L’argent est fin et moyen des échanges, il est l’objet de nos désirs personnels et le fruit de notre croyances collective dans sa valeur d’équivalent général de toute valeur marchande. Toute valeur tend, par la puissance de cette équivalence même et par la généralisation des échanges marchands comme unique forme quantifiable de la réciprocité, à devenir telle. Cette croyance institutionnalisée est soumise, en économie libérale à la loi de l’offre et de la demande ; la quantité et la valeur relative de la monnaie dépend donc de l’opinion collectivement produite par le jeu des échange et est certifiée par les institutions monétaires (banques centrales) plus ou moins dépendantes et/ou autonomes des institutions politiques.
Ainsi par la forme collective, anonyme et abstraite de sa valeur, la monnaie transcende les désirs individuels et, comme Dieu unifiant son peuple de fidèles, l’argent impose ses règles et ses enjeux à tous les partenaires des échanges afin que chacun puisse espérer voir ses désirs reconnus et ses efforts dans l’échange de biens et de services justement récompensés. Mais, de ce fait, cette croyance, au contraire de la croyance religieuse traditionnelle, brise la communauté fusionnelle car sa transcendance est indéfiniment manipulable par les désirs multiples voire contradictoires de chacun sans que cela n’entraîne, nécessairement, de violence autodestructrice : la communauté solidaire laisse la place à le société individualiste plus ou moins pacifiquement auto-régulée. Dieu n’est plus indispensable (sauf à titre de référent purement symbolique : voir le dollar), pour préserver ici-bas le jeu des échanges, la religion tend à devenir une assurance voire une thérapie symbolique parmi d’autres ; bref, une affaire privée ou familiale en vue de la préservation de son identité particulière individuelle et collective ; mais de plus en plus difficilement sociale et/ou politique : les individus savent qu’ils ont à vivre, à travailler et à échanger avec d’autres qui peuvent être opposés à leurs croyances autres que monétaires et que celles-ci ne reposent que sur des expériences subjectives et imaginaires sans contenu rationnel objectivement universalisable ; la preuve de la véracité de leur croyance est soit impossible soit immédiatement contestable par tel ou tel de leur proche.
L’argent comme valeur universelle dominante car seule objectivable
produit
donc
- La possibilité de s’entendre sur des intérêts
rationnellement mutualisés sur fond de réciprocité
mesurable,
-Le reflux du religieux dans le sphère privée
- Le développement de l’égoïsme rationnel
généralisé
aux dépens des solidarité automatiques des
sociétés
communautaires traditionnelles plus ou moins fermés.
Cette opposition entre Dieu et l’argent ne va pas sans résistances et recherche de compromis problématiques à travers les contradictions récurrentes entre existence privée et vie publique, entre communautés particulières et sociétés globales en voie de mondialisation des échanges économiques culturels et humains. Comprendre ces contradictions et les stratégies des acteurs sociaux pour les traiter (bien ou mal) est aujourd’hui une tache prioritaire pour qui veut participer positivement aux évolutions brutales en cours et échapper `la tentation illusoire et mortelle d’un statut quo miné par le risque de la violence identitaire et a fortiori du retour fantasmatique et illusoire à la communauté liberticide perdue.
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1) Argent et religion
Dans la société laïque, lorsque se développent les rapports d’argent, tout peut devenir marchandise : les biens extérieurs, les services, la force de travail donc le corps et l’esprit indissociables : on peut comme on dit en Afrique " faire boutique avec son cul ". Il est alors difficile, selon St Mathieu de servir à la foi Dieu (don de soi) et l’argent (vente de soi ou de ses biens pour acheter ou louer les biens et les services, et la personne des autres) ; cette contradiction égoïsme/solidarité est poussée à son comble par les religions communautaristes : La solidarité inconditionnelle exigée y considérée comme incompatible avec l’appât individuel du gain. Inversement, l’argent et la loi du profit pour soi ne s’affirment que par la destruction des relations symbolico-religieuses traditionnelles et ont tôt fait de substituer à la religion la vague religiosité sentimentale dans laquelle chacun peut y mettre ses propres rêveries et son désir, personnel dans ses bricolages fantasmatiques, de consolation face à la mort et à la souffrance. Le syncrétisme in/différencié met alors en cause l’unité et l’autorité de la religion en tant que ciment social et fondement de l’autorité morale et politique, A chacun ses intérêts économiques et spirituels ! Le Dieu pour tous n’est plus qu’une abstraction qui n’engage pas vis-à-vis des autres et n’exige rien de soi sinon ce que l’on se commande à soi-même pour soi-même (ne serait-ce que pour se donner bonne conscience !). " L’ athéisme " comme refus de soumettre la société et de se soumettre soi-même à la prétendue Vérité divine est permis, voire, à travers le principe de la laïcité, revendiqué comme un fondement de la vie politique et de l’éducation civique des individus/citoyens. Ainsi la stratégie efficace de l’argent est, dans le meilleurs des cas, celle du donnant/donnant qui se réclame de l’autonomie individuelle alors que la logique plus ou moins (ir)rationnelle de la religion s’affirme (apparemment) dans la valeur du don gratuit, l’allégeance personnelle au groupe et au supérieur religieux et/ou politique et l’identification fusionnelle à la communauté et à ses chefs. L’opposition entre les logiques et les stratégies devient proprement déroutante et, dès lors que la tentation de l’absolu reste vivace (par l’effet de la confusion psychologique illusoire sans cesse renaissante entre nos désir et la réalité), cette opposition engendre angoisse personnelle et conflit idéologiques collectifs. Mais l’affirmation du primat de l’individu qu’a rendu possible la victoire de l’argent comme régulateur de la vie sociale (sinon politique) a aussi permis le développement de la liberté individuelles et de la démocratie modernes contre les sociétés religieuses traditionnelles, comme tous les théoriciens moralistes du libéralisme nous le rappellent avec raison.
Or si cette ambivalence et cette opposition sont mal vécues (croyances naïves dues à une éducation traditionnelle peu philosophique, peur de l’autonomie et de la relative solitude qui en est le prix...) la tentation est grande d’y échapper par d’illusoires (irrationnels) compromis symboliques et pratiques.
La première stratégie est de constituer une secte qui
refuse la modernité jugée pervertie et pervertissante, en
interne sinon en externe, pour reconstituer la communauté sans
rapport
d’argent ; elle exige de ses membres un dévouement
ritualisé
indéfectible, elle se protège contre les influences
extérieures
par des pratiques ségrégatives violentes contre les
traîtres
et ceux qui prétendraient changer les rapports en les
individualisant
; sous couvert de liberté religieuse, elle impose une
idéologie
totalitaire et un contrôle incessant sur les comportements en
utilisant
la menace de l’exclusion desidentifiante ; elle provoque l’angoisse de
la déréliction afin de s’assurer l’obéissance
consentie
des sectateurs qu’elle prétend protéger contre les autres
et surtout contre leur propre angoisse de vivre et de mourir. (amisch)
Cette tentative n’a de chance de survivre que lorsque est maintenue
une distance, un isolement politique et géographique dans un
contexte
relativement favorable à ces pratiques sectaires tel que celui
créé
par la conception multicommunautariste Nord-américaine . Mais si
le contexte extérieur reste dominé par les rapports
d’argent
et l’individualisme qu’ils engendrent nécessairement , la
violence
extrême, au moins symbolique, est la seule manière de
faire
fonctionner la secte sous le pouvoir quasi absolu d’un chef ou d’un
groupe
de prêtres charismatiques investis d’une puissance surhumaine.
Mais l’expérience de cette violence est et devient incompatible
avec les fondements du droit de la société moderne et ses
modes d’existence ; ces sectes, sans cesse menacées, sont
alors tentées, soit par le terrorisme pour éradiquer le
mal
de ce monde absolument corrompu , soit par la mort collective
présentée
comme la coupure salvatrice radicale avec celui-ci, ou les deux.
Une deuxième tentative de pratique sectaire est d’invertir
l’argent
d’un pouvoir religieux unifiant la communauté pour un projet de
conquête des positions de pouvoir dans la société
civileen
vue de la réussite sociale de ses membres par le
développement
de leur puissance individuelles d’être et d’agir, collectivement
organisée sur un mode idéologique totalitaire
(scientologie).
L’argent pompé par et sur les membres inférieurs est
l’expression
même de la supériorité du groupe et de ses membres
; la religion n’est, en interne, qu’un adjuvant symbolique
bricolé
d’une manière infantile pour abuser les naïfs , en externe
une couverture de la volonté dominatrice élitaire de ses
chefs. Les membres doivent couper tous les autre liens privées
hors
ceux autorisés et contrôlés par la secte en vue de
son intérêt de puissance et de la conversion de futurs
adeptes
qui s’opère par la manipulation psychothérapeutique
présentée
comme la condition indispensable à leur réussite
individuelle
dans un monde où les mieux psychologiquement armés
doivent
l’emporté sur les autres. Elles exploitent pour cela les
difficultés
psychoaffectives que l’individualisme compétitif provoque en se
présentant comme seule capable de produire le lien communautaire
qui manque à la réussite personnelle de ses futurs
adeptes.
Ce genre de sectes tentent de pénétrer prioritairement
les
couches sociales disposant du pouvoir économique politique et
symbolique,
mais n’hésitent pas à convertir la piétaille des
défavorisés
pour l’utiliser comme main d’oeuvre gratuite.
Mais cette tentative plus subtile car mieux adaptée au monde
de l’argent que la précédente est elle-même victime
de la puissance individualisante que celui-ci recèle : les chefs
ne tardent pas à s’opposer entre eux pour
bénéficier
de la puissance économique et politique du groupe ; la secte
implose
en une variété de fractions, de sous sectes
entredestructrices.
(processus accéléré par la mort naturelle ou non
du
gourou fondateur).
Une troisième tentative de compromis entre l’argent et la
religion
moins extrême, plus courante et partant plus efficace est
d’autonomiser,
quant à leurs règles de fonctionnement la vie familiale
et
la vie économique estérieure. Celle-ci sera
dominée
par la recherche du profit privé sans souci de solidarité
publique alors que celle-là affirmera les valeurs
traditionnelles
comme indispensable à la pérennité des liens
familiaux.
La solidarité familiale définit comme une valeur
fondamentale
exige le maintien prioritaire, le développement et la
transmission
du patrimoine économique et culturel. Cela impose le strict
respect
des engagements matrimoniaux et donc la fidélité sexuelle
absolue soumise à une éthique autoritaire transcendante .
Une telle fidélité n’est, en effet, possible que si sont
maintenus, à l’intérieur de la vie familiale, les
contraintes
et les interdits religieux autoritaires qui n’ont plus cour dans la
société
extérieure (contrôle du libre choix du conjoint,
criminalisation
de l’adultère, de la contraception de l’avortement, homophobie,
etc..).
Le problème de cette stratégie est le suivant : comment
utiliser l’égoïsme engendré par la loi du profit au
service de la famille fusionnelle traditionnelle laquelle
apparaît
comme une condition de la réussite sociale et économique
? La réponse est liée nécessairement à la
question
de la sexualité car le plus grand danger à
l’intérieur
de la famille autoritaire traditionnelle n’est pas le liberté
économique
( les échanges marchands y sont l’exception) ,mais l’autonomie
sexuelle
qui autoriserait chacun à revendiquer son droit à
s’accoupler
et à engendrer comme il l’entend sans soucis de la
préservation
du lien familial prioritaire. Le libéralisme économique
ambiant
ajouté au laxisme sexuel interne auraient alors tôt fait
de
détruire la famille traditionnelle. C’est pourquoi le
puritanisme
dans certains milieux est si porté et si porteur car la
contradiction
entre l’argent et la religion est déplacée au profit de
celle
entre la religion et le sexe ; celui-ci devient d’autant plus dangereux
qu’il permet à l’égoïsme extérieur de
pénétrer
à l’intérieur de la famille : il est l’ennemi intime de
toute
solidarité familiale religieuse fusionnelle traditionnelle dans
une société dominée par l’argent et qui a, de ce
fait,
perdu le sens de la communauté primitive. Cela est vrai dans les
milieux populaires menacés par les contradictions
économiques
et dans certains milieux nantis qui entendent préserver, voire
autojustifier
leurs privilèges,
Or la loi de la société marchande développée est de manipuler le désir sexuel des individus pour accroître la demande à l’infini et pour cela elle doit, par la publicité, pénétrer au plus intime des désirs sexuels en les individualisant c’est-à-dire en les soumettant directement au désir narcissique individuel exacerbé par des représentations érotiques individuelles efficaces de soi. La pub s’attaque en permanence et dévalorise la famille traditionnelle (voire les institutions chargées de l’éducation) jusqu’à prendre les enfant et les jeunes comme sa cible privilégiée afin qu’ils exercent sur leurs parents et les adultes un chantage affectif permanent à la modernité consommatrice de plaisirs narcissiques marchants indéfiniment consommables. Dans ces conditions le modèle familial traditionnel ne peut résister à la télévision commerciale, la musique sensuelle, voire pulsionnelle, les copains, la mode et l’idéologie hédoniste dominante de la consommation. Les parents qui voudraient maintenir les valeurs religieuses traditionnelles sont vite " largués " à mois de transformer la famille en secte et le père en gourou: : Noël est le fête des cadeaux exigés dans le réciprocité de la reconnaissance et du plaisir partagé ; le sens et les signes religieux ne sont qu’un décor dont l’archaïsme kitsch favorise le commerce en offrant une légitimité de façade à la consommation des biens. La religion n’est plus qu’une affaire privée à la disposition plus ou moins conformiste des individus consommateurs de plaisirs et de reconnaissance narcissiques. La famille alors change de fonction principale : de lieu de la trans-mission de valeurs pérennes instituant une autorité transcendante indiscutable et modelant les comportements et les choix individuels elle devient le regroupement plus ou moins contraints de partenaires liés par contrat tacite et révisable dont l’objectif est d’optimiser les échanges affectifs et sensuels de moins en moins structurés et intellectualisés en vue d’une meilleure intégration sociale. Tout se négocie : les conventions, les finalités, les rituels, les moyens. L’amour des siens ne s’impose pas ; il est vécu comme le prolongement de l’amour de soi. La famille est souvent perçue comme le dernier refuge plus ou moins provisoire face aux difficultés et aux contrariétés de l’existence personnelle.
C’est ainsi que la religion traditionnelle a, dans nos
sociétés,
laissée la place à de vagues et syncrétiques
croyances,
laissées à la libre disposition des individus, dont la
finalité
est d’offrir un exutoire au besoin de rêver sa vie ; la
réalité
de celle-ci se joue ailleurs : dans la poursuite de
l’intérêt
et du bonheur personnels plus ou moins régulée par le
droit
fondé sur la seule exigence de réciprocité
à
l’exclusion de tout salut transcendant et par des conventions en
évolution
permanente.
L’argent, et l’économie de marché, responsables du
développement
de l’idée d’intérêt et de bonheur personnels
individualisés,
ont disqualifié la question du sens transcendant et par
là
unifié et unifiant de la vie ; et avec elle, le besoin religieux
traditionnel. A vouloir le restaurer on serait nécessairement
conduit
à poursuivre un projet sectaire, totalitaire, liberticide et
violent.
L’éthique du bonheur doit alors remplacer la morale du devoir.
Il
convient d’essayer d’en formuler les orientations principales à
partir d’une critique de(s) morale(s) autoritaires et sacrificielles.
_______________________________
2) Argent et éthique.
L’argent et les rapports qu’il rend possible, voire
nécessaire,
sont sensés tout corrompre dès lors qu’ils substituent
l’intérêt
égoïste au don de soi, le calcul au dévouement, la
quantité
à la qualité, la relativité plurielle et mouvante
des désirs individuels à la permanence immuable des
convictions
collectives. Mais il suffit de considérer la plupart des
rapports
non-marchands traditionnels pour voir que ceux-ci, bien que plus
chaleureux,
sont aussi plus contraignants par l’exigence de répondre aux
devoirs
vis-à-vis des autres qu’ils impliquent. Ainsi, au nom de la
liberté
individuelle qu’ils recèlent, les rapports commandés par
le profit détruiraient toutes les autres valeurs solidaires.
Cette
critique est juste du point de vue traditionnel et de la morale du
devoir
et de l’allégeance mais elle perd en partie de sa pertinence
dans
une société qui fait de l’autonomie de la personne son
principe
fondamental : on ne peut pas vouloir à la fois la liberté
individuelle et la soumission à des devoirs transcendants
à
valeur collective et indiscutable. Remarquons d’ailleurs qu’une morale
du devoir contraignante, soit s’applique à un groupe
particulier
fusionnel contre d’autres (esprit tribal), soit se veut universelle
(humanisme
idéaliste rationalisé) mais sont alors inapplicables car
la solidarité ne peut être sans priorité ni
sélection
: nul n’a le pouvoir divin de sauver tous les hommes ! La
liberté
des modernes est relativement universalisable sans contradiction parce
qu’elle fait droit à l’aspiration individuelle au bonheur par et
pour soi et donc à l’intérêt et au plaisir
narcissique.
par delà les frontières et les clivages; ce qui ne va pas
sans conflits mais ce qui exige des régulations conventionnelles
ou légales pragmatiques, évolutives selon des
procédures
démocratique mettant en jeu les opinions du moment (cf.
l’avortement,
le PACS et le clonage humain). Nul n’a plus le droit au nom de ses
convictions
absolues religieuse ou morales d’exiger que les autres s’y soumettent,
sauf à les convaincre pour un temps toujours limité que
cela
va, pour la majorité d’entre eux, dans leur intérêt
ou leur personnelle recherche du bonheur. C’est cette loi de la
démocratie
: chacun pour soi et la majorité pour tous que toute les
idéologies
transcendantalistes qu’elles soient religieuses ou rationalistes
républicaines
ont du mal à accepter ; or elle est la seule source aujourd’hui
partageable de légitimité de l’autorité politique
sauf à revenir à l’Etat-église ou l’Etat-parti et
à la société ethnique monolithique et fusionnelle
ou à la société bureaucratique totalitaire. Le
libéralisme
politique et économique dans nos société est
irréversible,
sauf par un retour mythique en arrière dont les
conséquence
pour les droits individuels seraient catastrophiques. Cela ne veut pas
dire qu’il ne faille réduire et réguler ses excès
au profit de la mise en oeuvre réelle et non seulement formelle
du droit universel à la recherche du bonheur qui est au
fondement
du libéralisme, nous y reviendrons. Il y a bien ici un droit
universel
mais il est immanent à l’expression des désirs humains
dans
l’espace public qu’il soit économique (marché et
état
distributeur) ou politique (démocratie représentative) et
donc toujours problématique puisque son contenu de règles
et de finalité prioritaires n’est pas fixé par une
quelconque
autorité supérieure mais fait toujours l’objet d’un
dissensus
organisé et favorisé en tant que condition même de
la démocratie.
Les convictions morales sont rationnellement indécidables pour
la simple est bonne raison qu’on peut toujours préférer
telle
valeur prioritaires à telle autres par exemple la
solidarité
précontrainte à l’affirmation de son moi qu’implique
l’idée
de l’autonomie individuelle ou la sécurité du conformisme
au besoin critique et au changement créateur de nouvelles
valeurs.
Les valeurs concrètes ne sont pas des connaissances mais des
stratégies
en vue du bonheur et de la conception ou vision que l’ont en a. A ce
sujet,
en l’absence de religion ou de philosophie obligatoire, toute tentative
aujourd’hui de mettre d’accord les hommes et les femmes entre eux est
une
illusion dangereuse et vouée à l’échec. La seule
chose
qui puisse faire l’accord, en droit sinon en fait, c’est de
reconnaître
cette diversité et de l’organiser par la démocratie et le
négociation.
Revenons après ce détour théorique dont elle
découle
à la question du rapport de l’argent et de l’éthique pour
en tirer les conséquences, les limites ainsi que les
régulations
nécessaires dans une société libérale qui
n’est
pas à l’abri de dérives autodestructrices
Les rapports d’argent exigent, pour que le jeu des échanges
soit crédible et donc possible car jouable en vue de
l’intérêt
de chacun, que personne ne se sente escroqué ou violenté
par son ou ses partenaires ce qui implique plusieurs règles du
jeu
qui sont :
1) Le renoncement au recours à la violence pour traiter
des désaccord et des conflits d’intérêt au profit
de
la négociation et du marchandage.
2) le respect du droit à la propriété de
chacun comme condition fondamentale de la liberté individuelle
3) La libre concurrence
4) Le respect des promesses et des contrats
5) La réciprocité des échanges de biens
et de services par la juste rémunération monétaire
de leur valeur d’échange.
6) Le crédit de confiance accordé a priori au
partenaire
du jeu marchant car très peu de transactions peuvent se traiter
par un échange simultané ; l’un doit souvent
anticipé
le comportement correct de l’autre ; en particulier cela est par
définition
indispensable dans les prêts d’argent qui seuls permettent une
circulation
rapide et profitable du capital ; mais cette confiance à pour
contrepartie
l’exercice du droit pénal par l’état arbitre et juge et
la
contrainte par corps a posteriori que celui-ci peut faire appliquer sur
sa personne en cas de manquement par le partenaire aux termes du
contrat.
Seuls certains commerces perçus, à tort ou raison, comme
mal ou non protégés ou " protégeable " par
l’état,
font l’objet d’un comportement de défiance a priori : La
location
d’un logement par exemple, le transport public, les spectacles et les
loisirs
ou la prostitution où le client paie souvent d’avance. Mais
pourquoi
le spectacle et pas le restaurant ? L’analyse pourrait être
intéressante
en suivant mon hypothèse...
7) Enfin la règle de l’universalité du
service
rendu dès lors qu’il est interdit, pour que le commerce soit
profitable
et que la libre concurrence soit respectée, de faire des
discrimination
entre les clients et de refuser la vente à quiconque est
solvable
et tout client doit, sauf indices manifestes, donc, dans la plupart des
cas, être supposé tel.
L’argent et son usage marchant capitalistique impliquent donc
nécessairement
la définition de règles de confiance réciproque
entre
les partenaires et acteurs du jeu économique ; ces règles
ne relève pas d’une morale du devoir qui mettrait en oeuvre des
valeurs transcendant l’intérêt égoïste mais
des
normes de l’intérêt mutuel qu’il ne faut pas confondre
avec
un quelconque intérêt commun : celui-ci ne pouvant
être
que l’objet des décisions privées des individus. La
liberté
individuelle elle-même, indissociable du droit de la
propriété,
n’est que la condition de l’autonomisation et de l’universalisation
rationnelle
des relations économique entre acteurs qui ne se connaissent pas
nécessairement avant l’échange, ne se reconnaissent pas
forcément
une identité collective ou des intérêts communs,
voire
ne s’aiment pas ; cette éthique de l’intérêt mutuel
est en droit universelle, rationnelle et pragmatique ; elle tente de
mettre
sinon hors jeu, du moins de dominer, les affections pathologiques
communautaristes
et subjectives et en cela réalise paradoxalement la position
kantienne
du droit. Mais ce n’est plus ici la Raison universelle qui fonde le
droit,
c’est l’intérêt mutuel bien compris qui exige des
règles
de raison universelle.
Les relations monétaires sont donc éthiques en
elles-mêmes
car elles impliquent la mesure c'est-à-dire la raison comme
régulateur
des échanges de biens et de services; en cela:
- elles libèrent les acteurs de tout assujétissement
statutaire illimité;
- elles pacifient le jeu des intérêts en substituant
l'équivalence
objectivement mesurable des valeurs échangées à
l'arbitraire
du désir subjectif et aux rapports de force; payer est le
contraire
de voler ou de contraindre (payer = pacifier);
- elles obligent chaque partenaire à respecter l'autre , dans
son désir comme dans sa personne, en tant que partenaire
volontaire
de l'échange, sauf à rendre celui-ci impossible;
- elles égalisent les conditions en relativisant les positions
car chacun peut être tour à tour vendeur et acheteur et
est
également libre de vendre et d'acheter, s'il en a les moyens,
lesquels
ne peuvent, par principe, pas lui être refusés;
- elles universalisent les échanges en refusant de distinguer
entre les individus parrticipant aux échanges dès lors
qu'ils
sont solvables (interdiction du refus de vente).
Le bilan de la "domination libérale" des relations marchandes
et de l'argent dans les échanges sociaux (à distinguer
des
échanges privés) est donc globalement positif quant aux
progrès
éthiques (autonomie individuelle et justice égalitaire)
qu'elle
a rendu tout à la fois possibles et nécessaires.
Mais d'où vient alors la condamnation morale de l'argent?
De la remise en cause perçue comme perverse que les relations
marchandes risquent de provoquer dans les domaines des relations non
marchandes.
Si, en effet, la rationalité prescriptive et éthique
des relations marchandes et monétaires est ajustée aux
échanges
entre partenaires individualisée et abstraits qui ne sont a
priori
rien les uns pour les autres et ne sont pas destinés à
rester
solidaires, elle n’épuise pas l’ensemble des désirs
humains
et des relations entre les hommes qu’ils génèrent : tout
rapport humain d’échange n’est pas marchand et tout désir
n’est pas désir de posséder un bien ou de jouir d’un
service
dont la valeur serait mesurée et quantifiable. Mon
hypothèse
est que le désir humain fondamental est celui de se
reconnaître
soi-même comme valeur dans les relations que chacun entretient
avec
les autres en tant qu’être conscient et jugeant; or la conscience
et l’amour de soi ne peuvent s’affirmer seulement dans la
compétition
des intérêts et la juste rétribution du service
rendu,
mais aussi dans le sacrifice moral, l’amour de dieu et des hommes, la
recherche
du pouvoir, l’amour érotique etc.. ; ces différentes
stratégies
n’obéissent pas aux mêmes normes et conventions
régulatrices
que celles des relations marchandes et, lorque que l'on confond les
différent
jeux du désir, elles peuvent même leurs être plus ou
moins contradictoires . Un même individu peut parfaitement jouer
au commerce d’argent entre 9et 12 heures, au commerce amical et
convivial
entre 12 et 14, à la lutte pour le pouvoir l’après-midi
et
au commerce érotique le soir tout en restant cohérent
avec
les différents contextes de jeu et peut, en satisfaisant la
souplesse
multiforme de son désir, se reconnaître dans sa valeur,
c’est
à dire sa puissance d’agir sans se contredire. Mais s'il
applique
à un contexte de jeu les règles d'un autre contexte, ou
s'il
prétend que les mêmes règles morales doivent valoir
pour toutes les relations humaines (impératifs absolus ou
catégoriques),
alors il se trouve dans l'impossibilité de jouer efficacement
des
jeux différents et se condamne à de l'echec
(héroïque?)
ou au cynisme qui prétend réduire toutes les relations
humaines
aux relations marchandes en s'interdisant d'autres relations (ou jeux)
possibles ou en les détournant de leur sens.
La grande différence, en effet, entre les jeux marchands
monétaires
et les jeux de pouvoir et d’amour c’est que les second mettent les
individus
en position de se désirer les uns les autres directement.
Précisons
les choses : lorsque les acteurs se rencontrent sur le marché,
chacun
ne s’intéresse qu’à l’objet et au service rendu dont il
cherche
à s’approprier la valeur d’usage et symbolique au moindre
coût
sans considérer le désir de l’autre autrement que comme
le
moyen contraignant de parvenir à sa fin ; dans les jeux de
pouvoir,
d’amitié et d’amour le désir de l’autre est à la
fois
le moyen et la fin ; si un échange d’objet et de service
s’opère
cet échange vise à satisfaire le désir que chacun
à d’obtenir le désir de l’autre ; le désir de
l’autre
est donc l’objet du désir en tant que l’autre est le sujet plus
ou moins conscient de son propre désir. Dans le pouvoir et
l’amour,
le désir du sujet se fait désir du désir de
l’autre
dont il cherche à être l’objet en tant que moyen et fin du
désir de soi (amour de soi), fondement du désir
d’être
heureux dans et par la relation-reconnaissance réciproque qu’ils
produisent. Le pouvoir réside bien en effet dans la rencontre
entre
le désir de dominer de l’un et le désir d’être
dominé
de l’autre ; une domination qui s’imposerait par le terreur ou la
corruption
monétaire seules serait illégitime et forcément
contestable
donc instable; dès lors qu’elle nierait le désir du
dominé
elle provoquerait une résistance qui dévaloriserait
à
terme la reconnaissance que recherche celui qui prétend dominer.
Par son désir de pouvoir, en effet, le dominant cherche à
obtenir la soumission consentie de l’autre en tant que celle-ci exprime
la supériorité universellement reconnaissable du
dominant,
laquelle passe par l’acceptation désirée par le
dominé
de son indiscutable infériorité. Le motif pour lequel le
dominé se reconnaît comme tel est qu’il voit dans sa
domination
non seulement le résultat instable d’un rapport de force
contraignant
mais la réalisation de son désir d’être
protégé
de la déréliction et valorisé par identification
avec
les buts du dominant et le jugement positif d’un supérieur
à
son égard. Cette supériorité est mise en
scène
dans l’imaginaire des individus par les rituels sociaux collectifs
associant
les corps et les paroles; cette mise en scène la
représente
en tant que supériorité objective voire quasi naturelle
car
prouvée par la pratique sociale et politique
auto-réalisatrice
: si tout le monde y croit, par l’effet d’une mise en scène
collective
frappante mettant en jeu des symboles quasi religieux de valeurs
présentées
comme transcendantes, cela marche objectivement (collectivement) et si
cela marche objectivement tout le monde croit que c’est vrai et
indépassable
; chacun est alors distribué et établit sa propre
stratégie
dans le cadre des rapports symboliques de pouvoir et de la
reconnaissance
de soi; et cela, en fonction de sa position originaire sociale
objectivée
symboliquement médiée par le conscience et
l’expérience
subjective (fruit de son histoire personnelle depuis l’enfance) qu’il
en
a; ce double jeu du social et de l'expérience consciente
personnelle
va produire le degrés de soumission ou de révolte
vis-à-vis
des valeurs sociales et des régulations symboliques et
conventionnelles
dominantes visant à assurer la domination des dominants sur les
dominés dans la conscience d’eux-mêmes qu’ils en ont, les
uns et les autres (jeux de rôles).
Or le rôle de l’argent quant à la question des relations
du pouvoir est ambivalent : D’une part il est un instrument
extrêmement
puissant pour obtenir l’obéissance de qui en désire
grâce
au service ou au bien qu’il peut fournir en contrepartie ; et d’autre
part
l’argent n’agit qu’à très court terme puisque si l’on
peut
acheter la force de travail ou le bien d’un individu dans un temps
limité
et mesuré, on ne peut acheter sa fidélité durable
: libre en effet à celui qui vend sa force de travail de trouver
mieux offrant ailleurs et de faire jouer la concurrence à son
profit.
L’argent ne crée aucun attachement durable, elle ne met en jeu
qu’un
pouvoir anonyme par nature éphémère et laisse
chaque
partenaire libre de faire défection à sa convenance.
C’est
en cela, nous l’avons vu, que la relation d’argent est par nature
libérale
et c’est pour cela que, tous les salariés le savent, la lutte
pour
le pouvoir d’achat se confond avec la revendication de la
dignité
et de l’autonomie.
Ainsi, l’argent est bien corrupteur, mais il corrompt les
relations
de pouvoir stables, figées et statutaires au profit de relations
instables qui laisse à chacun son autonomie stratégique
formelle
exprimée par le contrat commercial ou de travail toujours
révisable
ou contestable. Dans ces conditions celui qui domine par l’argent ne
peut
reconnaître son pouvoir ou sa puissance personnelle à
travers
le domination qu’il exerce : il sait qu’on lui obéit non pour
ses
éminentes qualité mais pour l’argent dont, ici et
maintenant,
il dispose et dont le hasard pourrait le déposséder. La
relation
d’argent dépossède le dominant de sa domination : c’est
l’argent
impersonnel et l’autonomie relative et réciproque qu’il rend
possible
qui domine à la fois le dominant et le dominé en un jeu
dans
lequel ni l’un ni l’autre ne peuvent s’approprier un statut et un
rôle
durables et indiscutables. Le pauvre peut toujours prétendre
s’enrichir
: c’est pour lui un droit et le riche sait que sa richesse ne suffit
pas
à le garantir contre la concurrence de tous les autres ; la
compétition
est toujours ouverte, c’est pourquoi le riche tentera toujours de
persuader
le pauvre qu’il le domine pour d’autres raisons : compétence,
qualités
morales etc.. et que son argent il le doit à son mérite
intrinsèque
et non à la chance ou à la ruse. Mais il est clair que
cette
justification ne vaut que pour ceux qui sont dominés pour et par
autre chose que l’argent : religion, séduction, , besoin de
sécurité,
identification imaginaire et admirative...Le pouvoir est d'essence
aristocratique;
il a besoin pour s'affirmerr durablement de faire croire au
"mérite
naturel" propre de ceux qui en disposent; pour cela, ceux-ci se doivent
de cultiver ce par quoi il se prétendent au-dessus des autres,
à
savoir l'honneur.
Qu'est-ce que l'honneur? C'est le fait de faire croire que l'on incarne
dans son être et ses actes des valeurs supérieures
absolues
pour lesquelles on est prêt à sacrifier ses
intérêts
et sa vie; l'homme de pouvoir ne craint ni la ruine ni la mort et
c'est par quoi il est supérieur et peut prétendre exercer
sur les autres une autorité lègitime au nom de valeurs
transcendantes
que tous reconnaissent. Vivre pour s'enrichir, exercer un pouvoir sur
les
autres pour gagner de l'argent en s'enrichissant sur leur dos est
contradictoire
avec l'honneur qu'exige tout pouvoir légitime et durable.Qui
veut
exercer un réel pouvoir et canaliser à son profit le
désir
de soumission doit utiliser d’autres armes que l’argent : la terreur
humaine
et/ou religieuse ou la séduction honorifique (charisme).
Au contraire, l’argent met en jeu des relations de pouvoir instables,
contestables mais du même coup ouvertes et donc plus
démocratiques.
C’est pourquoi démocratie et économie marchande sont
liées
et que leur opposition conjoncturelle est, à terme,
nécessairement
une menace pour l’une comme pour l’autre.
Quant au jeu de l’amitié et de l’amour ; le conflit et
l’ambivalence avec le rôle, la valeur de l’argent et les
règles
de son usage sont pires encore.
L’amour et l’amitié exprime le désir d’être
aimé
par l’autre pour soi-même pour mieux s’aimer soi-même ;
cette
exigence est pour le moins problématique. L’amant désire
le désir de l’autre comme preuve de sa valeur mais il n’est
jamais
assuré que l’autre l’aime vraiment, c’est à dire
durablement
; il est donc tenté, pour obtenir le signe de ce désir de
l’autre qu’est le plaisir qu’il suscite chez l’autre, d’utiliser
l’argent,
s’il en a, comme moyen de séduction C’est à dire de faire
plaisir par des dons à forte valeur monétaire, moyen qui
parait efficace sur l’instant et qui l’est en effet dès lors que
ce cadeaux est accepté. Mais cette efficacité
s’accompagne
nécessairement du doute quant à la qualité de cet
amour : s’agit-il de l’amour de l’argent ou de l’amour de la personne
qui
séduit par l’argent ? Le séducteur, sans son argent,
serait-il
aimable ?
Si oui, alors l’argent n’est pas un bon moyen d’obtenir la " preuve
" d’amour que l’amant recherche et sinon le sujet ne peut sans
illusion,
un jour ou l’autre nécessairement déçue, croire
qu’il
est aimé pour lui-même. Dira-t-on qu’il suffit d’obtenir
le
plaisir de l’autre par tous les moyens ? non car le client ne peut
être
trompé sur la valeur du plaisir sensuel de la prostituée
: dès lors que l’argent est la seule motivation du service
sexuel
rendu celui-ci ne peut être qu’une comédie plus ou moins
bien
jouée en aucun cas la rencontre sensuelle du désir de
l’un
avec le désir de l’autre qui seule valorise les signes de
l’amour
réciproque car seule elle met en jeu l’imaginaire intime et
corporel
de chacun. Ce qui vaut pour l’amour explicitement érotique vaut
aussi pour l’amitié, sauf que dans ce cas la preuve
érotique
de cette rencontre manque ! La durée de l’amitié, par
delà
toute relation marchande, peut seule valoir de preuve.
Mais l’argent peut-il servir aux jeux de l’amour et de l’amitié
? oui mais à condition de subordonner sa finalité propre,
le profit pour soi-même, au profit de celui qu’on aime et du
plaisir
partagé qu’il contribue à produire. C’est dire que
l’argent
ne peut ici être maître du jeu : la
dépersonnalisation
que provoque les rapports marchands risque toujours de tuer toutes
relation
intime d’affection ; c’est au contraire en personnalisant la relation
d’argent
que celle-ci peut servir aux jeux de l’amour et de l’amitié mais
alors il ne s’agit plus de rapports marchands ! On n’est plus alors
dans
le un cadre public mais dans un cadre strictement privé :
l’amour
dans les société à économie marchande n’est
plus, en droit, socialement contrôlable, sauf exception
réactionnaire
et contraire au droit moderne, s’il n’est pas un jeu antisocial, il
s’affirme
asocial ; l’amour, dans les sociétés modernes, ne
relève,
en droit sinon en fait, que de la libre décision individuelle. ;
alors que le jeu marchand impose l’universalité
impérative
abstraite de la relation client-fournisseur, L’amour et l’amitié
prétendent mettre en oeuvre un don réciproque dont le
contenu
réel, qui fait l’objet d’échanges extrêmement
personnalisés
(je n’aime pas n’importe qui et ne veut pas être aimé par
n’importe qui), même incarné dans des biens et des
services,
est incommensurable car purement qualitatif.
Est-ce à dire que le jeu marchand n’exerce aucune influence
sur
les relations amoureuses et amicales ? L’expérience quotidienne
montre, que les couples d’amis et d’amants voire les familles
manifestent
aujourd’hui ouvertement, comme dans les rapports d’argent, l’exigence
du
retour de l’investissement affectif que chacun a consenti
vis-à-vis
de ou des autres et que, lorsque cette exigence n’est pas satisfaite,
la
relation peut être dénoncée et défaite sur
simple
décision individuelle : chacun sait que le mariage peut se
terminer
par un divorce sans faute ni sanction ; si l’amour donne, il attend un
contre-don et la satisfaction de cette attente est, à terme, la
condition de la perpétuation de l’amour ; en un sens cela n’est
pas nouveau : les anthropologues ont montré que la logique du
don
s’inscrit toujours dans le jeu de la dette ; qui reçoit est
l’obligé,
le débiteur, de celui qui donne ; mais cela, dans les
sociétés
traditionnelles, n’était pas explicité dans le cadre
d’une
revendication individuelle négociable, mais l’obligation
était
l’effet mécanique d’une convention sociale régulatrice
prédéfinie
donnant lieu à des sanction lourdes pouvant aller jusqu’à
la mort ou l’exclusion du débiteur coupable d’ingratitude ou de
trahison.
Ainsi, dans la jeu moderne de l’amour, chacun a le droit social, sinon
moral, de trahir à sa guise ses engagements privés sans
être
puni, et cela, pour la bonne et simple raison que l’amour appartient
à
la sphère privée ; Ainsi, sous L’influence du jeu et des
rapports d’argent, l’amour et l’amitié sont à la fois
vécus
comme des échanges négociables dont les contenus doivent
être évalués sinon comptabilisés par chacune
des parties et, en même temps, comme des échanges
dont
les contenus ne sont pas réductibles à des valeurs
marchandes.
: L’amour est bien devenu un échange de services affectifs et
sexuels
négociés, mais n’est pas vécu comme compatible
avec
la prostitution par la simple raison que chacun recherche en
priorité
les signes du désir et/ou de l’attention plus ou moins exclusifs
et non quantifiables de l’autre à son égard. Le jeu
socialement
dominant de l’argent fait donc de l’amour un jeu libéral, mais
par
opposition, plus compliqué, car tout à la fois plus
individuellement
exigeant et moins socialement réglé ; bref un jeu dont
les
règles sont à inventer par consentement mutuel pendant la
partie et par les partenaires. Le " je t’aime - moi non plus " de la
chanson
de Guinsbourg exprime à la perfection la difficulté de ce
jeu.
De plus un grand nombre de jeux semblent mettre à contribution
des logiques de régulation différentes voire
opposées
; ainsi les relations amoureuses ou amicales sont souvent
associées
à des rapports d’intérêts financiers ou de prestige
sous-jacents ; mais il s’agit toujours d’un double jeu ; l’amour et
l’amitié
étant le plus souvent les masques de l’intérêt,
d’une
part celui-ci ne peut s’exhiber comme tel sans être voué
à
l’échec, d’autre part la preuve est requise pour ceux-là
de n’être en aucun cas compromis avec une simple affaire d’argent
; ce qui oblige à une gymnastique du mensonge perpétuelle
qui finit mal car une telle preuve se dénonce une jour ou
l’autre
pour ce qu’elle est. : une tartuferie.
Un double jeu positif consiste au contraire à s'efforcer de
stabiliser une relation amoureuse ou amicale par nature
problématique
en lui adjoignant un enjeu économique mutuel à long
terme;
mais un tel jeu de la solidarité intéréssée
et intéréssante doit être fondée sur un
rapport
des forces égalitaire entre les partenaires du jeu et une
entente
négociée sur les objectifs poursuivis; celle-ci n'exige
aucune
valeur transcendante préétablie mais elle implique des
procédures
rationnellesde traitement des contradictions , non pour les supprimer,
mais pour rechercher un compromis ressenti comme mutuellement
avantageux.
Cette attitude, nécessairement pragmatique, exclut tout
dogmatisme
quant à la valeur des valeurs qui contraindrait de s'entendre a
priori sur les objectifs communs prioritaires; si elle interdit de
croire
à des valeurs absolues, elle refuse la fusion identificatoire
fantasmatique
pour considérer l'amour comme une lutte entre les désirs
de chacun du désir de l'autre, désirs toujour
différents,
qu'il convient de faire dialoguer pour les accorder sur des compromis
mutuellement
acceptables (à chacun d'en juger!) et faire de l'entreprise
à
deux une bonne affaire pour chacun..L'argent intervient alors dans la
gestion
de la compatibilité durable des désirs amoureux; mais
plus
que simple moyen, il devient le signe social et symbolique
c'est-à-dire
tangible et objectif que l'accord amoureux du désir de chacun du
désir de l'autre est productif; c'est-à-dire mutuellement
avantageux.
Ainsi l’argent, comme valeur socialement dominante, d’une part met en crise libéralisatrice le ou les pouvoirs idéologiques, politiques et sociaux communautaires ainsi que les relations d’attachement particuliers en les excluant de la sphère publque pour les subordonner et les confiner à la sphère de la vie privée ; (en cela, démocratie et liberté individuelle d’association-PACS compris- sont bien les deux faces d’une même médaille) et d'autre part fait que l’individualisme de principe, auto-réalisateur de l’économie de marché, se diffuse dans toutes les relations humaines non-marchandes comme fondement de l’éthique régulatrice de la vie publique et privée. En cela l'argent corrompt toutes les autres relations humaines en les piratant ou en les obligeant à se redéfinir comme relations toujours problématiques entre des désirs individuels sans valeur transcendantes (religieuses et/ou politiques) fondatrices et identificatrices qui permettraient de les fusionner.
Cette ambivalence socioculturelle de la valeur de l’argent produit nécessairement des conséquences politiques contradictoires et d’abord celle entre la réalité inégalitaire des rapports d’intérêt et d’argent et la revendication égalitarisme que l'individualisme de principe que génère les relations d'argent pose comme condition juridique et universelle fondamentale du jeu marchand. Cette contradiction est celle qui anime centralement la vie démocratique dans les sociétés modernes.
_______________________________
3) Argent et
politique.
Si le rapport d’argent libèrent de l’asservissement à
la contrainte du devoir moral transcendant, s’ils libèrent les
individus
des allégeances traditionnelles non-choisies, ils n’interdisent
pas les rapports d’exploitation et de domination car les richesses et
les
pouvoirs inégaux qu’ils mettent en oeuvre autorisent ceux d’en
haut
(les riches, les propriétaires) à utiliser les talents et
la force de travail-marchandise de ceux d’en bas (les
polétaires-salariés)
pour accroître leur avantage et leurs privilèges. Les
rapports
entre le capital et le travail sont forcément
déséquilibrés
au profit de qui détient les moyens de production et
d’échange
pour s’approprier les richesses produites par la production et
l’échange
des biens et des services. La question de l’inégalité
sociale
est bien, dans le rapport entre les égoïsmes, la question
éthique
essentielle de l’économie libérale.
Cette inégalité, dans la société moderne,
est tout à la fois présentée comme légitime
dès lors qu’elle semble être le résultat de
contrats
marchands négociés et sanctionner les mérites
économiques
des uns et des autres dans le cadre de la libre concurrence. et d’autre
part elle apparaît bien, à l’expérience, comme la
conséquence
de rapport sociaux, déséquilibrés au
départ,
entre les nantis de la fortune et de la culture et les autres. Les
inégalités
s’auto-entretiennent et l’égalité des chances condition
d’une
réelle compétition concurrentielle s’impose à ceux
d’en bas comme une illusion mystificatrice. Dans les
sociétés
traditionnelles les inégalités étaient
justifiées
par le recours à la nature des choses et à la religion
qui
prétendaient fixer définitivement les statuts
fixés
par la volonté divine ou à la mise en oeuvre d’un ordre
naturel
immuable ; leur contestation était étouffée dans
l’oeuf
ou bien faisaient l’objet de sanctions humaines et divines,
réelles
et imaginaires, littéralement épouvantables ; dans la
société
formellement libérale cette contestation est permise et
justifiable
car fondée sur le principe de l’égalité des droits
: l’inégalité sociale devient explosive parce qu’elle
à
la fois justifiés par la compétition et injustifiable par
le fait que celle-ci est biaisé par le jeu des rapports de force
et d’argent qui la reproduit. Cette contradiction interne oblige les
états
à mettre en oeuvre des règles de redistribution et de
justice
sociale (éducation, droit du travail, droits sociaux..) qui
tentent
de faire croire à l’égalité des chances, en
s'efforçant
de faire que nul ne se sente, à tord ou à raison, exclu
du
jeu des échanges et de l'argent.
C'est pourquoi la contradiction entre l'inégalité
réelle
des conditions réelles d’exercice des droits et
l'égalité
formelle de ces mêmes droits est au centre de la lutte, politique
ou non, entre les nantis et les autres; mais cette lutte devient
d'autant
plus vive , voire violente et socialement dangereuse (terrorisme,
violence
urbaine, drogue etc..) que les pouvoirs politiques et les états
sont affaiblis par la mondialisation des échanges
économiques
et financiers dont le contrôle leur échappe. Une grande
partie
de la population dans le monde se trouve exclue de fait de la
compétition
en vue d'assurer leur désir de promotion économique. Le
pouvoir
des décideurs économiques, en fait de la minorité
de ceux qui gèrent le capital mondialisé, s'impose au
pouvoir
politique régional des états dont le rôle ne
consiste
plus à mettre en oeuvre des procédures de
régulation
restaurant la croyance dans l'égalité des chances, mais
à
mater les révoltes infrapolitiques que génère la
montée
de la précarité et de l'exclusion pour le plus grand
nombre.
La démocratie, qui suppose que le plus grand nombre croit dans
la
capacité de la politique à instaurer une forme de
solidarité
favorable au plus grand nombre et à établir les
conditions
d'une réelle égalité des chances dans la
compétition
sociale, est alors menacée par un capitalisme
particulièrement
aveugle aux conséquences sociales et culturelles de
l'aggravation
des inégalités réelles qui compromet l'idée
même de d'égalité des chances ainsi que la
confiance
des citoyens dans la démocratie; une telle perte de confiance
entraîne
alors nécessairement la violence infrapolitique, la tentation de
la dictature de droite ou de gauche et la xénophobie, voire le
racisme
ouvert. La capitalisme est alors lui-même menacé dans sa
capacité
à instaurer des règles de droit et les conditions
politiques
économiques nécessaires à sa survie et à
son
développement: les droits de la propriété et de
l'échange
contractuel sont bafoués par une économie mafieuse
criminalisée
ou blanchie; la démocratie égalitaire et libérale
fondement de la légitimité apparente du jeu de l'argent
est
décrédibilisée, et la consommation tend à
ne
plus concernée qu'une minorité de nantis se
protégeant
contre la jalousie haineuse des autres.
De plus une autre dérive de l’usage de l’argent comme moyen
de spéculer à très court terme se développe
aujourd’hui sans frein dès lors que les états ne peuvent
plus ni réguler et ni contrôler la circulation
monétaire
; chaque investisseur particulier ou institutionnel à
intérêt
à investir là où il peut croire par imitation
grégaire
en une montée rapide auto-réalisatrice des valeurs
mobilières
, quelque soit la réalité économique , qu’il ne
peut
prédire ni maîtriser, et le rendement à long terme
de ses investissements. Lorsque des investisseurs exigent un rendement
de 12 à 15% dans l’année pour maintenir leurs
investissements
dans des entreprises, celles-ci sont alors forcées à
recourir
à des moyens de rentabilité qui compromettent les
conditions
et les ressources humaines et financières d’un
développement
à long terme de leurs activités : elles licencient,
limitent
la formation de personnel, externalisent tout ce qui est moins
rentable,
réduisent le poids relatif du secteur " recherche et
développement
" quand elles ne se livrent pas à leur tour à la
spéculation
financière sur les produits dérivés
(spéculation
sur les prix à terme des matières premières et
produits,
des valeurs mobilières, voire des indices de prix) sans rapport
avec leurs activités de production ou de services. Le long terme
est alors sacrifié au court terme ce qui provoque alors des
bulles
spéculatives qui accroissent les richesses financières
sans
causes, c’est à dire sans accroissement réel de la valeur
des biens et des services rendus aux consommateurs. Mais ces bulles un
jour ou l’autre éclatent lorsque les créances douteuses
ne
sont plus remboursables par le fait de cet absence de création
de
richesses réelles ; en dernier ressort les banques centrales et
les institutions financières mondiales sont alors
obligées,
pour éviter l’effondrement systémique du système
financier
et économique mondial, d’intervenir pour prendre en charge tout
ou partie de la dette accumulée. Comment ? en utilisant
l’impôt
; ce qui s’appelle socialiser les pertes pour optimiser la
privatisation
incontrôlable des profits privés. Cette "
économie-casino
" soumet alors l’économie réelle à sa loi, aux
dépends
des contribuables, c’est-à-dire pour l’essentiel de ceux qui
travaillent
ou qui investissent " petit " (les gros organisent l’évasion
fiscale
vers les paradis offshore, soutenus par les états !). Le fin du
fin de la logique financière actuelle, c’est, dès lors
que
l’on est un gros investisseur, d’échapper au risque
spéculatif
par le recours aux institutions politiques, que l’on disqualifie par
ailleurs
si elles prétendent exercer un contrôle régulateur
et limitateur des profits spéculatifs. Le thème
démagogique
" moins d’état, moins d’impôt ! " apparaît alors
pour
ce qu’il est : une tartuferie destiner à masquer la
volonté
de faire fonctionner les institutions politiques au service des plus
riches
et aux dépends des plus pauvres, de l’économie
spéculative
aux dépends de l’économie réelle profitable aux
plus
grand nombre.
Mais la mise en oeuvre par les responsables et institutions politiques
de cette volonté aggrave à terme les conditions
générales
économiques, sociales politiques voire idéologique de
reproduction
du capitalisme globalisé, y compris financier, en aiguisant les
conflits sociaux et internationaux et en aggravant la
spéculation
financière pure et parfaite autodestructrice.
Les conséquences logiques de cette analyse sont, à mon
sens, les suivantes:
- Le capitalisme ne peut durablement se développer sans la
démocratie,
c'est-à-dire la croyance pour le plus grand nombre dans le
progrès
social et le contrôle politique de la mise en oeuvre de ce
dernier
par le biais du suffrage universel; mais sa puissance tend à
transcender
le pouvoir politique démocratique et à détruire
ses
propres conditions politiques de survie.
- Le libéralisme individualiste (primat des droits individuels
sur les conditions collectives de l’exercice de ces droits) est bien la
seule philosophie compatible avec l'économie marchande et la
démocratie
politique; mais cette compatibilité ne va pas de soi: elle
suppose
la restauration du rôle de la politique afin de réguler la
vie économique et sociale.
- Le libéralisme économique sans le développement
du libéralisme politique qui exige la reconnaissance des droits
sociaux et des conditions collectives de l’exercice de ses droits
individuels
par chacun (son droit au bonheur par et pour lui-même) n'est
qu'une
mystification contradictoire avec son essence.
- On ne peut combattre le faux libéralisme réellement
inégalitaire qu'en lui opposant un libéralisme
authentiquement
universel, c'est à dire économique, social ,culturel et
politique
dans un cadre mondialisé. Tout retour vers des valeurs
communautaires
ou communistes, politiques et /ou religieuses socialement dominantes,
est,
dans uns nécessairement une menace d'intégrisme
liberticide.
Entre la religion et l'argent il faut choisir la démocratie individualiste et sociale par l’argent, ce qui suppose la restauration de l’autorité politique et d’abord son autonomie par rapport aux puissances d’argent dominantes afin de faire du pouvoir de l’argent un pouvoir démocratisable en lui-même et dans ses conséquences ; cette autonomie et cette autorité imposent évidemment des règles destinées à lutter efficacement contre la corruption des institutions et des hommes politiques démocratiques (à commencer par la transparence sur le financement des partis et des hommes politiques, sa limitation et sa régulation), mais cela ne suffit pas : il convient de d’établir surtout l’autorité régulatrice et le pouvoir de sanction d’institutions politiques en voie de mondialisation. Les état-nations sont entrés dans une phase de déclin inéluctable ; les problèmes économiques et écologiques, les rapports sociaux, idéologiques, politiques et militaires se sont irréversiblement transnationnalisés. Tout retour en arrière sous le thème d’un " républicanisme national " est un absurdité soit stérile (nationalisme de gauche) soit catastrophique (nationalisme de droite).
_____________________________________
Conclusion :
Que faire vis-à-vis du pouvoir de l’argent ?
2 stratégies sont offertes : celle de la lutte frontale contre ce pouvoir comme force dominante de la vie sociale, ou celle de sa régulation au profit du plus grand nombre.
La première ne peut que s’enfermer dans la logique suicidaire
d’une morale politique communautaire plus ou moins religieuse. Elle a
du
reste déjà perdu la guerre : pour des raisons de survie
et
de pouvoir, la religion s’est définitivement acoquiné
avec
la logique de l’argent et en subi les implications individualistes.
Quant
à la politique, elle ne peut plus prétendre restaurer
l’ordre
nationaliste ancien sans prendre la risque de la guerre d’extermination
totale de l’espèce humaine.
Or la société en cours de mondialisation est devenue
un gigantesque lieu pluraliste d’échanges économiques et
symboliques entre groupes et individus qui revendiquent leur autonomie
et le droit de construire leur stratégie propre dès lors
qu’elle peut être rendue compatible avec celle des autres par
l’intervention
d’une régulation politique qui fait que chacun peut croire
exprimer
son droit au bonheur ou, ce qui revient au même, à la
dignité.
Dans ses conditions, seule la seconde apparaît souhaitable et
réaliste.
Réguler en l’universalisant réellement et non pas
seulement
formellement le pouvoir de l’argent est le seul moyen de construire une
société décommunautarisée, froide mais
viable
; en pratiquant la justice par le droit ( individuels et sociaux) plus
que par la charité ou la solidarité émotionnelle
une,
telle société doit se donner les moyens
économiques,
juridiques et politiques de faire respecter le droit à la vie
personnelle
par rapport à la vie sociale pour laisser toutes leurs chances
à
d’autres logiques du désir possibles et peut être plus
fondamentales
que celle de l’argent, sous condition de leur compatibilité avec
l’exigence socialisée de l’autonomie individuelle et de la
non-violence
physique ou psychologique : celle de l’art et de l’amour. Qui sont deux
dimensions de la vie érotique plus riche et plus
créatrice
dans la perspective de l’accomplissement de l’amour altruiste de soi.