Le phénomène de la croyance, éléments de réflexion
 

Qu’est-ce que croire ?

Adhérer à une idée pour agir, donner du sens à sa vie et s’identifier en une image valorisée et valorisante de soi dans son rapport au monde et aux autres. Croire n’est pas savoir, quels rapports entre les deux ?

Croire et savoir.

Ne pas confondre les deux:

Croire = admettre une idée sans raison ou preuve suffisantes. (conviction subjective)
Savoir = admettre une idée prouvée objectivement d'une manière suffisante (connaissance objective)

Quels sont les rapports possibles (sensés) entre les deux concepts?

1) Croire que l'on croit = Admettre une idée (ex: l'existence de Dieu) sans en être assuré, sans avoir la foi (certitude subjective absolue) et sans savoir (objectivement) ce que vaut notre croyance.

2) Croire que l'on ne croit pas = Ne pas admettre une idée sans être assuré que l'on a raison de la refuser.

3) Croire que l'on sait = Admettre une idée comme vraie sans preuve objective => illusion

4) Croire que l'on ne sait pas =  Admettre que l'on ne sait pas; douter sans raison claire: doute subi, voire croire qu'il est impossible de savoir = scepticisme impuissant.

5) Savoir que l'on sait = Détenir les preuves objectives suffisante de la vérité de notre savoir.

6) Savoir que l'on ne sait pas = Douter pour mieux savoir (doute fondé volontaire et positif) ou savoir que le savoir est objectivement impossible (scepticisme argumenté volontaire).

7) Savoir que l'on croit = Reconnaître qu'objectivement notre croyance n'est pas prouvée mais que nous en avons subjectivement besoin.

8) Savoir que l'on ne croit pas = Ne pas admettre une idée pour de bonne(s) raison(s).

9) Ne pas croire que l'on sait = Refuser une idée que l'on sait être démontrée (délire).

10) Ne pas croire que l'on ne sait pas = Croire que l'on sait ou confondre croire et savoir ( illusion; cf. plus haut)

11) Ne pas savoir que l'on sait = Absurde car contradictoire.

12) Ne pas savoir que l'on ne sait pas = Croire savoir que l'on sait ou croire que l'on sait (illusion).

Conclusion: On a toujours le droit de croire, à condition que l'on évite l'illusion de croire que l'on sait; c'est à dire que l'on sache que l'on croit.
Pour savoir, il vaut toujours mieux savoir que l'on ne sait pas, que croire que l'on sait; quant à savoir que l'on sait; cela engage la question philosophique de la vérité, de ses conditions, de ses critères et des limites de ceux-ci.
Ex : Croire dans l’avenir ; croire dans la médecine, croire en Dieu, croire dans l’égalité entre les hommes et les femmes.
 
En quoi croit-on ?

=> Croyances réalistes
 
=> Croyances normatives et prescriptives
 
=>Croyances mixtes et métaphysiques

Croyances réalistes : Objet intemporel (ex : tout homme est mortel) ; objet passé (ex : « L’homme descend des primates qui l’ont précédé dans l ‘évolution ») ; objet présent (ex : « La France est aujourd’hui bien ou mal dirigée ») ; objet futur (ex : « Grace à la biologie génétique, les hommes pourront devenir immortels » ou « le cat 40 va monter »)
Croyances normatives : Ethiques personnelles (ex : Je crois à l’amour entre les hommes) ; politiques collectives
(ex : Les hommes ont les mêmes droits fondamentaux)
Croyances mixtes et métaphysiques :  à la fois  réalistes et normatives portant sur une réalité transcendante
(ex : « Dieu existe pour nous sauver » ; « l’homme est libre »)

Pourquoi croit-on ?

=>Preuves ou indices objectifs
=>Influences mimétiques
=>Espérances et désirs collectifs et personnels

Dans quels buts croit-on ?

=> Se rassurer en conjurant l’angoisse engendré par le doute et l’hésitation permanente
=> Prévoir et agir avec confiance en soi et dans le succés
=> S’identifier au groupe pour s’y sentir reconnu et soutenu
=> Se donner et vivre des projets autovalorisants

Dans quelles limites croit-on ?

=> Aucune : foi aveugle et irrationnelle :=> illusion =>désillusion ; échec et violence)
=> Limites de la raison et de l’expérience :ajustement de nos désirs et fantasmes avec ce qui est réellement souhaitable et possible. croyances plurielles et pragmatiques, variables et relatives selon les jeux sociaux)

Rôle de la philosophie vis-à-vis des croyances ?

=> Fonder et justifier les croyances sur des bases plus rationnelles, position métaphysique (ex : Platon, Descartes, Kant en morale)
=> Déconstruire les croyances pour s’en libérer et libérer la pensée et l’action en vue de l’autonomie et du du bien-vivre => accroître sa puissance d’être et d’agir ici-bas, position critique (ex : Epicure et Spinoza)

S.Reboul, le 12/09/99 



Philosophie et croyances
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