Pour la légalisation et la généralisation à tous de la PMA et de la GPA


Le conflit éthique concernant la GPA (gestation pour autrui) et dans une moindre mesure la PMA (procréation médicalement assistée) semble insoluble dès lors qu'il s'inscrit dans les valeurs de la démocratie et du féminisme. Les arguments pour et contre se réfèrent en effet aux mêmes principes que sont l'intérêt supérieur des enfants et la liberté des femmes. Or, précisément, en ce type de conflit, ce ce n'est à pas à l'état laïc de dire ce qui est moral ou non, sauf à se croire détenteur d'un pouvoir quasi-religieux sur les consciences et les comportements. C'est alors aux individus eux-même de décider ce qui est bon pour eux dès lors que cela ne nuit à personne. En tout cas pas à l'enfant né par GPA ou PMA et élevé pas ceux qui l'on désiré, sauf à faire intervenir des considérations anthropologiques éternelles qui pourraient aussi bien justifier l'interdiction du divorce, que celle de la GPA et de la PMA, ce que nul adversaires de ces dernières n'ose faire. Mais, en bonne logique, face au risque que dénoncent ceux-ci, il convient justement de légiférer, pour précisément réduire le danger de marchandisation systématique (comme dans le don d'organe), car, sans loi, le pire devient en effet possible, dès lors que la technique de la GPA est accessible ailleurs.

La France n'est pas un îlot protégé de l'évolution du monde et de l'éthique libérale constitutive de notre droit européen, et il est impensable, dans le cadre du droit supérieur des enfants, que des enfants conçus par GPA dont il faut légaliser les modalités pour éviter les abus éventuels, puissent être enlevés à leurs parents qui l'aiment et s'occupent de lui aussi bien que d'autres (et parfois mieux car désireux d'élever ces enfants) ou, presque aussi grave, puissent être considérés comme nuls et non advenus en tant que futurs citoyens français, en contradiction avec leur intérêt bien compris. Il serait inepte en droit libéral et éthiquement scandaleux de punir les enfants pour une prétendue faute d'un de ses parents biologiques

D'une part Ce que nous savons de l'expérience américaine de la GPA est que le sentiment négatif de la mère porteuse vis-à-vis de l'enfant qu'elle porte auxquels se réfèrent certains adversaires de la GPA pour dénoncer l'abandon d'enfant qui, selon eux, serait le fait de la mère porteuse et qui entraînerait un éventuel dommage pour le développement psychologique futur de l'enfant, sont ce que le degré d'acceptation de celle-ci de porter l'enfant aussi pour un(e) autre en fait. Cette acceptation, par la mère porteuse de l'enfant vaut pour tout sentiment maternel que peut éprouver une mère. Nous savons que, dans le cas d'un viol, la mère biologique peut refuser sa grossesse et détester l'enfant qui en est issu. L'amour de la mère porteuse pour l'enfant qu'elle porte dépend donc aussi et peut-être surtout en effet de l'affection que celle-ci porte pour la mère demandeuse et/ou en ce qui concerne la mère dont c'est l'enfant biologique , pour le père, biologique et/ou légal de cet enfant. C'est dire que l'amour par la mère porteuse ne relève pas d'un éventuel instinct maternel mais du sens qu'elle donne à sa grossesse dans le cadre des relations positive ou négatives qu'elle entretient avec son environnement humain. De plus, l'altruisme du sentiment de la mère porteuse, biologique ou non, ne passe pas nécessairement par la possession de l'enfant comme enfant exclusivement à soi et pour soi. Je dirais au contraire, dans l'intérêt futur de l'enfant qui ne devrait pas nécessairement pas être considéré comme appartenant exclusivement à sa mère biologique.

Rien, d'autre part, dans l'expérience américaine, n'interdit à la mère porteuse de prolonger une relation privilégiée, quasi-maternelle, avec l'enfant qu'elle a porté. Aux USA, le plus souvent, cela se passe même ainsi. L'enfant peut très bien comprendre qu'il a deux mères, c'est même l'expérience la plus courante dans certaines sociétés ou milieux sociaux (tantes, grand-mères etc..). Tout dépend donc de la relation entre ces "deux mères"...C'est pourquoi, la GPA doit rester de l'ordre du don et cela l'enfant peut très vite le comprendre. C'est pour qu'elle le reste que je me prononce, comme pour le don d'organe, pour une loi qui interdise la seule relation de marchandisation qui serait la conséquence inéluctable d'une interdiction que l'on ne peut pas faire respecter, sinon pour les femmes qui n'en ont pas les moyens. Il ne faut pas oublier aussi le rôle des deux pères dans le cas de l'enfant d'un couple homo-masculin dont l'un des membres a déjà un enfant ou qui décide d'avoir recours à la GPA. Celle-ci, à mon sens, introduit une mère porteuse dans le monde sensible de l'enfant à qui la loi doit logiquement reconnaître le droit de la connaître et donc de la reconnaître (au deux sens du mot reconnaissance).

Il serait absurde d'exiger plus de conditions pour élever des enfants des couples homos que l'on en exige des couples hétérosexuels, sauf à revenir sur le droit au divorce des hétéros, certainement plus perturbateur pour l'enfant encore lorsque la relation entre les parents se dégrade fortement, que le fait d'avoir deux mères ou deux pères ... qui s'aiment et se reconnaissent mutuellement (au sens de reconnaissance affective). Il n' y a aucune raison d'imposer un seul modèle de famille dit naturel comme le font les partisans de la prétendue manif pour tous. Toute famille est une construction, même celle que l'on dit naturelle. Il existe, depuis la légalisation du divorce (1810 !), de l'adoption, de la fécondation par donneur de sperme "étranger" anonyme et la réalité des familles monoparentales, sans même compter les familles dites homosexuelles, plusieurs types de famille. Je ne vois pas de quel droit on voudrait imposer un type de famille aux autres, dès lors que rien, dans le droit, ne vient limiter le droit à faire famille à la convenance de ceux qui refusent la GPA, La PMA et l'homoparentalité.

Quant à l'intérêt des enfants, dont se réclament les adversaires de la GPA , il est démontré par les cas existant à l'étranger et en France, qu'il dépend plus de l'entente que les parents qui les élèvent manifestent à leur égard que de leur sexe biologique et/ou de leur orientation sexuelle. Il n'y a pas lieu sur ce point de faire une différence entre les parents hétérosexuels et homosexuels et/ou entre des enfants dits naturels et les autres, sauf du fait de préjugés discriminants dorénavant illégaux, selon la loi européenne. Si l'on veut protéger à l'avance les enfants des dommages dus à une éducation défaillante il conviendrait alors de le faire aussi pour les familles hétérosexuelles qui peuvent aussi être lourdement handicapantes pour les enfants (haine réciproque, incestes qui, pour l'immense majorité, se déroulent dans la famille traditionnelle), mais ce danger n'est pas considéré comme une raison d'interdire ni le mariage, ni le divorce, ni l'hétéroparentalité... D'éventuels mauvais traitements dûment signalés ne peuvent faire l'objet que de mesures de justice après-coup. Je constate que personne, parmi les adversaires de la GPA et de la PMA, ne proposent d'interdire à leurs parents d'élever les enfants obtenus par PMA ou GPA et/ou dans le cadre de l'homoparentalité. C'est dire qu'ils sont inconséquents : s'ils pensaient que la GPA, la PMA, et l'homoparentalité mettent vraiment les enfants en danger, ils devraient exiger que ces enfants soient enlevés des familles qui les ont obtenus dans ces conditions, ce qu'il se gardent de faire

La GPA et la PMA sont un progrès technique, à certaines conditions légalisées pour éviter ou réduire les risques médicaux, pour les couples dits homosexuels-hommes et pour certains couples dits hétéros dont la femme ne peut porter l'enfant (ex : absence d'utérus) et dont l'homme veut que ses gamètes soient transmis. Ces couples existent, mariés ou non. Ils doivent aussi avoir la possibilité de faire famille, comme les couples hétéros mariés et féconds. Ce sont aussi un progrès social, à conditions de réduire par la loi le risque de marchandisation et d'exploitation du corps des femmes (ce qui soit dit en passant était souvent le cas dans le mariage dit traditionnel en l'absence du droit pour les femmes à la contraception et de l'avortement), car Il n' y a pas de motif , hors tradition et/ou religion qui ne sont jamais des raisons suffisantes, en nos société de droit libéral, de réserver un droit fondamental à certains et de le refuser à d'autres. De fait et en droit, le droit à l'enfant existe pour tous les couples hétéros mariés et même pour les femmes célibataires et/ou ne vivant pas en couple. Nul au nom de son droit ne peut et ne doit priver les autres du même droit ; c'est là un grand progrès dans le sens de l'universalité et de l'égalité des droits. Religion et tradition ne disposent d'aucune légitimité en droit supérieure au droit laïc dans les sociétés démocratiques et pluralistes ; c'est au contraire, le droit libéral et démocratique fondé sur l"universalité (ou égalité) des droits qui est supérieur au droit coutumier.

C'est là l'erreur commise par le gouvernement français, telle qu'elle s'exprime à travers les propos récents du premier ministre qui prétend interdire, sinon la PMA , du moins la GPA aux couples homosexuels, et sur ce point les adversaires du mariage homosexuels, de la PMA et de la GPA ont tout à fait raison : le droit à l'homoparentalité est impliqué par le mariage homosexuel, car il définit les même droits à la parentalité -ce qui est reconnu pour l'adoption- que le mariage hétérosexuel. La PMA est admise pour les femmes dans ce cadre hétérosexuel et même dans un cadre monoparental, on voit mal pourquoi elle pourrait être refusée ou interdite dans le cadre de couples, mariés ou non, dits homosexuels. Si l'on accorde aux femmes homosexuelles le recours à la PMA, on ne voit pas en quoi les hommes pourraient ne pas avoir le même droit à l'homoparentalité par la pratique de la GPA. Enfin, dès lors que la GPA peut être pratiquée ailleurs dans des conditions qui échappent à tout contrôle, il est vain de prétendre l'interdire totalement en France et cela sans même une menace de sanction et prétendre inciter, sinon, obliger les pays qui autorise cette pratique de l'interdire pour des français. Cela tient, soit du délire paranoïaque pur et simple, soit de l'enfumage tactique à courte vue.

Une interdiction inapplicable, dans le monde ouvert qui est le nôtre, est toujours pire qu'une légalisation. Il fait de l'illégalité (de l'avortement ou, de la PMA et GPA) un danger médical et social plus ravageur encore, pour les femmes, les hommes et aussi et surtout les enfants, lesquels devraient subir une punition absurde selon les droits de la personne, la non répercussion en droit de leur état civil français, pour une prétendue faute commise par leurs parents.

Le 07/10/2014


Nature et enfantement.

Une limitation naturelle (les hommes ne peuvent tomber enceints) ne constitue en rien un motif raisonnable suffisant de s’y soumettre sur le plan éthique. Corriger les différences naturelles vécues comme injustices et discriminations vaut pour les mal-entendants, les mal-voyants, les manchots etc... les femmes et hommes stériles, Cela est même caractéristique de l’évolution de l’espèce humaine.

Dira-t-on que les hommes ne peuvent porter un enfant parce que la nature en a décidé ainsi ? Mais là aussi la nature ne décide rien car elle n’a pas de volonté propre, sauf à en faire un dessein de Dieu. Il n’y a que la volonté c’est à dire les désirs humains qui décident de ce qui peut être fait ou non à partir de nos connaissances de la nature et des progrès technologiques que les sciences permettent de faire sans danger pour quiconque. Je pose en principe que l’état laïc n’a pas à décider en matière de métaphysique morale dans le domaine contractuel, en l’absence de victime déclarée au contrat, ni chez les contractants ni chez les autres adultes qui ont le droit de décider pour eux-même ce qu’il désirent faire ou ne pas faire, au nom de leur morale mais non pas d’imposer celle-ci aux autres.

Dira-t-on que les enfants seront nécessairement victimes de la PMA/GPA ? Nous savons dors et déjà que la réponse est négative au regard de l’expérience acquise en Belgique et aux USA. Il n’ y a aucune raison de supposer, si les enfants en sont informés, qu’ils en soient plus traumatisés que les enfants issus d’une PMA avec donneur de sperme anonyme. Ces enfants ne sont pas plus handicapés pour la construction de leur vie que ceux de couples hétérosexuels, mariés, divorcés ou pacsés ou seulement concubins. Personne n’a jamais et du reste ne peut interdire à une femme de faire un enfant toute seule, ce qui n’est pas plus « naturel » que la PMA/GPA.

La seule question est donc de savoir à quelles conditions il serait raisonnable de pratiquer la GPA dès lors que cette pratique est consentie par toutes les personnes concernées et qu’aucune ne se considère comme victime, sauf à victimiser de l’extérieur son désir et/ou sa situation, comme si les personnes n’avaient pas le droit d’user de leur autonomie alors même que celle-ci ne fait aucune victime déclarée par aucune des personnes concernées. Au nom de quelle morale supérieure l’état laïc aurait-il le droit d’interdire une liberté dont la loi définirait précisément les modalités pour qu’elle ne fasse aucune victime ? Le fait que certains ne respectent pas le droit du travail est délictueux, mais cela ne remet pas en cause l’idée de contrat de travail.

Qu’est-ce qu’une loi libérale ? C’est une loi que fait que l’autonomie de chacun puisse s’’exprimer sans nuire aux autres. Par contre une interdiction,impossible à faire respecter en Europe et dans le monde du fait qu’elle est légale dans d’autres pays, rend cette pratique potentiellement plus dangereuse pour les libertés et la santé des femmes porteuses.


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