs ne sont murés sur soi et des fantasmes figés, qui nient la présence du désir de l'autre que par le malheur vécu dans l'impuissance que génère l'interdit, la dénégation et le refoulement; c'est à dire, le silence honteux: "on ne (se) parle pas de ces choses là!"; c'est d'ailleurs la parole déculpabilisante (le pardon ou le refus de moraliser) qui fait l'efficacité de la confession et/ou...de la psychanalyse et/ou...; la plasticité du désir est d'origine en l'homme et se distingue du besoin biologique par la mise en jeu du narcissisme (conscience valorisée de soi) et par le fait que tout désir est ambivalent (éros et thanatos) donc originairement instable, et se cherche des modèles à l'extérieur, dans la pratique et la conscience des autres, (voir Hegel et René Girard et la mimétique conflictuelle du désir) et Freud qui affirme, par boutade, que l'enfant est un pervers "polymorphe"; (ce qui, justement n'en fait pas un "réel" pervers).

    Mais l'amour est justement ce qui rend possible le dialogue constructif et fragile (mais l'échec peut, du même coup,
    le rendre haineux et destructeur); donc, ce qui peut rendre l'égoïsme (aussi) altruiste et donc changer l'économie
    libdinale et la forme d'expression murée des désirs du sujet en un sens relativement heureux (bouleversant) et
    valorisant. Freud: "qui est amoureux et relativement satisfait n'a pas besoin de psychanalyse" et j'ajouterais de
    leçon de morale altruiste sur l'amour. L'amour se moque de la morale, mais pas de règles pragmatique du jeu...

    Chez Freud la pulsion de déliaison et la pulsion de mort sont une seule et même chose. Le vie organise (lie; noue;
    tisse, échange) mais elle est aussi indissociable de la pulsion contraire, celle de la destruction, du "dénouement",
    dans la "création destructrice", qui implique aussi et toujours la mort, la violence et la domination réelle et/ou
    symbolique. Vie et mort sont indissociables comme Eros et Thanatos; toute la question est de savoir à quelles
    conditions est-il possible de (re)lier (contrôler, canaliser et non pas éradiquer, ce qui serait mortel) la pulsion de
    mort (déliaison) sous la domination de la pulsion de vie (liaison); bref de mettre la mort au service de la créativité
    de la vie. Mais peut-être suis-je trop dialecticien et trop réaliste pour concevoir une vie pure, sans mort, une
    positivité sans négativité, une sociabilité sans insociabilité, une ordre social sans violence fondatrice (voir Totem
    et tabou de Freud; mais aussi Machiavel, Pascal et Hegel), bref un pur amour angélique et éternel, une sociabilité
    de l'amour universel, une société de saints désexualisés et partageux...Et enfin l'idéal de la béatitude dont je
    rappelle que les grand mystiques nous disent tous qu'elle est inséparable de l'innocente bétise (simplicité d'esprit)
    originelle d'Adam (avec Eve ça se complique, car la dualité ammène la tentation de l'intelligence et donc la sortie
    de l'innocence et le refus de Dieu, comme fondement de la violence: le péché). Soyez simples d'esprit et vous
    serez non-violents et sans égoïsme (voir aussi L'Idiot de Dotoievsky).


    Il y a d'autres bonnes raisons, pour refuser être aimé sans  conditions, ni espoir retour:

    1) Il est impossible de satisfaire la demande d'amour de qui vous aime et que vous n'aimez pas: si vous faites
    semblant, vous seriez cause de déception et de souffrance; mieux vaut dire franchement que vous refusez cette
    demande à laquelle vous ne pouvez et donc ne devez pas répondre dans l'intérêt (au sens large) de celui qui vous
    aime, sans retour:;, le respect que vous lui devez vous impose de ne pas répondre à son amour.

    2) L'amour non réciproque, dont on est l'objet, avantage toujours celui qui aime aux dépens de celui qui n'aime pas
    (ou qui aime "moins"). Qui aime est toujours dépendant de la personne aimée et qui n'aime pas car celle-ci peut
    exercer un chantage efficace sans craindre d'être "désaimé en retour ("si tu n'obéit pas je fous le camps") et donc
    détient un irresistible pouvoir de séduction (pouvoir de manipuler du désir de l'autre à sa guise). L'amour non
    réciproque inégalitaire est donc nécessairement source de domination.

    Donc c'est l'égalité des forces dans la réciprocité de l'amour qui rend possible le respect de chacun en une relation
    d'amour mutuel libérale.

    L'amour inconditionnel pour qui aime est la plus mauvaise stratégie amoureuse qui soit: il se met en position de
    faiblesse, de n'être ni respectable, ni aimable. Relire un des plus grands stratèges en matière d'amour: Marivaux.

    On peut réver d'un amour absolu; mais ce rêve tournera nécessairement au cauchemard.Il y a d'autres bonnes raisons, qui ne sont pas exclusives de celles que vous dites, pour refuser être aimé sans
    conditions, ni espoir retour:

    1) Il est impossible de satisfaire la demande d'amour de qui vous aime et que vous n'aimez pas: si vous faites
    semblant, vous seriez cause de déception et de souffrance; mieux vaut dire franchement que vous refusez cette
    demande à laquelle vous ne pouvez et donc ne devez pas répondre dans l'intérêt (au sens large) de celui qui vous
    aime, sans retour:;, le respect que vous lui devez vous impose de ne pas répondre à son amour.

    2) L'amour non réciproque, dont on est l'objet, avantage toujours celui qui aime aux dépens de celui qui n'aime pas
    (ou qui aime "moins"). Qui aime est toujours dépendant de la personne aimée et qui n'aime pas car celle-ci peut
    exercer un chantage efficace sans craindre d'être "désaimé en retour ("si tu n'obéit pas je fous le camps") et donc
    détient un irresistible pouvoir de séduction (pouvoir de manipuler du désir de l'autre à sa guise). L'amour non
    réciproque inégalitaire est donc nécessairement source de domination.

    Donc c'est l'égalité des forces dans la réciprocité de l'amour qui rend possible le respect de chacun en une relation
    d'amour mutuel libérale.

    L'amour inconditionnel pour qui aime est la plus mauvaise stratégie amoureuse qui soit: il se met en position de
    faiblesse, de n'être ni respectable, ni aimable. Relire un des plus grands stratèges en matière d'amour: Marivaux.

    On peut réver d'un amour absolu; mais ce rêve tournera nécessairement au cauchemard.



Religion et politique
 

    Le sentiment religieux, que je ne confonds pas avec les religions insituées, est présent dans toute condamnation
    morale du monde tel qu'il est, au profit d'un arrière monde qui serait plus réel et forcément meilleur et qui
    fonderait notre refus global et, par là totalement stérile, du monde réel: on ne peut transformer le monde réel qu'en
    exploitant les contradictions du monde réel telles qu'elles sont vécues par la grande majorité des hommes qui ne
    sont pas tous conduits, comme vous le dites vous-mêmes, par le désir de s'en évader et/ou de faire la révolution
    radicale que vous semblez désirer, mais d'y vivre mieux avec les idées dominantes qui sont les leurs et, parmi
    celles-ci, chez nous, l'idée d'autonomie déconnectée de toute promesse messianique en un salut sur terre ou dans le
    ciel...

    C'est pourquoi, je ne peux raisonnablement penser la justice que dans un cadre athée, ou , si vous préférez laïque
    (a privatif: en l'absence de référents théologiques) car si, en effet, les croyances religieuses des hommes sont
    diverses, voire opposées, la souffrance réelle face à l'oppression et la violence est le problème de tous (voir le pb
    du moyen-orient). je considère, par conséquent, qu'il vaut mieux penser la politique sans illusion transcendantes
    et/ou transcendantales pour transformer modestement ce qui peut l'être avec les hommes tels qu'ils sont et je n'ai
    aucun titre à mépriser la consommation (qui est aussi une forme de spiritualité: les objets sont des symboles de
    valeurs, voire des "fait-tiches), pas plus que le foot-ball qui mobilise, chez nous plus que les religions mêmes,
    alors que le sport-spectacle ne m'intéresse personnellement que médiocrement (sauf comme phénomène à analyser)

    Ce que je refuse donc c'est de faire du religieux un fondement de la politique; car, soit on parle du sentiment
    religieux privé et donc infra-politique, soit on parle de la religion-institution qui se veut constitutive des normes
    sociales; et là je dis non: De quel droit une vérité révélée à d'autres que moi (exemple, le sacro-saint respect de la
    vie qui interdirait pour tous l'avortement et/ou le clonage thérapeutique) pourrait-elle valoir pour moi et d'autres
    (et ils sont de plus en plus nombreux) qui n'ont rien à "voir" et encore moins à faire avec cette révélation?

    Penser, disait Hegel, il est vrai dans la perspective du savoir absolu en acte dans l'histoire des hommes (ce n'est
    pas ma vision de l'histoire), c'est penser ce qui est, avant même de prétendre penser ce qui doit être (et là Hegel se
    sépare, avec raison de Kant moraliste; mais pas de Kant réaliste et penseur de l'histoire). Penser ce qui est pour
    tenter de dégager les conditions d'une possible et souhaitable évolution, non par rapport à des conviction venues
    d'en haut, mais par rapport aux souffrances et aux désirs des hommes tels qu'ils s'expriment dans ce qu'ils ont de
    plus universels, à la conditions que ces désirs ne prétendent pas au nom d'un absolu spirituel et/ou d'une
    spiritualité prétendue supérieure, voire divine, (comme si les hommes étaient sans esprit, ni conscience, dès lors
    qu'ils ne croient pas à un monde transcendant), faire la loi.

    Entre le loi humaine et la loi divine, la démocratie choisit logiquement et donc résolument la première


Peur, angoisse, religion et politique

Il faut distinguer les situations qui génèrent la peur de celles qui génèrent l’angoisse : les premières confrontent les individus à un danger reconnu ou connaissable contre lequel ils peuvent croire se prémunir par des mesures appropriées sinon immédiatement, du moins dans l’avenir ; La peur met en jeu le principe actif de prévention. Les secondes sont accompagnées d’un sentiment d’impuissance et de déréliction face à un danger inconnu, voire inconnaissable. L’angoisse met en jeu le principe inactif de précaution (ne rien faire qui pourrait susciter des conséquences tragiques inconnues et/ou la colère des dieux). Le sentiment d’angoisse provoque un besoin de sécurité qui s’exprime par le recours imaginaire compensateur à des puissances divines ou humaines supérieures salvatrices et par l’identification mythique à un groupe fusionnel protecteur contre tout ce qui peut être vécu comme étranger (étrange étranger). C’est dire que l’angoisse est le vecteur de la soumission politique nationaliste et religieuse communautariste (souvent indissociées)le plus efficace qui soit. Ainsi comme l’angoisse est toujours plus ou moins présente, dès lors qu’elle est entretenue sous forme d’angoisse collective provoque nécessairement un renforcement des puissances compensatrices politiques et/ou religieuses en favorisant l’union sacrée derrière des chefs incontestables car sacralisés :c’est à dire à qui on doit inconditionnellement se sacrifier pour être sauvé.
Le 28/10/05


 Intolérance, religion et politique
L'intolérance est un comportement inhérent au refus ou à la peur des autres en tant qu'ils paraissent différents dans leur mode de vie et de pensée car cette différence met en cause la valeur que chacun s'attribue ou désire s'attribuer spontanément (narcissisme primaire de la conscience de soi).
Mais la religion ajoute à cette intolérance le certitude d'une vérité absolue révélée dans un contexte collectif auquel chaque croyant s'identifie pour être reconnu et admis: Le bien absolu (religieux) est incontestable d'autant plus qu'il est admis par le groupe lequel nous sécurise en nous offrant un vision du monde et de la vie solidaire confirmée par l'approbation des autres semblables à soi (communion, pratiques rituelles, conduites alimentaires, sexuelles et symboliques orchestrées par un pouvoir admis comme divin et donc supérieur et infaillible etc...). Quiconque contredit ou diverge (avec) cette vision est donc un ennemi mortel, incarnation du mal absolu versus le bien absolu.

L'intolérance religieuse est non seulement une conduite primaire mais elle devient secondaire (renforcée) car culturellement justifiée, voire sanctifiée, par la religion du groupe dès lors que celle-ci cherche à convertir, c'est à dire à supprimer la différence dans les autres, ou à détruire la différence en détruisant les différents (mécréants, infidèles, hérétiques etc..) pour affirmer un pouvoir théologico-politique (et toutes les églises sont des machines de pouvoir idéologiques sur les conscience, la sexualité, les relations sociales, le pouvoir politique et cela dès l'enfance) sur les croyants, d'autant plus que chaque église ou religion (et selon moi il n'y a pas de religion collective sans église et/ou administration pour gérer le pouvoir du sacré) se réclame d'une vérité universelle objective (Dieu existe réellement) valant pour tous y compris les non-croyants; vérité qu'elle ne peut évidemment pas prouver sur le plan rationnel; cette dernière s'affirme donc comme un mystère (incompréhesible par la raison et l'expérience communes) relevant d'un vision mystique nécessairement subjective qui ne peut triompher que par la menace (punition divine), la conversion forcée, le chantage affectif etc..voire la répression et la guerre.

Le tolérance collective, comme valeur sociétale, a donc historiquemet procédé d'un affaiblissement du pouvoir des églises et d'un septicisme grandissant du au développement des sciences et des techniques rationnelles et à la fin des sociétés hiérarchique et théocratriques traditionnelles. Il est vrai que temporairement cette rupture s'est accompagnée d'une intolérance contre l'intolérance religieuse (retour de baton) et même que les révolutionnaire ont cherché afin d'imposer les idées nouvelles, à inventer une religion politique (être suprème, déesse raison etc) pour briser l'attachement dans les esprits à l'ancienne religion théo-monarchique. Toute les intolérances ne sont pas religieuses mais toute intolérance collective l'est au sens ou elle prétend imposer une vérité transcendante et indiscutable aux individus, fut-elle présentée comme scientifique ou immanente. Et les religions politiques, même officielement athées, ne font pas exception: elles inventent en permanence des idoles divinisées, des rituels symboliques obligatoires et des cultes; bref du sacré et sacrilège. Elles gèrent l'axe du bien contre l'axe du mal.

Il faut être sceptique, c'est à dire refuser toute vérité absolue, pour être tolérant. Mais l'intolérance terroriste en tant que telle n'est pas tolérable; dès lors qu'elle prétend définir une vérité indiscutable pour tous et y soumettre sans condition la vie sociale par la violence physique ou psychologique, il faut, au nom des libertés, la combattre par la loi et la police, sans concession. Du reste les fanatiques refusent par principe tout dialogue, toute concession et tout compromis..La tolérance implique donc que l'intolérance religieuse soit politiquement vaincue, voire éradiquée par l'éducation à l'autonomie rationnelle de penser du plus grand nombre (d'où le combat pour l'école laïque). L'intoléance de l'intolérance collective terroriste et violente (religieuse au sens littéral du mot) est la condition de la tolérance sociétale. On peut mettre des intolérants individuels (et chacun l'est toujours plus ou moins) à la raison en les (ré)éduquant ; l' intolérance conjoncturelle révolutionnaire due aux conflits contre les pouvoirs théocratiques et despotiques peut être dépassée par le progrès des Lumières et de la démocratie pluraliste; mais l'intolérance religieuse est indépassable car comme la volonté divine qu'elle affirme incarner, elle se veut absolument justifiée et ne prendre fin que par son hégémonie irresistible, indéfinie (des siècles et des siècles), divine et prétendument salvatrice) sur tous les hommes et la création.
Le 23/12/04



    Le sujet entre connaissance et illusion
 

    Il se pourrait que le sujet soit une fiction "ontologiquement" vide mais "éthiquement" utile à l'autostimulation
    narcissique, voire à l'autosuggestion de nos "re"présentations plus ou moins conscientes, concurrentes et
    contradictoires afin de nous (re)construire sans cesse, en une toujours problématique cohérence pour légitimer nos
    projets et tenter d'en contrôler le déroulement ; ce que la présence des autres, par la médiation du langage qui nous
    oblige à imputer nos pensées et intentions à ce point de gravité fictionnel qu'est le sujet prétendument conscient de
    lui-même et donc relativement autonome , nous presse de faire.

    C'est aux sciences neuro-cognitives de nous en dire plus là dessus; ne serait-ce que pour nous faire prendre
    conscience (!) que nous n'avons pas (encore) les moyens d'en savoir davantage...Mais pour en savoir plus il
    convient d'abord de refuser l'illusion du sujet spectateur et autoproducteur de lui-même, transcendant ses
    représentations, comme un demiurge aux commande d'un poste de contrôle de centrale nucléaire.

Descartes dans "Les méditations métaphysiques" opère un renversement et/ou coup de force du sujet logique au sujet ontologique; Mais ce renversement est arbitraire comme l'a mis en évidence Kant (cf: "Critique de la raison pure":"paralogisme des raisonnements dialectiques"). Or cet arbitraire me semble contestable dès lors qu'il se présente sous la forme logique de la nécessité dans tous les arguments dits "ontologiques"(y compris chez Descartes). Si ce renversement n'est pas nécessaire il est de l'ordre de la foi et non de la raison, et de même que l'on juge l'arbre à ses fruits, sa signification et sa valeur se mesurent à ses effets pratiques. Mais il est vain de penser que la connaissance scientifique n'a rien à nous dire sur le sujet et sur le rapport entre le cerveau et la pensée car:

1) Elle le dira qu'on le veuille ou non et ce qu'elle dira aura des effets pratiques sur la représentation que construisent les "sujets" d'eux-mêmes et sur les processus d'autosuggestion dont je parle, voire sur les thérapies et les conditionnements qu'elle génèrera nécessairement
2) C'est à elle et non à nous (les "philosophes") de dire qu'elles seront les limites dans le champs de la connaissance qu'elle ne peut surmonter.

La philosophie n'a pas le pouvoir d'interdire aux sciences d'investir son "pré-carré métaphysique" qu'elles s'efforcent de déconstruire depuis toujours et il faut s'en faire une raison; mais elle a le devoir de comprendre d'une manière critique les enjeux des pratiques efficaces et des illusions nouvelles qu'elle met en oeuvre et en scène.



À  propos de la notion de "lien social"

Le mot de "lien"  me paraît religieux et par trop "affectif" (pathologique dirait Kant) dans l'expression à la mode "de lien social "qu'il faudrait "reconstruire" selon  certains sociologues et/ou politologues "sociaux-chrétiens" pour bien vivre ensemble, en tant qu'il serait la condition nécessaire d'une solidarité forte et chaleureuse. Or un tel "lien" opèrerait malgré les termes qu'il lie et ne présupposerait pas nécessairement l'engagement volontaire et contractuel des individus (re)liés, donc un tel lien ne serait pas révisable et contestable et il serait d'autant plus fort et chaleureux qu'il s'exprimerait sous la domination du sentiment d'identification valorisé et valorisant, aux dépens des étrangers; ce que montre  le sentiment national(iste) par exemple.  Ainsi quand on parle de crise de l'état national, on considère que les rapports politiques ne doivent plus être pensé en terme d'identification nationale mais de association volontaire d'individus lié par un contrat social, car cette identification :
1) Est forcément exclusive (préférence nationale) ce qui est dangereux dans des sociétés, laïques (voir athées sur laplan politique),  pluralistes et soucieuse des droits de l'homme
2) Elle ne peut plus fonctionner politiquement dans des sociétés qui refusent la guerre pour s'affirmer et qui délèguent une part de plus en plus importante de leur souveraineté à des institutions transnationales (ex: Europe) afin justement d'éviter la guerre, sinon les conflits.

Il y a des circonstances où il faut lutter contre ce type de lien spontané et non-volontaire dans la mesure ou celui-ci nous incite à commettre des injustices vis-à-vis d'étrangers. Et refuser le droit de vote à des citoyens de nationalité étrangère qui vivent dans un pays déterminé c'est commettre une injustice politique car c'est violer le principe de l'égalité des droits en faisant de ces concitoyens de simples citoyens passifs dépourvus de la citoyenneté politique active.

Donc méfiance: lien social et sentiment communautaire, national ou autre, pour en faire le fondement de la vie politique, c'est se préparer à commettre l'injustice et à mettre en cause les libertés individuelles.



Justice et capitalisme

La question de la justice des règles d'un jeu social (ou jeu de société) est celle:

1) de leur "justesse" qui rend possible la poursuite du jeu par tout partenaire dans l'espoir de gagner sans faire usage de
violence ou d'exclusion. Une menace et des sanctions légales de la part d'une autorité d'arbitrage pour faire respecter les
règles du jeu et faire qu'il puisse se poursuivre le plus longtemps possible sont indispensables.
2) de leur "justice" qui vise à ce qu'aucun partenaire ne domine a priori les autres de telle sorte qu'il serait nécessairement
gagnant et ceux-ci indéfiniment perdants

Autant dire qu'un entreprise capitaliste est incapable par elle-même d'être juste ni au premier sens, ni au second, car elle
vise son profit et que celui-ci n'est jamais aussi bien garanti que une situation de monopole et la domination sur son marché;
y compris du travail; sauf à être soumis à des règles du jeu social de nature politique qui le contraigne à se soumettre à des
droits sociaux visant à rétablir une plus grande égalité des chances et des positions dans les négociations et les échanges.

Le capitalisme n'est dynamique, légitime et viable qu'encastré dans le politique par la démocratie.



Désir de pureté et pulsion de mort

Pulsion de pureté = pulsion de répétition mortifère (l'identité réaffirmée dans l'identification collective par l'exclusion et la destruction de l'autre) = pulsion de mort. Que la pulsion de mort soit communicative plus que le pulsion de vie, rien n'est plus facile à comprendre: par définition elle exclut le dialogique, c'est à dire la confrontation à la différence, voire à la contradiction en soi-même par la médiation de l'autre qui nous invite au changement et donc à l'autonomie et à la créativité pour tisser ensemble ce qui est dissemblable en chacun de nous; elle refuse le travail auto-critique sur soi; ce qui s'appelle se construire dans et par la médiation du conflit intériorisé au désir des autres comme constitutif de jeu de notre propre désir. Ce qui reste de fort dans la position de Hegel et en même temps son point de fuite: il n'est pas de savoir absolu possible, dépassant (aufheben) la contradiction tout en la conservant à l'état de trace résolue.


Le désir du désir de l'autre

 Le problème chez Freud c'est que le désir ne peut être que désir d'objet et que la psychanalyse n'analyse pas ce qu'il en est (ou peut en être) du désir de sujet (désir de désir de l'autre), qui, selon Hegel, est le propre de l'humain comme structure de la conscience de soi se construisant par la médiation de la conscience de l'autre. Au fond chez Freud pas plus que chez Lacan, on ne fait l'amour à deux. Cette altérité est escamotée comme échec et n'est pas reconnue comme source créatrice d'imaginaire. Au fond la psychanalyse vise à faire de l'échec amoureux un indépassable qu'il faut accepter comme tel, pour, à la manière stoïcienne, réduire la souffrance que provoque la distorsion entre désir et réalité (du désir de l'autre) non par le haut : ouvrir la fantasmagorie solitair, mais par le bas: renoncer à la relation comme dialogue en le déclarant impossible ou stérile car impuissant à opérer la fusion fantasmatique; or c'est cette ce fantasme de fusion qui rend la rencontre impossible! et fait de l'amour une passion pathologique nécessairement perverse dont l'expression extrème est l'extase mystique qui hypostase le désir du désir d'un autre fantasmé élevé à l'absolu (Dieu ou l'autre divinisé comme chez Lévinas) comme pur reflet de lui-même dans lequel toute autonomie du sujet s'abolit sans retour.



Soi et l'autre: Le désir du désir de l'autre

"L autre ne peut être d aucun secours si le sujet lui-même ne se médiatise pas vis-àvis de soi seul"

Oui et non:
non: toute médiatisation de soi à soi met en jeu la présence au moins "imaginaire" d'autrui (je comme un autre) et cette médiatisation se construit (se bricole) sur fond des jugements des autres bien réels de notre expérience présente et passée et des structures sociales et symboliques (dé)valorisées et (dé)valorisantes qui conditionnent cette expérience.

oui: cette médiatisation ne peut fonctionner dans le sens d'un accroissement de l'autonomie du sujet que si celui-ci est capable (et donc dispose des moyens intellectuels et cognitifs acquis) d'analyser d'une manière critique cette expérience et celle des autres y compris et surtout quand elle le concerne de très près.

Dons il n'est pas juste, selon moi, de faire une priorité de la relation de soi à soi vis-à-vis de la relation aux autres, car c'est cette  structure plus ou moins démocratique et réfléchie de cette relation aux autres qui rend plus ou moins possible la conquète de l'autonomie: le liberté s'éduque et l'éducation est un problème politique. Comme quoi, sans pour autant les confondre, on ne peut séparer l'éthique de la politique.
Cela pourrait signifier que la relation du désir au désir de l'autre ne va pas de soi dans une société qui, dans la forme dominante du marché qui l'anime, confond désir d'objet avec le désir de l'autre comme sujet: voir la pub qui, en permanence, met en scène et en images cette confusion pour vendre les objets comme fétiches du désir de l'autre. Le fétichisme de la marchandise comme modèle du désir amoureux est en échec et pour le coup suscite cette réaction régressive de défense, mis sérieuse, mis ironique (cynique), dont vous parlez: qui consiste à affirmer par bravade: "elle est bonne à consommer!" pour ne pas avoir à affronter la déception amoureuse toujours latente du manque d'amour et tricher avec son propre désir si problématique du désir de l'autre pour ne pas avoir à le subir dans risque de l'échec personnel, car le plus humiliant qui soit, qui est la menace permanente de toute relation amoureuse.
Les autres passent mais parfois nous "marquent", nous bouleversent,  en mettant hors jeu la routine de notre expérience antérieure; en cela ils nous permettent de renaître. Le je est donc l'expérience de notre puissance d'être, c'est à dire de désir et de calcul stratégique pour obtenir la reconnaissance de soi; puissance d'être qui se renouvelle et bricole sur fond de réel; dans la tension singulière entre réalité (ce que nous pouvoir comprendre du réel et du désir des autres) et de fantasme où chacun se met en scène, en dernier ressort,  pour lui-même. En cela ni votre position, ni la mienne, ne me semblent très chrétiennes.
Refusons donc l'amour fusion, le sacrifice, l'abnégation, le sentiment du péché face au désir etc.. qui restent le fond de l'éthique chrétienne du salut. (même si l'âme est incarnée, la chair est définitivement mauvaise car désirante et égoïste, corrompue et corruptrice!)


Le soi ne se vit que dans la relation aux autres; relation de domination, d'honneur, de séduction, de dignité ou d'amour, toujours plus ou moins mélées; car qui ne pense qu'à soi sans médiation de la conscience des autres, ne serait-ce qu'en l'imaginant, ne trouve rien en lui de valorisant, c'est à dire d'heureux. c'est ce qu'on appelle la solitude morale qui conduit à la dépression suicidaire: l'égoïste "exclusif" est suicidaire ou parano (ce qui revient au même): il ne peut être que malheureux à en crever et il est d'autant plus jaloux des autres, ce qui l'enferme dans un cercle infernal. Le soi est une construction relationnelle; qui s'occupe d'enfants et d'adultes en difficultés sociales et psychologiques vous le dira. Si le bonheur est amour de soi (justifié ou non) et si cet amour de soi est universel (toute société fonctionne sur un code de valorisation des individus); on peut raisonnablement supposer qu'il existe une substrat biologique à la conscience de soi qui en est la source. Même le christianisme le plus sacrificiel (en apparence) insiste sur la relation à soi: "aime ton prochain comme toi même"



Contre les Diafiorus de la pensée

Au diable les moralistes-Tartuffe et les Diafoirus de la psychiatrie; déjà, du temps de du Grand Louis, Molière les mettaient dans le même sac: ceux qui exercent une puissance  méprisable prétendant à un pouvoir moral et intellectuel incontestable sur le vie et la mort sur fond de formules culpabilisantes et de pseudo-connaissance charabia. Ils ne s'y sont pas trompés (voir la cabale des dévots au sujet de l'immoralité de Molière)

Décidément entre la poésie et l'humour baroques d'un Lacan, exploitant et détournant avec un grand talent d'esbrouffe des sciences dures pour faire autorité dans un  jeu truqué de la vérité afin de faire s'esbaudir les crédules et de conforter sa stratégie très consciente de pouvoir dans les institutions psychiatriques et les sciences cognitives et neuro-biologiques, un Descartes n'aurait pas hésité; pas plus que son double en comédie: Molière. Certains  jouent aux vierges effarouchées et au faux naïfs, en escamotaqnt qu'il y a aussi un enjeu politique à la philosophie et que les puissants et autres gourous s'exposent toujours au ridicule;  de plus il n'est pas d'autre tactique possible pour dégoufler les fascinantes baudruches et autres faux prophètes. Déjà Socrate.. et Diogène le cynique, vous connaissez? "Je cherche un homme!..."
La philosophie n'est pas une conversation mondaine pas plus que le jeu de la vérité..



Il ne faut pas inverser le sens de la preuve et des relations de pouvoirs qui se jouent dans cette affaire de langage hermétique: Lacan et consorts se sont mis hors jeu de la philosophie dès lors qu'ils font de leur prétendu savoir via l'hermétisme de leur propos et le culte dont ils sont l'objet de la part de petits marquis du champs intellectuel et de l'édition un moyen de leur pouvoir institutionnel dans l'université, aux dépens des règles de la discussion rationnelle qui seules sont libératrices. Bricmal et Sokal n'ont fait que retourner contre eux les moyens de pouvoir qu'ils emploient pour en révéler aux yeux de tous la nocivité; ce qui philosophiquement vaut comme argument c'est de récuser comme manipulateur un certain type de discours occultiste sous des dehors scientifiques frelatés. Il ne s'agit pas d'argumenter dans les formes canoniques de l'éthique rationnelle contre eux car ils ne jouent pas ce jeu là mais un autre: celui de l'irrationalisme rhétorico-mystificateur. Pour les vaincre comme souvent en politique; on ne peut que les battre à leur propre jeu; De très grand philosophes, sans parler de Marx, ont soutenu les luttes historique libératrices, y compris violentes: la philosophie ne consiste pas à se retirer dans une tour d'ivoire philosophique mais de comprendre et de soutenir les luttes politiques qui semblent justes, tout en sachant préserver leur distance critique afin de maintenir vivante les exigences d'un discours dont la vocation et de s'adresser à tous et donc de leur être compréhensible afin que chacun puisse en accepter ou en récuser les énoncés. Pratiquer l'occultisme langagier, c'est refuser l'universel de la pensée critique et donc refuser la philosophie elle-même. La philosophie ne se confond avec le moralisme du politiquement correct et des bons sentiments car elle doit mener un combat permanent contre les illusions qui confortent les pouvoirs liberticides, surtout dans le domaine de la pensée et lorsqu'ils se réclament d'elle. Avec ces moyens propres mais aussi en soutient des autres moyens, lorsqu'ils les premiers sont insuffisants, quitte en en justifier philosophiquement le nécessité.

Rôle et limite de la raison

La raison, comme faculté de mettre de la cohérence dans nos représentation et entre celles-ci et la réalité connue et/ou connaissable, voire possible et souhaitable, à laquelle on ne peut pas ne pas faire référence,  est un instrument qui peut servir les causes les plus contraires (voir la métaphysique) sauf celle de la pure violence physique et verbale dans les échanges idéologiques qui la concernent dans sa recherche de la justesse (croyances raisonnables dans leurs effets sur la vie), sinon de la vérité auquelle je ne crois guère en philo (domaine des sciences). Les problèmes qu'elles formulent parce qu'ils s'attachent aux principes et aux fondements de nos croyances et aux contradictions qui les affectent ne sont jamais neutres, ni politiquement ni éthiquement, et la manière de les formuler engage déjà le type de réponse qu'on peut en produire. C'est dire qu'elle peut tout justifier sauf le refus de penser et de prendre conscience de ce qui nous fait croire et agir. C'est déjà pas mal et exiger plus c'est croire à une mission divine de la philosophie et se référer à une révélation transcendant la raison ce qui ne pourrait que la détourner de sa fonction critique ou la transformer en son contraire: le sermon moralisateur et salvateur. (Voir Pascal à ce sujet)





 

La question du pourquoi et du comment: de l'illusion métaphysique

La question « pourquoi ? » est ambiguë : elle recèle deux sens trop souvent confondus : celle de la cause opérante (ou effectuante) et celle du but intentionnel. Le deuxième sens ne vaut que pour des êtres conscients et actifs qui manifestent des besoins et des désirs visant des fins (plaisir et/ou évitement de la douleur), selon des opérations mentales (conscientes ou non) simulant les actions mises en oeuvres pour les atteindre dans le cadre pragmatique de la relation moyen/fin ; laquelle ne fait qu’exploiter en vue des fins poursuivies les relations de cause à effet réalistes et/ou imaginaires (voir par ailleurs) qui concerne le premier sens du pourquoi. Supposer un pourquoi du monde comme « totalité de ce qui existe » et de la vie comme « totalité cohérente de nos désirs », voire comme désir unique, c’est donc supposer un sens unique spirituel (ou mental) au monde et à la vie et pour le moins un être créateur et/ou transformateur du monde en vue de fins perçues comme bonnes (au moins pour lui si ce n’est pour chacun d’entre nous, voir la théodicée de Leibniz) donateur de ce sens unique (révélation) .

Mais cette supposition ne peut être, en l’absence de preuve objective, qu’une croyance en un dieu « quelconque » transcendant qui a toutes les chances de n’être si l’on en juge par les comportements des croyants (à commencer par la prière) que l’instrument imaginaire et réconfortant de ceux-ci croyant, instrument symbolique collectivement inventé, invoqué et orchestré (à plusieurs on se réconforte mieux) pour faire échec au désespoir vécu comme impuissance radicale de notre désir de bien-vivre (de ne pas mourir ni souffrir). Si l’on voit dans la question du pourquoi du monde et de la vie (ou du monde de la vie) l’origine du sentiment religieux, on peut alors aisément reconnaître (et il s’exprime comme tel en clair dans la plupart des religions) qu’il n’est que l’envers compensateur de notre sentiment d’impuissance face à un monde et dans une vie qui justement n’ont pas de sens, c’est à dire dans lesquels les phénomènes et les évènements ne sont que le résultats d’une part de hasard et de la nécessité mécanique aveugles (dépourvus de finalité mentales et/ou instrumentales) et d’autre part. des actions des vivants poursuivant leur fins propres dans les limites de leur puissance.

Or admettre que le monde et la vie n’ont pas de sens (unique) c’est sortir du tout ou rien de l’oscillation cyclothymique voir maniaco-dépressive entre l’espoir et désespoir qui par le détour du religieux nous maintient dans l’illusion de l’impuissance radicale en nous détournant des seules capacités techniques que nous avons d’agir sur le monde en vue de satisfaire notre désir d’être. Le rouet espoir/désespoir .est donc à défaire avec l’idée d’un Dieu tout puissant donateur de sens et de finalité; une telle cyclothymie religieuse ne peut que redoubler, en nous y enfermant davantage encore, notre impuissance technique actuelle en nous détournant du désir d’en sortir par nos propres moyens, aussi limités soient-ils en nous en remettant à Dieu.

Mais alors, autant croire raisonnablement au hasard sur lequel on peut toujours tenter d’agir avec quelque succès (c’est le rôle de la technique de réduire le hasard autant que faire ce peut) , hasard auquel on ne peut imputer aucune intention et qui par conséquent, nous incite à abandonner la question du pourquoi au profit celle du « comment c’est comme ça » afin d’agir plus efficacement sur le monde et nos conditions de vie et, surtout, sur le plan éthique, la croyance au hasard aveugle ne génère aucun sentiment culpabilité qui ferait paraître le souffrance comme la nécessaire et fatale punition divine de nos péchés et nous met en demeure d’agir par et pour nous-même, nous met en position de sortir de la passivité qui génère le rouet espoir/désespoir.


L'ambiguïté de la valeur du travail.

Le terme de travail est précisément ambivalent: 

1) soit il renvoie à la contrainte naturelle et sociale de produire les moyens de vivre, voire de gagner sa vie en perdant l'autonomie du désir (qui n'est pas indépendance) ou sa mise en condition en vue de finalités profitables à ceux qui disposent des moyens de production et d'échanges et en cela Marx n'est pas dépassé: le capitalisme, aujourd'hui comme hier, est bien un système performant et rationalisé d'exploitation de la force de travail qui inscrit la travail dans le cadre de sa domination par le capital.

2) soit il désigne l'activité humaine en général qui visent à transformer le monde naturel, social et symbolique; activité créatrice de valeur d'usage et d'échange dont tous peuvent croire qu'elle est susceptible de réduire la domination et leur procurer un accroissement appréciable de leur puissance d'agir et d'être dans l'affirmation de la reconnaissance de leur capacité créatrice et de leur initiative (qui définit la visée du désir).

Cette ambiguïté favorise la confusion idéologique, religieuse ou laïque, qui fait du travail une aliénation salutaire ou une "punition salvatrice", c'est à dire un devoir ou un sacrifice valorisant. Laquelle confusion rend possible la légitimation de l'expoloitation elle-même dès lors qu'elle valorise la soumission à ceux qui en profitent au nom de la rationalité économique et de l'extension du seul pouvoir de consommer et de dominer les autres aux dépends du désir d'autonomie.

Cette confusion est donc d'essence anti-libérale, bien qu'elle prétende le contraire.

Mais et c'est là qu'une nouvelle contradiction apparaît aujourd'hui entre les rapports de production et les forces productives: celles-ci sont de moins en moins "dominables" car elles deviennent de plus en plus intellectuelles et relationelles; l'iniative comme moteur de l'innovation devient la source première de la plus-value et elle exige de plus en plus l'autonomie et l'investissement personnel des "travailleurs". D'où la tentative idéologique de renforcer la captation de cet investissement au service du capital par le déploiement sans limite de l'idéologie la la consommation et donc des revenus comme source privilégiée de la reconnaissance personnelle. Ce qui oblige à inscrire le travail dans la finalité du loisir (voir le succès de la RTT chez les cadres et l'importance du problème des retraites); ce qui fait paraître totalement stériles, sinon redicules, les appels du MEDEF à travailler toujours plus et plus longtemps. Sauf à revenir à une conception morale et religieuse de la valeur en soi du travail, mais "la vieille Europe" n'est pas à cet égard l'Amérique du Nord...




De l'universalité de la condition humaine

La conscience de soi et le désir de reconnaissance sont universels (comme le sentiment du mérite, voire de l'honneur et de la honte) , seuls changent ses modalités d'expression symbolique et de valorisation dans le cadre d'environnement culturels et sociaux (donc relationnels) différents. Un indice parmi d'autres? tous les textes de toutes les cultures nous sont, après quelques efforts de traduction-transduction, compréhensibles aux regard des motivations profondes qu'ils mettent en oeuvre. Vous savez, les anciens mythes nous parlent toujours...La modernité n'a fait que décaper et de retravailler dans le sens de l'autonomie personnelle et du souci de soi progressivement dégagé des identifications collectives fortes et des adhérences religieuses traditionnelles, ces motivations subjectives universelles. Mais cela ne va pas s'en remettre en question la problématique de l'identité du sujet en l'ouvrant à la construction de soi par soi dans un contexte lui-même évolutif. Le sujet devient à lui-même un problème dont le solution n'est pas disponible, d'où la nécessité vécue de se représenter aux autres pour être et être distingué en devenir. Nous oscillons toujours entre le désir de se distinguer, voire de provoquer la différence singulière, et celui de nous fondre dans le collectif....

Que des "positions" différentes tentent de liquider ou de nier la conscience de soi pour écarter les contradictions qui l'affectent ne prouvent certainement pas ce que vous dites, à savoir que les individus qui y adhèrent ou s'en réclament n'en ont aucune expérience , au contraire: l'illusion ou de dénégation est l'attitude la plus universellement répendue pour échapper à la souffrance que cette expérience génère : tactique bien connue dite de l'autruche; l'art et la littérature universels sont plus fiables en cela que les philosophies ou prétendue sagesses construites pour réduire les tensions et les conflits du sujet (et du social) en escamotant la réalité vécue derrière des fantasmes positifs (harmonie) ou exagérément négatifs (tragédie).

Je peux comprendre , à l'intérieur de ma propre culture, et vous aussi, les comportements valorisés dans le monde traditionnel: il suffit de les traduire en un contexte différent (transduction): le nôtre, et vous verrez apparaître des correspondances qui semblent aujourd'hui vous échapper entre les motivations ambivalentes que les humains mettent en scène symbolique et rhétorique de manière, en effet, différente (puissance, honneur, amour, prestige, sécurité, autonomie, fusion communautaire) lesquelles mettent toujours en jeu l'ambivalence entre la conscience de soi comme objet de valorisation (même dénié, donc réalisé dans le sacrifice de soi et/ou la négation du soi comme séparé par exemple) et le besoin de sociabilité plus ou moins fusionnel (l'insociable sociabilité de Kant). L'homme est universel et dire que les traditions comme mode de gestion individuelle et collective stabilisé (par le religieux et la dépendance hiérarchique) de ces contradictions du vécu universel ont été plus ou moins détruites, c'est dire qu'elles l'ont été d'abord chez nous avant de l'être chez eux : le monde change et les frontières culturelles (et non pas toutes les différences) s'effacent inexorablement depuis l'origine de l'humanité; l'histoire change les formes de l'universel humain mais ne l'abolit pas où alors montrez moi des humains irréductiblement incapables de se comprendre et de communiquer: se comprendre ne signifie s'aimer car, au fond, on ne deteste jamais tant dans l'autre qu'une part de soi-même que l'on comprend trop bien et que l'on refuse; c'est à dire que l'on refoule et projette sur l'autre...pour éviter d'abandonner des illusions confortables sur soi; le problème est que ce mode de gestion traditionnel des contradictions du vécu suppose des conditions et un monde en voie de disparition, comme vous le dites vous-même, et qu'il est vain, voire dangereux (violences inter-ethniques) de vouloir le faire renaître; l'autorité des traditions est pulverisée, par la mondialisartion des échanges économiques et culturels, par les sciences et les techniques, le pluralisme des valeurs, quant ce n'est pas par l'économie marchande nécessairement individualiste. Là encore la force régit les rapports entre les cultures et ce rapport de force en faveur de l'individualisme liberal est patent dans toutes les sociétés qui cherchent à survivre dans un monde concurrentiel; ce qui ne veut pas dire que la modernité soit sans contradictions, mais que l'on ne pourra les traiter en ressuscitant les cultures, supposées immuables et sans correspondances compréhensibles, du passé.

"Par ailleurs, si le "je" dépend d'une structure collective, c'est cette structure qui le produit"
 

Pas forcément car il ne pas confondre condition nécessaire et consition suffisante:
Il ne suffit pas d'apprendre à parler à un enfant pour qu'il parle, encore faut-il qu'il en ait les capacités neuro-cognitives et l'usage personnel. D'autre part sur le "je": s'il est vrai que la conscience de soi est universelle (on la détecte très tôt chez l'enfant) la conscience de l'autonomie et surtout l'aptitude à la réflexion critique toujours possible dans toute culture (le "je pense" cartésien), y compris traditionnelle, sinon ni Bouddha, ni le Chist n'auraient été possibles, si tant est qu'ils aient existé, est plus favorisée dans la nôtre par l'éducation de moins en moins dogmatique et l'éclatement des sources idéologiques d'information et des valeurs qu'elles mettent en oeuvre qui s'est accompagné de la perte du sens traditionnel du sacré (tabou, indiscutable). Réfléchir c'est penser par soi-même et donc s'affirmer comme un je qui pense, éventuellement contre la pensée dominante. Tous les hommes en sont capables dès lors qu'ils sont dans des conditions libérales et culturelles favorables et qu'ils en voient la nécessité (contradictions vécues fortes entre soi-même et le monde et en soi même) et en ont le courage ainsi que le désir.

On ne peut dire que le sujet est le produit passif de sa culture dès lors qu'il participe à sa production et à son évolution, voire à sa tranformation critique plus ou moins radicale. (Re)Lire le très grand texte de Kant: "Qu'est-ce que les lumières?" Sinon l'évolution culturelle et le rôle des individus dans l'histoire de la culture et des savoirs nous seraient imcompréhensibles. La réflexion n'est collective que si elle met en jeu l'initiative dialoguée des individus, sujets responsables de leurs propos et discours (y compris vous), pas tous nécessairement d'accord entre eux, et que chacun se rend capable de dialoguer raisonnablement avec lui-même. N'est-il pas absurde de concevoir une foule qui pense, en tant que foule?

Le force de la modernité, à mon sens, est d'avoir développé cette capacité rationnelle critique et auto-critique nécessairement individuelle de la conscience de soi, toujours présente dans toute culture mais trop souvent réprimée pour des motifs de contrôle et de domination, contre l'emprise du collectif et de la pensée toute faite des mythologies sacralisées; ce qu'on peut, après les grecs, appeler le logos "dialectique". Je rappelle enfin que notre site s'intitule l'Agora, ce qui n'est pas, me semble-t-il sans incidence sur le thème de notre discussion et son style.


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