La guerre contre l'Irak, un autre
moyen
de faire de la politique sans en faire?
Que les choses soient dites d'emblée pour éviter un
malentendu
et une mauvaise querelle: l'élimination de Saddam Hussein
et
de son régime sont des buts parfaitement légitimes au
regard
des crimes contre l'humanité dont il se sont rendu coupables;
mais
il est nécessaire de poser sur 3 questions pour
évaluer
les chances de succès politique d'une guerre annoncée,
à
savoir: À quel prix pour les populations cette
élimination
peut-elle être acceptée ? quels en sont les
buts
politiques pour l'après guerre? la paix au moyen-orient et
la
lutte contre le terrorisme peuvent s'en trouveront-elles
facilitées?
1) Plus la population y consentira plus rapide sera la
guerre
et moins le prix à payer sera lourd et à condition que
les
moyens utilisés fassent le partage entre les forces militaires
et
les civils, le pari de cette guerre sera gagné.
Or plusieurs facteurs paraissent faire obstacle à ce
scénario:
la population civile, victime de l'embargo assimile le gouvernement des
USA
à des ennemis; ses réactions, si elles ne sont pas dues
à
la peur du régime pourraient, en l'absence d'alternative
politique
irakienne crédible, la conduire à se solidariser, au
moins
au début avec le régime, en retardant la victoire
militaire
ou en la fragilisant. Le probléme est donc que personne ne s'est
vraiment
intéressé à elle avant cette deuxième
guerre;
pire, les chites encouragés à la révolte,
après
la guerre du golfe ont été lachés par le
gouvernement
des USA qui a permis à Hussein de mater la révolte.
2) En l'absence d'une solution politique post-guerre interne rapide,
que
les USA ne souhaitent peut-être pas tant que cela, le
gouvernement
des Etats-Unis et ses plus directs conseillers se proposent d'occuper
et
d'administrer l'Irak pour, à partir de là,
recomposer,
le Moyen-Orient et vaincre le terrorisme et ses soutiens, y compris en
Arabie
Saoudite, en imposant partout des régimes démocratiques
à
leur manière , de favoriser la paix entre Israèl et
les
palestiniens.en jouant sur leur présence protectrice et enfin de
renforçer
leur maîtrise des ressources pétrolières.
Mais
autant dire que ces buts débordent ceux qui relèvent du
conseil
de sécurité de l'ONU; ce qui, là encore, place
cette
guerre dans un cadre dont la légitimité politique en
terme
de droit international reste problématique.
3) Or cette légitimité est nécessaire pour
faire
que cette guerre n'apparaissent pas aux yeux des populations
défavorisées
de la région et du monde comme une guerre impériale,
voire
une néo-croisade inter-culturelle; c'est dire que le danger
terroriste,
dont le lien avec le régime iraquien n'est pas
démontré,
risque fort de s'aggraver, si la guerre perdure sans solution politique
interne
robuste faisant place à une paix juste au Moyen-Orient et
prenant
en compte la réduction des inégalités.
Le guerre peut être un moyen de débloquer une situation
politique
verrouillée par des régimes dictatoriaux et criminels ,
mais
encore faut-il s'en donner les conditions politiques et légales,
et
viser des buts qui font de la guerre un guerre pour la paix et la
liberté
et non pour la domination; ce qui est très loin de sembler
être
le cas pour la majorité des populations du monde, qui même
aux
USA, n'est pas prète à soutenir une guerre dont les
enjeux
paraissent soit flous soit suspects.
S. Reboul, le 03/02/03