Morale et politique sont-elles conciliables?

La politique n'est pas la morale dès lors que celle-là met en jeu l'exercice d'un pouvoir sur les autres et que celle-ci ne concerne que le pouvoir que chacun exerce sur ses propres désirs en vue de bien (mieux) vivre avec les autres et avec soi, plus librement et plus solidairement.

L'action  politique est donc toujours insérée dans un rapport des forces et un contexte de circonstances pratiques  en vue d'un  résultat:    la souveraineté du ou des dirigeants en vue d'établir la paix civile et cela leur interdit de considérer que  les fins morales dont, dans le meilleurs des cas ils  se réclament  (liberté égalité et solidarité), soient immédiatement applicables comme moyens, sinon comme fin, de leurs actions.

De cette différence découle un divorce irréductible entre entre la justice comme idéal de moralisation toujours discutable de la vie politique dès lors que les valeurs fondamentales de la morale publique (liberté, égalité, solidarité) ne sont pas homogènes ni spontanément compatibles et  la politique qui ne peut que contraindre à se soumettre à des règles communes et à ceux qui disposent de pouvoir de contrainte, à savoir de l'état.

 Les dirigeants de l'état , qui a défaut de faire que la justice soit forte sont, du point de vue de leur intérêt de pouvoir, seulement susceptible de faire que leur force soit moins injuste et  que la paix civile soient bénéfique au plus grand nombre sinon à tous, d'où la nécessité de faire en sorte que les dirigés choisissent librement leur dirigeants.

C'est là qu'intervient l'invention d'une démocratie d'opinion et de l'égalité des droits fondamentaux . La démocratie en effet, au nom des droits de l'homme et du citoyens, doit toujours combattre la propension de la politique à devenir immorale, du fait du désir de tout homme politique à s'abandonner à la jouissance du pouvoir pour le pouvoir ; ce qui s'appelle l'ambition qui
 est toujours, en tant que telle, amorale, voire immorale.

Le rôle donc de la démocratie est de limiter le pouvoir des dirigeants par le contre-pouvoir de l'opinion éclairée par le débat sur la valeur des convictions  pour combattre les abus de leur pouvoir et les contraindre à mettre en oeuvre une paix plus juste car plus solidaire et cela  du point de vue même de leur intérêt de pouvoir.

 Il ne s'agit alors pas de réconciliation entre la morale et la politique mais seulement de leur conflit pacifié au bénéfice de ce que Spinoza nomme la concorde sociale qui est plus que la paix civile.

SR, le 07/06/2010

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