Si l'on dit que la
liberté
n'est pas un idée abstraite "absolutisée" mais qu'elle
réside
dans la singularité humaine,
toujours
déterminée
par des déterminations contradictoires, entre lesquelles la
réflexion
aide à faire des choix vis
à vis des possibles
et au regard de nos expériences antérieures personnelles,
j'en suis d'accord; c'est ce que
j'appelle une pratique
de libération. Elle n'est pas une fiction, dès lors
qu'elle
s'incarne dans des projets d'action;
elle est de l'ordre de
la puissance d'agir créatrice.
Mais, là où un désaccord apparaît, c'est sur la source de cette puissance: certains la situent dans une transcendance"spiritualiste", dont je n'ai aucune idée, ni même aucune expérience sensible, alors qu'elle me parait être le désir même, comme désir d'accroitre sa puissance d'agir et de se reconnaître dans ce que l'on fait. Mon argument? le désir d'être heureux - "l'amour de soi" -, chacun peut le vivre (vous y compris) dans l'amour des autres, le désir du pouvoir, le paraître, la consommation, voire la morale la plus altruiste (estime de soi et dignité), et la fiction de sa transcendance spirituelle en vue du salut post-mortem etc.. Je ne dis pas que ces formes soient équivalentes du point du vue du bonheur; mais je dis que ce désir d'être heureux est plus universel que n'importe quelle morale; et d'ailleurs aucune morale ne résiste longtemps contre l'amour de soi, indissociable de la conscience de soi que d'autres appellent l'âme; si ce n'est en l'incluant, sous une forme ou une autre, à son programme.
Les individus qui
n'éprouvent
plus de désir et de plaisir et non plus une conscience
valorisante
d'eux-mêmes, suite
à un accident
neurologique,
ne sont plus capables de se décider (choisir) et d'agir
(aboulie).
Leur liberté d'être
s'est envolée avec
la fiction de leur transcendance, laquelle est éthiquement utile
pour faire que les droits de la
personne dans son (ses)
désir(s) propre(s) soient respectés dans nos
sociétés
dites libérales et individualistes (et
dans les faits capitalistes
et exploiteuse des désirs humains en vue du profit).
Mais soyons lucides: ne
confondons pas une fiction utile avec une vérité, sinon
nous
faisons plus de l'idéologie
édifiante que de
la philosophie (critique).
Quant à la liberté pratique,
elle est pour moi comme pour Spinoza, libre nécessité;
c'est
à dire pouvoir relatif de l'individu d'affirmer son désir
d'être propre dans le monde; ce qui a pour conditions de savoir,
d'une manière
rationnelle, ce qui détermine nos
"affections"
et les conditions pour les transformer en actions; bref connaitre son
(ses) désir(s) pour transformer nos
passions (désirs passifs) en désirs actifs et joyeux. En
cela la liberté pratique
est la capacité d'agir d'une
manière
autonome en vue de la réalisation de notre désir de
puissance
qui n'implique
aucune domination sur les autres au contraire:
le désir de dominer est une passion (Rousseau), joyeuse
à
court terme, triste à long terme car elle limite notre puissance
d'agir, ainsi que la reconnaissance de soi authentique qui exige la
réciprocité
(Hegel).