Ecole et éducation
Je ne vois pas, sauf , diront certains à
tord, en mathématiques , car il y faut apprendre la contrainte de la
preuve de vérité et le refus de la tricherie, comment un
enseignement ne serait pas une éducation (ce que veut dire
instruire, à savoir "élever au dessus de soi-même et de sa
famille")citoyenne.
Ne serait-ce que la valeur de l'égalité
face au savoir, principe, en partie mythique, sur lequel est fondé
l'école démocratique qui prône la mobilité sociale.
De plus, La valeur de la laïcité, la tolérance, comme le refus du racisme du sexisme et de l'homophobie ne s'apprennent pas nécessairement en famille, c'est pourquoi l'état républicain à le devoir d'élever les enfants hors des fausses croyances et des préjugés, religieux ou no, sur tous les plans qui concernent la vie ensemble hors de l'étroit cercle familial.
Sinon, qui peut le faire?
Quelles doivent être les valeurs d'une école qui se veut laïque?
Les valeurs de la rationalité critique (et il n'y a pas de savoir,
même scolaire sans réflexion critique) et de la tolérance. Or, dès
lors que l'intolérance doit être déconstruite, il faut faire du
conflit des valeurs un enjeu éducatif à l'école, ce que cherche à
faire l'ABC de l'éducation. Que cela ne plaise pas à tout le monde
et surtout pas aux fanatiques et traditionalistes de tous bords est
non pas seulement normal, mais nécessaire à l'éducation à la
tolérance et à la liberté des futurs citoyens que sont les élèves.
1) Le conflit des valeurs est nécessaire à l'éducation de la
liberté.
C'est bien à l'école laïque de le mettre en scène pédagogique. Si elle ne le faisait pas, pour faire plaisir aux fanatismes de tous bords, elle ne pourrait même plus enseigner quoi que ce soit (même pas la langage qui est tout sauf neutre, on le voit en ce qui concerne les stéréotypes sexuels). Parler de liberté c'est parler d'abord de celle des enfants qu'il ne faut surtout pas confiner dans les préjugés de leur milieu familial, social, générationnel ou médiatique. L'école seule peut faire ce travail. Aucune autre institution, la famille encore moins que toute autre, ne peut seule éduquer à la réflexion crique, y compris et surtout dans le domaine des valeurs. Ne pas le faire c'est laisser libre cour aux enfermements idéologiques et communautaristes et donc, à terme, aux croyances et aux fanatismes les plus irrationnels, générateurs de guerres civiles plus ou moins violentes et plus ou moins ouvertes et/ou latentes. En cela les enfants n'appartiennent ni à la famille, ni à l'école, ni à l'état, mais doivent apprendre à s' appartenir à eux-même.
2) Le rôle éducatif de l'école est indispensable.
Le rôle éducatif et non pas seulement d'enseignement est une constante dans toutes les sociétés du monde pour deux raisons simples: il n' y a pas d'enseignement des savoirs sans formation intellectuelle et éthique de la vérité rationnelle et critique. Dans une société démocratique et pluraliste, il n'y a pas de citoyenneté sans apprentissage des règles de l'argumentation et de la tolérance critiques. Dans une société libérale, il n'y a pas d'école libératrice sans apprentissage de l'usage des libertés et donc du respect des autres différents de soi. La seule question est de savoir selon quelles valeurs rationnelles et critiques, y compris sur le plan éthique et politique, et comment faut-il que l'école laïque éduque les enfants à leur liberté de penser, fondement de toute liberté individuelle.
La liberté la tolérance et le respect des autres ne sont pas
des valeurs innées, c'est bien plutôt le mépris, la discrimination
et la violence qui sont des comportements spontanés pour des motifs
narcissiques parfaitement connus (« Vive moi, à bas les autres!
Tout est à moi, tant pis pour les autres ! Ce qui est à moi est à
moi, ce qui est à toi est « négociable » !»). L'éducation
publique dans une société pluraliste et laïque et non pas
seulement l'éducation familiale qui peut parfois et même souvent
enfermer l'enfant dans des normes hiérarchiques établies, par
exemple entre les genres, se doit de promouvoir dès le plus jeune
âge ces valeurs. C'est ce que refusent tous ceux qui cherchent à
établir des régimes théocratiques et/ou politico-religieux.
La contestation de la prétendue théorie des genres n'est, dans
ces conditions, rien d'autre que l'expression du refus de l'égalité
entre les filles et les garçons entre les hommes et les femmes. La
résistance réactionnaire de ceux qui ont participé à la manif
dite paradoxalement pour tous n'est donc pas le fait d'un malentendu
mais d'un désir par certains de maintenir un système sexiste de
domination dont l'origine est consciemment ou non traditionnel et
religieux.
C'est un des points essentiels de la mission de l'école mixte et
laïque de développer l'éducation à la valeur de l'égalité dans
l'exercice des libertés civiques et privées dont celui de
l'égalité des droits réels entre les hommes et les femmes. Le
refus de l'éducation citoyenne par l'école de la liberté et de
l'égalité est donc au fond l'expression d'un refus de la société
démocratique laïque et pluraliste au nom de valeurs hiérarchiques
théocratiques intangibles, contraire aux valeurs républicaines .