Amour et respect des autres, débat sur AV


Sylvain Reboul
On préfère nécessairement ceux que l’on aime aux dépens de ceux qui nous sont indifférents ou que nous n’aimons pas ; l’amour universel ne peut être vécu que comme l’effet d’une révélation mystique divine (ou surnaturelle ou transcendant l’humaine condition) et ne peut s’exprimer qu’aux dépens des proches ("Abandonner tout et d’abord votre famille pour me suivre", exige Jésus) .

Le désir de justice est une construction raisonnable fondé sur le sentiment de la réciprocité dans la reconnaissance que nous désirons tous et celui-ci n’est pas amour mais exigence de respect et de dignité réciproque qui ne va pas sans estime de soi.



> La morale enseignée par des curés à l’école ?
par ka (IP:xxx.x32.30.12) le 16 mars 2008 à 12H58
"l’amour universel ne peut être vécu que comme l’effet d’une révélation mystique divine (ou surnaturelle ou transcendant l’humaine condition) et ne peut s’exprimer qu’aux dépens des proches ("Abandonner tout et d’abord votre famille pour me suivre", exige Jésus) ."

Abandonner ses proches pour vivre l’amour universel ne signifie pas renoncer à l’amour que nous portent nos proches et ne nécessite pas de renoncer à l’amour qu’on leur porte. Si l’amour universel pousse à "abandonner ses proches" il n’est pas forcément vécu par les proches comme un abandon puisque l’amour que portent les proches à celui qui les "abandonne" pour aimer d’autres plus nombreux et peut-être plus nécessiteux, ne saurait être diminué ou affecté par cette idée d’abandon il la dépasse quand les proches sont eux-mêmes convaincus par la force et la nécessité de cet amour universel. On peut imaginer que ce fut le cas pour Jésus et ses appôtres ainsi que pour leurs proches si on est prêt à croire qu’ils ont existé.



Réponse de l'auteur de cet article
> La morale enseignée par des curés à l’école ?
par Mjolnir (IP:xxx.x05.86.130) le 16 mars 2008 à 17H34
Je ne sais pas si l’amour universel est vraiment possible. Universel suppose qu’on y incluerait des personnes comme Adolf Hitler... Quel sens aurait cet amour si on aime n’importe qui ?

La morale exige le respect des autres, l’amour pour tous n’est pas indispensable. L’amour peut entraîner l’injustice, contrairement au respect (cela rejoint les propos de sylvain Reboul je crois)



> La morale enseignée par des curés à l’école ?
par ka (IP:xxx.x32.30.12) le 16 mars 2008 à 21H48

"La morale exige le respect des autres, l’amour pour tous n’est pas indispensable. L’amour peut entraîner l’injustice, contrairement au respect (cela rejoint les propos de sylvain Reboul je crois)"

Oui la morale exige le respect des autres mais on sait bien que dans les faits beaucoup de ceux qui prônent la morale n’y incluent pas forcément la réciprocité: faîtes ce que je dis pas ce que je fais". Oui l’amour pour tous n’est pas indispensable, de toute façon qui est capable d’aimer tout le monde ? Qui peut juger de ce qui est respectueux ou pas ? Ce que l’on considère comme une marque de respect chez nous peut être interprétée comme une offense chez quelqu’un d’autre question de culture. Même si l’on est d’accord sur le fait que la morale et le respect sont indispensables pour vivre en société on sait bien que ces deux notions sont relatives, peut-on dire qu’une chose est bonne ou mauvaise pour tout le monde.


Réponse de l'auteur de cet article
> La morale enseignée par des curés à l’école ?
par Mjolnir (IP:xxx.x05.86.130) le 16 mars 2008 à 22H46
Oui la morale exige le respect des autres mais on sait bien que dans les faits beaucoup de ceux qui prônent la morale n’y incluent pas forcément la réciprocité: faîtes ce que je dis pas ce que je fais".

Les moralistes ne sont pas moraux, c’est précisément ce que je critique chez certains religieux.

A propos du respect, je pense qu’il faut distinguer la manifestation du respect qui est effectivement relative à la culture et le respect qui a un sens universel: ne pas être indifférent ni être méprisant vis à vis de l’existence de l’autre.


> La morale enseignée par des curés à l’école ?
par Sylvain Reboul (IP:xxx.x8.145.159) le 17 mars 2008 à 08H37
Le respect signifie rien d’autre que le devoir de respecter réellement (et là il y a toujours un débat possible) chez les autres les mêmes droits que ceux que je revendique pour moi, dès lors que ces droits sont reconnus dans le droit comme des droits positifs dans le cadre constitutionnel des droits fondamentaux de l’homme et des citoyens. Et cela n’a rien de relatif puisque cela est inscrit objectivement dans le droit.

C’est autre chose que de revendiquer des nouveaux droits ; ce qui est un problème politique et non pas juridique . Je n’ai pas à respecter personnellement un droit , tant que celui-ci n’est pas légalisé, même si j’estime que ce droit est nécessaire à la vie démocratique et à l’intérêt général. Je n’ai, sur le plan personnel, qu’à militer politiquement pour que ce droit soit légalisé, afin de devoir le respecter en conformité avec mes convictions. (ex: droit de vote pour les immigrés étrangers)


Je prends la notion de morale au sens de Kant :

Est action morale une action totalement désintéressée qui consiste à obéir au devoir pour le seul motif que c’est un devoir ou "par devoir"(impératif catégorique). Le devoir moral au sens religieux exige aussi d’obéir par devoir à Dieu à l’encontre même de nos intérêt. En cela la morale kantienne n’est qu’une forme laïcisée de la morale religieuse sacrificielle. C’est pourquoi je distingue morale et éthique.

J’appelle éthique (ou juste) et non pas morale toute action qui obéit à une règle qui rend possible l’intérêt mutuel et/ou général.

J’appelle droit libéral la fixation juridique par décision politique ou citoyenne de règles éthiques conformes aux droits égaux de l’homme et à l’intérêt mutuel et/ou général.

J’appelle intérêt général tout ce qui concoure à la coopération égalitaire entre tous au profit raisonnable de chacun. L’intérêt général s’oppose à la domination (et non pas à la direction) et à l’exploitation de l’homme par l’homme .

Ces distinctions conceptuelles sont tout à fait nécessaires pour penser les normes de l’action et clarifier le débat à leur sujet.

Lire mon article : "Critique de la raison morale"