Pourquoi faudrait-il que la vie ait un sens qui la soumette dans sa totalité? N'est-ce pas cette exigence du sens de la vie qui est insensée? Si la vie est désir d'être et d'agir dans la pluralité mouvante de nos expériences mondaines alors elle ne peut être, dans son rebondissement, que multiplicité de sens et des sens. La mort est la fin du désir de vivre et de toute sensation; elle n'est angoisse que si l'on suppose que le désir de vivre l'outrepasse; laquelle supposition est inadéquate: projection absurde de la vie par delà sa fin même.
Pourquoi réduire le foisonnement créateur du désir au seul désir de se sauver de la certitude de la mort? Nier la mort n'est-ce pas nier la vie en ce qu'elle a de créateur? Qu'avons nous à faire de l'après mort? Notre finitude ne nous concerne qu'en tant quelle nous enjoint de profiter des plaisirs actifs de la vie.
Faut-il désirer
l'absolu,
la soi-disant pureté et et la prétendue perfection
pour donner un sens à sa vie?
Mais le pur absolu est ce
rien,
vide de toute médiation, de toute relation vivante;
l'impensable,
l'innommable; le seul absolu possible est la mort définitive;
désirer
l'absolu c'est désirer la mort; faire de cet absolu le sens de
la
vie, c'est sacrifier Eros à Thanatos.
Paradoxe du sens :
désirer
mourir à la vie du désir dans son infinie
multiplicité
de formes pour être sauvé de la mort. Vertige
mortifiant et mortifère.
S.Reboul, le 21/10/00